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Histoire de l’enseignement à Turpange de 1853 à 2008.

Texte publié dans la Chronique n°  20   2008

Christian Moïs et Achille Wagner

Préambule.

Au cours de l’année scolaire 2006 – 07, madame F. Lamy, institutrice à l’école communale de Turpange, choisit comme thème d’année pour ses élèves : l’histoire de l’école. Selon certaines sources orales, elle aurait eu 100 ans en 2007.

A cette occasion, le Cercle historique est sollicité et les archives de la Commune et de l’Etat sont fouillées. Madame Lamy retrouve aussi de nombreux registres relatifs à l’école : ces précieux documents qui couvrent une période allant de 1882 à 1958 ont été consultés avec profit. De son côté, Achille Wagner, originaire de Differt, ayant fréquenté l’école de Turpange, avait rédigé en mars 2003 une « Petite histoire de l’école communale de Turpange » grâce à de nombreuses recherches personnelles. La présente publication est donc la synthèse de ces recherches.

  1. Les écoles
  1. L’école communale du presbytère

Un enseignement primaire a-t-il existé à Turpange dès la période hollandaise ? Les frères Jacques et Pierre Kirsch de Messancy ont suivi les cours d’enseignants à l’Ecole modèle de Luxembourg. Jacques Kirsch aurait été instituteur à Turpange en 1826. Dans quelles conditions ? Nous l’ignorons. Le registre des comptes de la commune nous apprend qu’en 1843, une quittance a été remise à l’administration pour paiement de l’instituteur mais qu’elle n’a pas été honorée car « l’école de cette localité n’est pas reconnue ». On peut donc estimer qu’il existait à cette époque un enseignement privé (sans doute une « école d’hiver » comme dans d’autres sections) qui se déroulait certainement chez un particulier[i]. Ce sont les parents des élèves qui devaient payer l’instituteur.

En 1843, la population de Turpange n’ayant pas eu de suite favorable à une requête auprès du Conseil communal de Messancy, s’adresse directement au roi et à la reine, demandant pour le village la construction d’une église, d’un presbytère et d’une école.

Les comptes communaux font mention d’une « école d’hiver » à Turpange à partir de 1853. Il y a un local prévu mais il n’est pas spécifié ; il n’y a pas de traitement pour l’enseignant. En cette année 1853, il y avait 27 garçons et 25 filles en âge de suivre ces cours durant l’hiver, pour une population villageoise de 307 habitants[ii].

Les vœux des citoyens seront finalement exaucés car le premier local dont nous avons connaissance est la classe accolée au presbytère. Les  plans ont été fournis à l’administration communale par l’architecte provincial Albert Jamot le 29 novembre 1851. Il s’agissait de reconstruire le presbytère et d’en profiter pour y adjoindre une classe. Le terrain pour la construire fut acquis auprès des époux André Becker et Marguerite Kontz, en partance pour les Etats-Unis. Originaire de Sélange, André Becker était meunier. Il émigra avec sa femme et leur fils Christophe en 1852. L’adjudication des travaux eut lieu le 16 juillet 1854 et fut emportée par Fr. Muller de Turpange. Le budget communal de 1854 prévoyait une somme de 2576,95 fr pour la réparation du presbytère et la construction de la classe. Entre-temps, le vieux presbytère s’est écroulé en juin 1855. Les travaux de construction furent entrepris peu après et la réception provisoire put se tenir en juillet 1856[iii].

C’est la loi organique du 23 septembre 1842, due à Jean-Baptiste Nothomb, qui imposa à chaque commune d’organiser l’enseignement primaire sur son territoire. En 1845, il n’y avait encore dans la province que 26 écoles pour garçons et 28 écoles pour filles, gérées ou adoptées par les communes. Il y en aura respectivement 43 et 42 en 1854 puis 79 et 79 en 1872[iv].

Le Conseil communal de Messancy décide, au cours de sa réunion du 23 octobre 1858, qu’une classe mixte serait ouverte à Turpange en janvier 1859. En cette année, le village comptait 53 maisons et 276 habitants. Les enfants de Differt qui devaient se rendre à l’école de Messancy pourraient également suivre leur scolarité à Turpange.

Un rapport de 1901 nous apprend que le local mesurait 7,5 m x 6,25 m et 3,2 m de haut. Les élèves étaient au nombre de 54 dans cette pièce alors que, d’après les normes en vigueur à l’époque, les dimensions n’autorisaient d’en accueillir que 33 ! La cour de récréation avait une superficie de 51 m². Elle était trop exiguë pour être ornée au moyen de plantes mais l’instituteur Charles Noël disposait des pots dans la classe permettant de faire pousser jusqu’à 53 variétés de fleurs et plantes en 1910[v] ! Les enfants jouaient souvent sur la rue : heureusement, le trafic automobile était inexistant. En 1911, le village comptait 272 habitants.

La classe était balayée chaque jour et lavée à l’eau le samedi.

Dans l’ancienne école, les murs étaient blanchis à la chaux une fois par an, généralement au mois de septembre. Dans les comptes de 1921, la Commune prévoit une somme de 100 fr à cet usage.

Suite au rapport de l’inspecteur cantonal Mercier, la Commune décide en sa séance du 5 juin 1914, d’engager des travaux de rénovation, en fait de peu d’importance.

En 1920, l’école, de même que l’église et quelques maisons, bénéficiaient de l’électricité fournie par le moulin tenu par Nicolas Schumers. En 1922, la Commune sollicita le raccordement de tout le village au réseau régional exploité par la Sodelux, devenue ultérieurement Esmalux puis Unerg et, enfin, Electrabel.

Après l’abandon de la classe jointive au presbytère en 1928, le local est loué à monsieur le curé mais n’a toujours pas de nouvelle destination en 1936.

  1. L’école des filles – La nouvelle école.

En 1902, le Président du Conseil français Emile Combes veut la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Il décrète la fermeture de 9000 écoles tenues par des congrégations religieuses. Plus de 3000 frères ou pères, 40000 soeurs et 16000 enseignants laïcs perdent leur emploi. De nombreuses congrégations décident de s’exiler, notamment en Belgique, à partir de 1903, suite à la « Loi Combes ». C’est ainsi que les Pères maristes bien implantés à Differt  depuis 1888 organisent l’accueil de Sœurs de la Providence de Créhen (Bretagne).

Parmi les six filles de la famille Migette de Differt, deux d’entre elles étaient entrées en religion chez les Soeurs maristes en France (Louise, Sœur St Théodore et Catherine, Sœur St Ignace). Elles connaissaient donc bien le Père Bériard, supérieur de l’Institut de Differt. Ce dernier, au courant de la situation particulièrement difficile des ordres religieux en France, écrivit à Sœur St Ignace pour lui proposer de leur trouver une maison en Belgique en cas d’expulsion. Après des contacts avec monsieur Donner, propriétaire des ardoisières de Martelange, c’est dans ce village que vinrent s’établir les premières religieuses maristes en 1903, y fondant la communauté « Notre Dame du Rosaire ».

Cette communauté est loin d’être riche et s’organise pour survivre : confection d’hosties, travaux de couture, broderie, tricot et raccommodage. La congrégation est dissoute en France et le noviciat est fermé en 1908. Les Sœurs s’adressent à nouveau aux Pères maristes de Differt qui leur trouvent une propriété à Habay-la-Neuve, achetée en juin 1909. Des agrandissements y sont réalisés sur les plans de l’architecte Lamy d’Arlon.

L’abbé Camille Ensch, vicaire de la paroisse Saint-Martin d’Arlon, est nommé curé à Turpange le 1er novembre 1907. Un de ses souhaits en arrivant dans sa nouvelle paroisse, est l’ouverture d’une classe pour les filles, classe qui serait tenue par des Sœurs.  Des tractations s’engagent probablement dès 1908. Les Sœurs maristes ont déjà créé une école à Martelange en 1903, pourquoi pas une autre également à Turpange ? Le Père Bériard lui apporte son appui en 1909[vi]. Le Conseil communal de Messancy, pour sa part, se prononçait favorablement sur ce projet dès sa séance du 18 août 1908 : « Le conseil est d’avis que la section de Turpange jouisse d’une classe pour les filles dans un bâtiment qui sera construit à Turpange par des sœurs ».

Mais à ce moment, la congrégation a un autre objectif : l’ouverture d’une école et d’un noviciat à Habay-la-Neuve. La supérieure générale s’oppose au projet de Turpange et par lettre envoyée le 6 avril 1910, le curé Ensch lui exprime son vif regret et la supplie de revenir sur sa décision. Ce qu’elle fit dans les jours qui suivirent car elle donne rapidement son autorisation et dès le 22 avril, le curé Ensch lui expédie une missive pour la remercier chaleureusement.

Mais pendant cette période de tractations, le Conseil communal de Messancy n’était pas resté inactif et s’engageait aussi dans le processus de construction d’une école pour les filles. La délibération du Conseil du 14 février 1909 rapporte :

« Considérant qu’il est devenu nécessaire de bâtir un nouveau local d’école à Turpange dont le plan et devis est prévu et d’acquérir le terrain destiné à servir d’emplacement à ce bâtiment ;

Qu’il résulte des renseignements fournis par le Collège qu’une parcelle de terre convertie en jardin appartenant à Vve Jungers – Biren et enfants et pouvant convenablement servir à cet usage peut être acheté de la main à la main des dits Jungers – Biren et enfants ; ils offrent de vendre au prix de 250 f l’are

Vu le procès verbal d’information du commodo – incommodo,

Décide de demander l’autorisation nécessaire pour pouvoir acquérir le terrain spécifié ci-dessus,

La dépense sera couverte par les subsides de l’Etat et de la Province et par un emprunt que la commune doit contracter après approbation par la Députation permanente,

Charge le Collège de procéder aux dispositions préliminaires pour réaliser le projet et délègue le Bourgmestre pour l’information. ».

Le Conseil communal a sans doute pris en compte les conditions déplorables imposées aux élèves dans la classe (mixte) attenante au presbytère. Le  rapport scolaire de 1901 signale que 54 enfants suivent les cours sur une superficie règlementairement prévue pour un maximum de 33 élèves. L’inspecteur principal C. Dondaine écrivait d’ailleurs au gouverneur de la Province, le 14 septembre 1901 : « La commune de Messancy n’a pas dépensé un sou pour l’entretien de ses locaux scolaires depuis environ quarante ans. » Le Conseil souhaite sans doute construire une nouvelle classe et l’initiative du curé le pousse à concrétiser ce projet.

Des plans et devis sont même commandés à l’architecte Léon Lamy d’Arlon. La séance du Conseil tenue le 3 mars 1909 rapporte :  « Vu les plans et devis pour la construction d’un nouveau bâtiment d’école à Turpange se montant à la somme de 19.644 f 69 centimes, décide à l’unanimité d’approuver les plans modifiés et le devis ».

Mais, retournement de situation, ce sont finalement les Sœurs maristes qui achètent le terrain avec l’appui du Père Hérail, économe de Differt, et construisent immédiatement un nouveau bâtiment[vii]. L’achat, comme le veut la coutume mariste, est réalisé au nom de deux Sœurs de la communauté : Louise Chanvillard (Mère Ste Odile) et  Philomène Péronnier (Mère St François de Sales), alors religieuses à Habay-la-Neuve [viii]. D’où venaient les fonds ? Certainement en partie de la congrégation. Mais les Sœurs ont aussi réalisé des emprunts, notamment auprès de certains particuliers de la commune et des Pères de Differt.

Lors de la séance du 20 août 1910,  le Conseil communal note : « Comme le constate le rapport de monsieur l’inspecteur cantonal, la situation scolaire de Turpange sera dès cette année réglée de la façon la plus satisfaisante par la création d’une école des filles qui réalisera la séparation des sexes et, en plus, par la création d’une école gardienne »[ix].

Cinq religieuses quittent l’école de Habay-la-Neuve pour animer celle de Turpange. Il s’agit de Peiffer Victorine, Sœur St Albert (née à Heinsch) qui sera directrice de la classe primaire, Feller Maria, Sœur St Aldegonde (née à Autelbas) qui dirigera l’école gardienne, Peronnier Philomène, Mère St François de Sales (née à Rochefort, France) qui sera la supérieure de la communauté de Turpange, Sautier Eugénie, sœur St Arsène (née à Lucerne, Suisse) et Lajarige Maria, Sœur St Firmin (née à Chaussenilles, France) qui est sœur auxiliaire et ne porte pas le même habit que les autres ; les trois premières Soeurs sont reprises dans les registres communaux comme  « religieuses – institutrices ».

Elles sont domiciliées officiellement à Turpange au 10 novembre 1910 dans la maison n° 37 [x].

La communauté des Soeurs à Turpange en 1919. Doc. F. Merlet

Stoffel Rosalie, Sœur Marie Salomé (née à Altenheim, Alsace), Huet Anne-Marie, Sœur St Rogatien (Delval, France), Folie Marguerite, Sœur Eulalie (Bruxelles), Belche Anna, Sœur Théodore (Grumelange), Soffray Eugénie, Sœur Ste Jeanne (Pont-de-Vaux, France), conseillère générale, Marie Pélissier, Sœur Ste Zite (Le Puy, France), Adrienne Perruche, Sœur St Bruno demeureront  aussi temporairement à Turpange en raison des difficultés apportées par la guerre dans les autres communautés. Deux institutrices laïques, Florence Decker de Autelbas et Félicie Belche de Martelange ont été également domiciliées à l’école.

L’enseignement débuta le 4 novembre 1910 et l’inauguration solennelle du couvent et des classes, sous le vocable d’ « Ecole Saint-Joseph » eut lieu le lundi 7 novembre 1910 en la fête de Saint Hubert, en présence du doyen Witry. Ce bâtiment fut donc construit en un temps très court. A l’étage se trouvaient les cellules des religieuses ainsi qu’un oratoire à l’emplacement actuel de la bibliothèque [xi]. Les Sœurs y bénéficiaient d’un chauffage central et de sanitaires, utilisant l’eau du toit recueillie dans un réservoir placé au grenier. Les classes étaient séparées par une cloison mobile qui, en s’ouvrant, créait un spacieux local utilisé tant pour les fêtes enfantines que pour des manifestations organisées par les Œuvres paroissiales. La façade était ornée d’une statue de Saint Joseph. Nous ignorons l’identité de l’architecte. Est-ce Léon Lamy qui avait fourni des plans à la commune un an auparavant et avait réalisé ceux de l’agrandissement de l’école des Sœurs à Habay ? En raison du délai extrêmement court passé entre l’achat du terrain et l’occupation des locaux, on peut imaginer que, moyennant certaines adaptations, c’est le plan commandé par la commune qui fut exécuté.

C’est au cours de la séance de Conseil communal du 19 décembre 1911 que les honoraires de l’architecte Lamy sont soldés grâce à l’ouverture d’un crédit spécial (« Section de Turpange, fourniture des plans, devis et cahier des charges pour projet de construction d’une école des filles »).

Indépendamment de la construction du bâtiment, il reste la question de la prise en charge du fonctionnement de l’enseignement. Les pouvoirs communaux  avaient la possibilité soit de l’organiser eux-mêmes, soit d’adopter une école (généralement libre ou privée) existant déjà. C’est cette solution qui fut choisie pour Turpange, jusqu’au départ des Sœurs.  L’école avait le statut d’école privée avec, comme directeur, l’abbé Camille Ensch. Le 5 décembre 1910, le Conseil communal accepte le patronage (l’adoption) de l’école primaire pour une première période de 10 années, renouvelable. Il prend en charge le salaire de l’institutrice, le matériel scolaire et les fournitures. La direction de l’école entretient le local, fournit le mobilier, les tableaux, les stores, le blanchissage bisannuel de la classe et le chauffage.

Une lettre du Ministère des Sciences et des Arts, dont dépendait l’enseignement, adressée à l’administration communale stipule : « De l’avis de l’inspection scolaire, la dite école de Turpange réunit les conditions exigées pour bénéficier des avantages de l’adoption. Cette adoption ayant été prononcée par le conseil communal le 5 décembre 1910, ne pourra sortir ses effets qu’à partir du 1er janvier suivant ».

Il y aura donc, à partir du 1er janvier 1911, une école communale des garçons et une école « adoptée » par la commune pour les filles. Le curé en est de droit le directeur. Le traitement sera effectivement versé à Victorine Peiffer par la commune à partir de janvier 1911 (registre des comptes de la commune). Un nouveau contrat d’adoption sera signé entre la Commune et le comité de l’école le 23 mars 1921 pour une durée de 10 ans.

En 1911 figure au budget de la commune la prise en charge des fournitures scolaires pour 12 élèves de l’école des filles considérées comme « indigentes » (cahiers, gommes, ardoises). On note aussi l’achat d’une carte de Belgique, une carte du Luxembourg, une carte du Congo, une série de poids, une série de mesures, une balance.

Le 6 octobre 1911, la supérieure Mère St Joseph envoie une belle aube brodée au curé Ensch en remerciement tangible et permanent de l’excellent pasteur qui s’est si bien occupé des Sœurs. L’abbé Ensch aura des mots émus pour dire combien il se sent touché par cette délicatesse « … Il y a des moments où il est vraiment doux d’être pauvre, afin de se permettre de recevoir » et il ajoute « …. Vos religieuses, révérende mère, ont conquis la sympathie de tous ici … »[xii]. Pour la messe, les religieuses se rendent à l’église paroissiale située en face de l’école.

La communauté s’implante donc à la satisfaction générale. L’effectif moyen se monte à une cinquantaine d’élèves.

Mais le premier conflit mondial éclate bientôt. Les troupes allemandes arrivées dans la région le 20 août 1914 projettent de transformer en hôpital la maison des Pères de Differt. Ils envisagent de loger les Pères maristes dans l’école de Turpange et, dans cette optique, signifient aux Sœurs qu’elles doivent évacuer dans les 24 heures. Les Sœurs s’arrangent avec des Dominicaines de Messancy pour éventuellement trouver refuge dans leur communauté. Elles vivent alors au milieu des malles en attendant l’ordre formel de partir qui ne viendra que le 8 novembre. La petite communauté se disperse alors brièvement. Après cet épisode, les Sœurs intègrent à nouveau l’école et les cours reprennent normalement.

La guerre n’a fait qu’accroître les problèmes financiers de la congrégation. Il y a toujours des dettes à rembourser. Pour Turpange, une lettre du 19 janvier 1919 nous apprend que la supérieure Mère St Joseph a envoyé 15000 fr dus à madame Schneider de Messancy[xiii].

L’école de Habay, occupée successivement par les Allemands puis les Français est dans un triste état. Les Sœurs ont quitté l’établissement. Certaines Sœurs de Habay ou de Martelange viennent à Turpange mais les seules rentrées financières sont constituées par le salaire d’institutrice de Sœur St Albert ainsi que de menus travaux. L’école gardienne est également adoptée en 1918 et fournit un second salaire. D’autre part, la situation politique a changé en France et les congrégations peuvent à nouveau rentrer au pays. On constate aussi un manque de vocations et la congrégation envisage de quitter les maisons créées en Belgique. Le 2 décembre 1920, l’évêché de Namur donne son accord sur la fermeture de Turpange. L’abbé Alfred Weber, nommé curé en février 1915, ne peut que s’incliner[xiv].

Les Sœurs quittent définitivement Turpange pour l’école de Martelange en septembre 1921[xv]. La maison de Martelange sera elle-même fermée en 1924, année d’ouverture de la dernière école belge des Sœurs maristes en Belgique à Brasschaat qui subsistera jusqu’en 1986. Sœur Aldegonde et Sœur St Albert y ont été affectées.

Le Conseil communal décide alors d’acquérir le bâtiment. Le compte-rendu de la séance du 2 août 1921 stipule : « Vu l’obligation où se trouve la commune de bâtir une école des filles à Turpange ;

Attendu que le bâtiment d’école appartenant aux Sœurs de Ste Marie à Turpange et qui a servi pour les écoles adoptées primaire et gardienne  de Turpange est à vendre pour le prix de 60.000 fr.

Attendu que le bâtiment réunit toutes les conditions requises par les règlements en vigueur pour servir d’école et qu’il est de l’intérêt de la commune de faire cette acquisition plutôt que de s’engager dans les dépenses considérables que nécessiterait la construction d’un nouveau bâtiment.

Décide d’acquérir ce bâtiment pour le somme de 60.000 fr. Délègue le bourgmestre pour rédiger le procès-verbal de commodo et incommodo. »

Le projet d’achat, soumis au ministère des Sciences et des Arts compétent pour l’enseignement est accepté le 14 juillet 1922. La Commune ne versera aux Sœurs le solde de ce rachat qu’en 1927.

Elle peut alors envisager la réalisation de divers travaux. Mais un rapport de l’inspecteur principal A. Perbal daté du 12 avril 1924 stigmatisait une fois de plus l’inertie communale : « .. la classe des garçons de Turpange est installée dans  un local fort peu convenable…Cette école ne possède pas de bûcher, pas d’annexe et pas de cour. Les lieux d’aisance sont à 3 m des fenêtres de la classe ; ils menacent ruine et offrent un aspect peu agréable. N’étant pas fermés, ils sont utilisés par les passants et restent dans un état permanent de malpropreté, constituant ainsi un vrai danger pour la santé des élèves et du maître.

En conséquence, il est urgent de chercher à remédier à cette situation si préjudiciable à plusieurs points de vue.

A cette fin, je me permets de vous soumettre les suggestions suivantes : l’école adoptée des filles de Turpange se trouve installée dans un bâtiment de construction récente, moderne, spacieux, bien éclairé, pourvu d’une belle cour et d’un jardin de plusieurs ares. Il a appartenu à une congrégation religieuse mais est devenu actuellement propriété de la commune.

Moyennant quelques transformations, notamment le déplacement de la cloison de séparation des deux grandes salles du rez-de-chaussée, l’incorporation de l’annexe ouest dans une des salles et l’exhaussement de cette annexe, il serait aisé d’installer, à côté de l’école des filles et du logement de l’institutrice, l’école des garçons et d’y faire une cour convenable…

En tout cas, je suis d’avis qu’il est de l’intérêt de la commune de Messancy de chercher dans la voie que j’indique l’amélioration de la situation actuelle de l’école des garçons de la section de Turpange. »[xvi]

La commune suit effectivement ces recommandations et charge le commissaire – voyer Perleau de Halanzy de dresser un plan avec les modifications à réaliser. Il le signe le 29 mars 1927. L’adjudication a lieu le 27 décembre 1927 et elle est emportée par l’entreprise Joseph Neu de Messancy. Les travaux peuvent commencer (réparation de maçonnerie, nouvelles cloisons, nouvelles portes, nouvelles estrades et nouveaux tableaux notamment ; construction de 3 WC supplémentaires et de 3 urinoirs, aménagement de la cour des filles sur l’arrière).

L’école des garçons tenue dans la classe voisine du presbytère est fermée et, pour la rentrée 1929 -30, tout l’enseignement se déroule dans la « nouvelle école ». Il y a cependant une classe des garçons et une classe des filles. Les classes ne redeviendront mixtes qu’à partir de l’année scolaire 1955 – 56.

L’école fut raccordée à la distribution d’eau en 1952, comme tout le village.

Les cours de récréation ont été modernisées en 1970 et les sanitaires ont été transférés à l’intérieur du bâtiment. L’installation du chauffage central fut réalisée en 1973.

Les enfants dont les parents le désiraient pouvaient apporter leurs tartines à l’école et obtenir un bol de potage au prix de 5 fr, à partir de l’année scolaire 1974 -75. Depuis 1991, un repas chaud est servi pour un prix raisonnable, repas fourni par l’IMMA d’Athus jusqu’en février 1997 puis par l’Athénée Royal d’Athus.

L’école fut raccordée au téléphone en 1987.

  1. Les enseignants
  1. Ecole mixte puis école des garçons

La classe ouverte le 1er janvier 1859 eut pour titulaire Pierre Nepper qui enseigna jusqu’en 1879. Natif de Habergy, il était auparavant instituteur à Aix-sur-Cloie. Il habitait dans une maison appelée depuis « A Schoulmeeschtesch » (chez l’instituteur), actuellement n° 16 rue de la Halte.

Antoine Peiffer lui succéda. Né à Habergy le 17 septembre 1853, il ne resta à Turpange que de 1879 à 1881. Il est décédé à Habergy le 20 novembre 1937.

Le Conseil communal nomme comme instituteur, à partir du 1er octobre 1881, Charles Noël qui poursuivra sa carrière à Turpange jusqu’en décembre1921. Né à Messancy le 9 mai 1861, il avait obtenu son diplôme le 15 septembre 1881 à l’Ecole normale de Virton. En 1901, son salaire était de 1500 fr. et son indemnité de logement et chauffage se montait à 200 fr. Il  habitait à Messancy d’où il venait chaque jour à bicyclette. Il a du interrompre sa carrière à plusieurs reprises, étant atteint de « mélancolie intellectuelle ». A chaque fois, le Conseil communal désignait un enseignant intérimaire.

L’école libre des filles ayant été adoptée par la commune en 1910, Charles Noël n’eut plus, à partir de cette époque, que la classe des garçons. Il n’y n’organisait pas de compositions trimestrielles et ne délivrait pas de certificat pour les études primaires complètes. Charles Noël, en plus de sa classe d’enfants, tint aussi durant plusieurs années (au moins 1910 à 1920) une « classe d’adultes », soit deux heures en soirée, trois jours par semaine. Il recevait pour cette classe un salaire annuel de 400 fr.

Les relations entre Charles Noël et l’administration communale ne semblent pas avoir été toujours sereines. Dans le compte rendu de la séance du Conseil communal du 5 juin 1914, consacré aux travaux à effectuer, nous trouvons ce paragraphe assez ahurissant :  « Le conseil fait remarquer que les cabinets ont été convenablement réparés en 1913. Et sans la surveillance de l’instituteur, les élèves sont libres pour dégrader et briser tout sans que ce dernier leur fasse la moindre observation. On dit même que ces faits lui font plaisir car jamais aucune classe ni meubles n’ont été dégradés en vingt années comme la classe et les meubles de Turpange pendant une seule année » ![xvii] L’instituteur se défend dans une lettre datée du 29 juin adressée à monsieur Mercier, inspecteur cantonal. Il y renvoie largement les responsabilités à l’incurie de l’administration communale :

« 1. Les cabinets n’ont nullement été réparés, seulement la toiture en 1913 ;

  1. 2. J’affirme qu’aucune dégradation n’a été faite pendant les heures où ma présence est requise. Les dégradations proviennent de ce que les cabinets se trouvent à 2 mètres du chemin communal et les portes n’étant pas pourvues de serrures, il est aisé au public d’en profiter largement.
  2. 3. Je puis certifier que toujours j’ai recommandé aux élèves de ne causer aucune dégradation et je leur ai défendu de venir jouer aux abords de la salle de classe….
  3. 4. ….
  4. 5. En 1884, lors de ma première conférence pédagogique, présidée par feu monsieur Maus, il a été déclaré que « le mobilier de l’école de Turpange est entretenu avec beaucoup de soin mais il est suranné et incomplet ». Or ce même mobilier existe encore actuellement.

Pendant 29 ans, j’ai dirigé une classe surpeuplée dans un local très exigu. Il n’est donc pas surprenant que le plancher et les bancs – pupitres aient subi une certaine usure d’autant que bien des réunions ont eu lieu et se font encore dans ma classe : adjudications de la coupe de bois, chant grégorien, caisse de retraite et de secours mutuel, conférences d’horticulture et d’agriculture, cinéma. Quant à l’effritement du plafond, il est dû à cette circonstance que pendant de nombreuses années, le grenier a servi pour remise à foin, feuilles mortes, bois de chauffage.

Je pense, Monsieur l’Inspecteur, que vous avez pu constater que toujours j’ai apporté un soin jaloux à la propreté, au bon ordre et à l’ornementation de ma classe. A ces travaux, j’ai constamment associé mes élèves, leur inculquant de cette manière et le sentiment du beau et le respect de la propriété. »[xviii]

En fin de carrière, Charles Noël est malade et la classe est tenue par deux institutrices provisoires : Jeanne Gilon du 16 novembre 1921 au 31 mai 1922 puis mademoiselle Berthe Wittamer jusqu’en 1923. Le Conseil communal du 5 février 1922 précise que le traitement annuel de mademoiselle Gilon sera de 4800 fr à laquelle il sera ajouté une indemnité de 400 fr pour frais de résidence, 200 fr d’indemnité de direction et 400 fr de prime de vie chère. La dépense de l’intérim sera supportée par l’Etat à raison de 2/5, par la Commune pour 2/5, par la Province pour 1/10 et par l’instituteur malade pour 1/10. Mais Charles Noël envoie sa lettre de démission le 23 janvier 1922, laquelle est acceptée par le Conseil communal du 5 février 1922.

C’est alors Emile Ambroise, originaire de Viville (Bonnert) qui est nommé. Né le 25 juin 1903, il avait obtenu son diplôme à l’Ecole normale des Frères maristes d’Arlon en juillet 1922. Il épouse Yvonne Madeleine Huberty en novembre 1926. Il enseigne encore dans le local accolé au presbytère puis, pour l’année scolaire 1929 – 30, il intègre une classe de la « nouvelle école » réservée jusque-là aux filles[xix]. Il n’y avait plus de classe d’adulte à l’époque d’Emile Ambroise. En raison d’un long congé de maladie de l’institutrice, Emile Ambroise se vit confier également la classe des filles de 1953 à 1958.

Chaque année, à la veille des grandes vacances, il rassemblait tous les élèves pour un nettoyage complet de la salle de classe : le sol était lavé au savon noir et à grande eau, les bancs également.

Il prend sa retraite au 1er novembre 1958.  Musicien dans l’âme, il avait passé des examens de piano et, au jury supérieur de Bruxelles, il obtint un Premier Prix le 7 novembre 1937.  Dès le début de son installation, il remplit bénévolement les fonctions d’organiste et chantre à l’église paroissiale. Il se dévoue pour la chorale Saint-Hubert ainsi que pour la mise en scène de la troupe de théâtre. Ses anciens élèves organisent une séance académique à l’occasion de sa retraite, le 23 novembre 1958.

Pour lui succéder en 1958, le Conseil communal nomme un des anciens élèves de monsieur Ambroise : Emilien Schrobiltgen. Lui aussi est diplômé de l’Ecole normale des Frères maristes d’Arlon. Il fut d’abord instituteur à Habay. Il enseigne à Turpange jusqu’au 30 septembre 1984. Il assure les fonctions de chef d’école pour les entités de Turpange, Hondelange et Wolkrange du 1/10/1984 au 30/9/1987 après leur fusion administrative puis pour Turpange – Hondelange du 1/10/1987 au 31/5/1992. Depuis 1984, il était titulaire de classe à mi-temps, consacrant son autre mi-temps à l’administration. Il prend une retraite bien méritée le 1er juin 1992.

A partir des années 1970, il organisa des activités socio-culturelles durant deux heures chaque mercredi après-midi. Il s’occupait aussi, au début de sa carrière, de fournir un potage chaud aux élèves qui mangeaient leurs tartines à midi au sein de l’école. Grâce au bénévolat des enseignants, une « étude du soir » permettait aux enfants de rester à l’école entre 16h et 17h pour y faire leurs devoirs.

Il est également l’organiste de l’église depuis 1987.

Suite à l’arrivée de madame Wagner en 1959, il y eut formation d’une classe pour les garçons et une classe pour les filles, comprenant chacune les 6 années primaires. Au début des années 1960, les deux enseignants créèrent deux classes mixtes, l’une pour les 3 premières années, l’autre pour les 3 années supérieures.

Patrice Gousembourger enseigne du 1er septembre au 30 novembre1981 puis est appelé au service militaire. Nadine Klein épouse Galasso effectue un intérim jusqu’en juin 1982 puis Patrice Gousembourger revient du 1er septembre 1982 jusqu’au 30 juin 1984.

Frédérique Lamy, épouse Claude, enseigne à temps partiel depuis septembre 1987 puis est nommée à temps plein au 1er septembre 1992.

Sabine Feller entre en fonction de septembre 1984 jusqu’au 30 juin 2001.Virginie Humblet, épouse de Ludovic Rasch de Bébange, enseigne à temps partiel à Turpange depuis la rentrée de 1999. Elle remplace ensuite Sabine Feller à temps plein.

La nouvelle législation qui régit l’enseignement amène une situation particulièrement complexe avec du personnel à temps partiel qui enseigne une année dans une école de l’entité communale, l’année suivante dans une autre.

  1. Ecole libre paroissiale

Aux élections législatives de 1879, le Parti Libéral vint au pouvoir. Ce parti étant à l’époque farouchement anticlérical, il ne voyait pas d’un bon œil que les instituteurs enseignent le catéchisme. Par la loi Van Humbeek (du nom du ministre de l’Instruction Publique du nouveau gouvernement), l’enseignement tomba sous la férule des opposants à la religion. Cette « loi de malheur » pour les catholiques déclencha une « guerre scolaire ». Dans la plupart des villages, les curés organisèrent des écoles « libres » en concurrence avec l’enseignement officiel.

A Turpange, le premier instituteur engagé par le curé fut Alphonse Lichtfuss qui tenait la classe dans l’écurie de sa maison, ainsi transformée en école. Son traitement était de 400 francs, y compris le loyer de sa salle d’école. Les habitants du village se cotisaient pour lui payer son traitement. Le nombre d’élèves était quasi égal dans chacune des écoles.

Paul Ley, âgé de 19 ans et originaire du Grand-duché de Luxembourg, lui succéda en 1884. Mais les élections de 1884 renversent la situation et ramènent au pouvoir le Parti Catholique. Les écoles « du curé » n’eurent alors plus de raison de subsister. Après son court séjour à Turpange, Paul Ley entra au séminaire. Devenu prêtre, il fut successivement professeur au collège Saint-Joseph de Virton, vicaire à Saint-Léger puis curé à Battincourt où il oeuvra durant une cinquantaine d’années. C’est lui qui fut à l’origine de la construction de la grotte en l’honneur de Notre-Dame de Lourdes. Très actif au sein de la Résistance au cours des deux guerres, il termina son apostolat en qualité de chanoine.

  1. Ecole libre des filles puis école communale.

Lorsque l’école est ouverte par les Sœurs maristes, c’est Victorine (ou Victoire) Peiffer, Sœur St Albert qui dirige l’école primaire et Maria Feller, Sœur Aldegonde qui dirige la section maternelle. Quatre autres religieuses institutrices enseignent également. Victorine Peiffer reçoit, en 1911, un salaire annuel de 1600 f, payable par mois.

Sœur St Albert, née à Freylange le 2 mars 1882, fit sa profession à Richmond en Angleterre le 20 septembre 1909. Atteinte de bronchite chronique, Victorine Peiffer, déjà malade en 1911, doit arrêter l’enseignement en 1919. Elle est brièvement remplacée par Clémence Decker. Après son départ de Turpange, elle va à Martelange jusqu’en 1924 puis à Brasschaat. Au Chapitre général de 1932, elle est élue conseillère générale et rejoint alors la maison de Saint-Prix dans le Val d’Oise où elle demeure jusqu’à son décès le 23 décembre 1940.

Sœur St Aldegonde est née le 15 juin 1888 à Autelbas. Elle fait sa profession à Habay le 20 septembre 1910 et se trouve directement affectée à Turpange. Elle quitte Turpange en 1919 pour rejoindre Martelange puis Brasschaat jusqu’en 1946. Après un séjour à Saint-Prix, elle retourne à Brasschaat jusqu’à son décès le 2 septembre 1979.

La première institutrice engagée par la commune fut Marie Poncé. Née à Nothomb le 17 mars 1898, elle débute à Turpange en 1919. Sa nomination est acceptée par le Conseil communal du 13 avril 1919. Dans un premier temps, elle remplace Victorine Peiffer, en congé de maladie. A partir du 1er octobre 1921, elle devient institutrice en chef. Elle dirige ensuite la classe des filles jusqu’en 1953 puis, après un congé de maladie, elle prend sa retraite en 1955.

Elle s’impliqua dans la vie paroissiale, s’occupant notamment de la préparation à la communion solennelle. Elle offrit un des vitraux de l’église placés en 1939, celui du Sacré Cœur. A l’occasion d’une cérémonie d’au-revoir, le 14 novembre 1953, le bourgmestre Ch. Kirsch lui remit une décoration pour services rendus à la Résistance durant la guerre. Pendant sa carrière, elle habitait le logement attenant à l’école des filles.

Monsieur Ambroise puis monsieur Schrobiltgen reprennent temporairement une classe mixte. En janvier 1959, Augustine Lemeunier épouse de Elimar Wagner de Messancy est nommée pour diriger la classe des filles. Elle est diplômée de l’école normale de Bastogne. Elle sera pensionnée le 31 août 1981.

  1. Ecole maternelle

Une classe maternelle fut ouverte par les Sœurs maristes en 1910. Elle fut adoptée par la commune au 1er janvier 1918. Sa directrice fut Maria Feller (Sœur Aldegonde). L’effectif moyen était de 35 enfants (garçons et filles). C’est le système éducatif Fröbel qui était appliqué[xx]. Cette classe maternelle subsista jusqu’en 1921.

Il fallut attendre 1961, pour qu’une section maternelle soit à nouveau ouverte au sein de l’école communale. Marie-Noëlle Claisse épouse Freidt est nommée titulaire au 1er septembre. Elle prendra sa retraite en 1990. C’est alors Pascale Vincent épouse Fécherolle qui lui succède jusqu’en 2006, année où elle se voit confier la fonction de chef d’école C’est Cynthia Gabriel qui lui succède.

  1. La vie à l’école
  1. Le nombre d’élèves

La population scolaire a fluctué de façon importante au cours du temps.

Nous reprenons ci-dessous le nombre d’élèves de l’école communale pour différentes années scolaires[xxi] :

Garçons                        Filles

1882 – 83            13                                    11

1887 – 88            32                                    12

1903 – 04            28                                    27

1921 – 22            41                                    44

1930 – 31            28                                    27

1933 – 34            33                                    33

1940 – 41            29                                    39

1948 – 49            16                                    18

1952 – 53            15                                    5

1957 – 58            17                                    11

Dans le registre de 1901, pour une population mixte totale de 54 élèves au 1er octobre, nous relevons :

6 élèves de moins de 6 ans

8 élèves de 6 à 7 ans

10 élèves de 7 à 8 ans

5 élèves de 8 à 9 ans

6 élèves de 9 à 10 ans

6 élèves de 10 à 11 ans

8 élèves de 11 à 12 ans

3 élèves de 12 à 13 ans

2 élèves de 13 à 14 ans

  1. Les horaires et les matières

Le registre de 1882 nous montre que la journée commençait et se terminait par un cours de 30 min. de religion. Les matières enseignées étaient : la lecture, la lecture française élémentaire, la lecture expressive, la grammaire, l’orthographe, le style, la calligraphie, l’histoire et la géographie, les sciences naturelles, l’arithmétique,le système métrique, le calcul mental, les fractions, la gymnastique, le dessin et le chant ou solfège.

La langue maternelle fut longtemps l’allemand, le français étant la « seconde langue » enseignée. La langue usuelle, en 1901, était l’allemand pour tous les élèves; en 1926, l’allemand pour 31 garçons et le français pour 2 ; en 1936, le français pour 25 garçons et l’allemand pour 9.

La loi du 19 mai 1914 instaura l’instruction obligatoire de 6 à 14 ans pour tous les enfants. Cet âge limite a été porté à 18 ans par la loi du 29 juin 1983. Par suite du déclenchement de la guerre le 4 août 1914, la nouvelle loi n’a été mise en application qu’après les hostilités, en 1919. Il semblerait cependant qu’en 1915, le Gouverneur allemand Von Bissing essaya de faire exécuter cette réforme scolaire dans le simple but de susciter de meilleures dispositions de la population en faveur de l’occupant.

Jusqu’à l’année scolaire 1958 – 59, il y avait classe du lundi au samedi, sauf le jeudi après-midi. Les cours commençaient à 8h00 (puis 8h30) jusque 11h00 avec ¼ h de récréation à 9h30 puis de 13h00 à 16h00 avec ¼ h de récréation à 14h30. Durant la période d’enseignement de monsieur E. Schrobiltgen, les cours se déroulaient de 8h30 à 11h45 et reprenaient de 13h30 à 16h00. A partir du 1er septembre 1959 (loi du 29 mai 1959), les cours sont suspendus les après-midi du mercredi et du samedi. Depuis l’année scolaire 1970 – 71, il n’y a plus école le samedi matin non plus.

A l’école des filles, au 2ème degré en 1939, il y avait 6h de français par semaine et 3h40 d’allemand. Les élèves tenaient un cahier de devoirs relatif à l’enseignement anti-alcoolique et à la protection des animaux. Marie Poncé dispensait chaque année un cours non obligatoire d’horticulture. Les travaux à l’aiguille furent donnés par mademoiselle Marie Muller (vers 1910), gouvernante du curé Ensch.

Jusqu’à l’arrivée du Père Jean Wagner en 1962, le curé venait chaque jour à 11h00 dans la classe et y donnait une demi-heure de catéchisme à tous les enfants.

L’école communale ne fut jamais pourvue d’une bibliothèque.

  1. Les congés et vacances

Les jours de congé comme les périodes de vacances ont fluctué au cours des années.

Voici, par exemple, la situation en 1902 -1903 :

Congé le lundi et mardi gras (mais il est précisé : pour la prière des 40 heures)

Vacances de Pâques du 27 mars au 6 avril

Congé le lundi de Pentecôte

Congé du 28 mai au 2 juin car on a détecté deux cas de rougeole.

Congé du 14 au 23 juin

Congé le samedi 19 juillet pour l’Adoration

Congé le 21 juillet pour « l’anniversaire de l’Inauguration du Roi »

Congé le 15 août

Grandes vacances du 24 août au 5 octobre

Congé le 1er et 2 novembre puis le lundi de la fête patronale (Saint Hubert le 3                         novembre)

Congé de Noël les 25 et 26 décembre

Il faut aussi compter 5 jours de congé pour les « conférences » pédagogiques que suit             l’instituteur dans un des villages du canton.

Durant l’année scolaire 1949 – 1950, on note :

Congé de Toussaint les 1, 2 et 3 novembre

Congé les mardi 7 et mercredi 8 novembre pour la kermesse

Congé le 15 novembre pour la fête du roi

Vacances de Noël du 24 décembre au 3 janvier

Congé le 2 février pour la fête de la Purification

Congé le lundi et le mardi gras

Vacances de Pâques du 3 avril au 15 avril

Congé le 1er mai pour la fête du Travail

Congé à l’Ascension, le lundi et mardi de Pentecôte

Grandes vacances du 10 juillet au 4 septembre

Congé exceptionnel les 3 et 4 novembre par manque de chauffage.

Ces deux exemples nous montrent bien l’évolution sur une cinquantaine d’années : allongement des vacances de Pâques et de Noël, allongement et déplacement de la période des grandes vacances.

Au 19ème siècle, les enfants allaient régulièrement à l’école            durant la mauvaise saison mais devaient participer aux travaux des champs au printemps et en été et l’école se dépeuplait durant cette période.

On constate qu’au début du 20ème siècle, les absences n’étaient pas particulièrement nombreuses. Jusqu’en 1930 environ, nous voyons des élèves quitter l’école pour « entrer en service ». Les absences pouvaient être « légitimes » lorsque l’enfant, en dehors de maladie ou d’un cas de force majeure, restait à la maison pour aider sa mère malade ou pour participer à certains travaux des champs.

  1. Les promenades et excursions

A partir de 1923, les élèves de l’école des filles tenue par Marie Poncé partent chaque année en excursion :

1923 : Bouillon

1924 : Grottes de Han

1925 : Namur, la citadelle, une écluse, les monuments

1926 : Anvers : jardin zoologique, port, tour en bateau

1927 : cascade de Coo et grottes de Remouchamps

1928 : Bouillon

1929 : 1) Dinant, citadelle et grottes, voyage sur la Meuse

2) Verdun, ossuaire, fort de Douaumont

1931 : Han et Rochefort.

1932 : Clervaux et Vianden

1933 : Longwy : champs de bataille de 1914 et hauts fourneaux

Les garçons vont également en excursion annuelle :

1938 : Dinant, Charleroi et Waterloo

1939 : Exposition de l’eau à Liège et fête de l’aviation à Metz.

1952 : Vesdre et Grand-duché

1956 : Verdun

Une « promenade pour observation » était organisée chaque quinzaine par Emile Ambroise. Ses élèves allaient aussi souvent à Clairefontaine.

  1. Evénements particuliers et remarques.

Si les Sœurs maristes ont été aidées dans leur implantation à Turpange par les Pères maristes, elles n’ont cependant jamais résidé à Differt. Les Pères maristes ont accueillis une communauté des Sœurs de la Divine Providence de Créhen qui, de 1910 à 1940 furent préposées à la lingerie et à la cuisine du scolasticat. D’autre part, les demoiselles Migette de Differt, dont deux d’entre elles étaient entrées dans la congrégation des Sœurs maristes, mirent une partie de leur propriété à la disposition des Sœurs de Sainte Jeanne de Mauriac, expulsées d’Aurillac en 1908[xxii]. Elles étaient hébergées dans la maison devenue ultérieurement le café des Voyageurs.

Lors du Conseil communal du 25 septembre 1910, il est décidé que lors de la coupe ordinaire du bois de Turpange, une réserve de huit stères sera réservée au chauffage de l’école.

A l’occasion de l’inauguration de l’école des Sœurs, les 6 et 7 novembre 1910, les Pères du Sacré Coeur de Clairefontaine ont organisé des représentations cinématographiques qui ont connu un grand succès.

A l’adoption de l’école des filles en 1911, la commune octroie 2 francs par élève et par an pour les fournitures ainsi qu’ 1,25 franc pour les fournitures du cours de couture et tricot.

A partir de décembre 1916, à l’initiative d’un comité américain, la « Soupe Nationale » est distribuée chaque jour à la population, excepté le dimanche. Le réfectoire se trouvait d’abord dans le local des Sœurs puis dans le magasin Sand. Charles Noël en tient la comptabilité. De décembre 1916 à août 1917, ce sont les Pères maristes de Differt qui préparent et livrent les « rations » comprenant la soupe et le pain. Le Père Hérail, économe, comptabilise chaque jour pour Turpange entre 75 et 95 rations gratuites ainsi que de 12 à 25 rations payantes. Des rations sont également remises aux Sœurs.  [xxiii].

Le 30 octobre 1938, le local de classe a servi pour une projection cinématographique patriotique « Aveugle de guerre ».

Dès mars 1890, l’épargne est proposée aux élèves et 19 d’entre eux ouvrent un livret. Le 19 novembre 1899, Charles Noël crée une « mutualité de retraite » dénommée Saint-Hubert au profit des élèves. Il en sera le secrétaire – trésorier durant le reste de sa carrière. Il animait aussi un « Cercle des petits protecteurs des animaux » et un « Cercle des protecteurs des arbres et plantations ».

Pour cause de guerre, l’école est fermée du 7 août au 3 novembre 1914.

La bibliothèque paroissiale.

Le curé Alfred Weber créa au village une bibliothèque ouverte à tous, dans le local jouxtant le presbytère (ancienne école communale). En sa séance du 14 décembre 1930, le Conseil communal « décide de céder irrévocablement à l’usage du presbytère le bâtiment ayant servi d’école des garçons à Turpange et ne formant qu’un ensemble avec ledit presbytère. » Un rapport de 1936 nous apprend cependant que « la vieille école » est louée à monsieur le curé. C’est donc probablement à cette époque qu’y fut installée la bibliothèque. Durant les années 1950, elle est tenue quelque temps par Adelin Wagner. Elle est ensuite transférée dans l’ancienne chapelle des Sœurs, au premier étage de l’école et reconnue officiellement par l’Etat en 1958. L’instituteur Emilien Schrobiltgen en devient responsable et obtient en 1964 un certificat de bibliothécaire. Il assurera la tenue de cette bibliothèque jusqu’en 2003 ; ce sont alors mesdames Van Haelen et Martiny – Bach qui reprennent le flambeau. Une partie des ouvrages prêtés étaient en langue allemande.

Le chef d’école.

Lorsque l’école ne comptait qu’une classe unique et un seul enseignant, celui-ci bénéficiait automatiquement du titre de chef d’école.

Le Conseil communal de Messancy vote la fusion des écoles de Hondelange, Turpange et Wolkrange le 26 septembre 1984. Emilien Schrobiltgen  est désigné comme instituteur en chef pour la nouvelle entité dont le domicile administratif est fixé à l’école de Turpange.

A partir du 1er septembre 1991, ce sont les écoles de Hondelange, Sélange et Turpange qui forment une nouvelle entité fusionnée. Le directeur est alors Charles Lommel, chef d’école de Sélange depuis le 27 septembre 1987. En 1992, l’école de Wolkrange rejoint également l’entité. L’école de Longeau en fait partie en septembre 1995, lors du départ en retraite de monsieur Xavier Sainlez. Au départ de monsieur Lommel (retraite au 1/9/2006), le Conseil communal attribue ce poste à  Pascale Vincent.

Le siège administratif des écoles fusionnées reste fixé à Turpange. Le chef d’école y a donc son bureau depuis le début des fusions.

Le 5 juillet 1935, la classe est suspendue en raison du « 50ème anniversaire de la fondation du royaume du Congo » !

Les registres matricules de fréquentation, conservés depuis 1882, ont toujours été notés en français même quand la langue d’enseignement était majoritairement allemande. On constate un changement durant la guerre 1940 – 45. En décembre 1941, Emile Ambroise note le congé du 8 : « Fête de l’Immaculée Conception » puis le 24 «  Ferien der Weinachten ». Il inscrira pour le 21 juillet 1942 : « Jahresfeier der Thronbesteigung Leopolds des I ».

En fin d’année 1944, le premier étage de l’école fut occupé par des soldats américains appartenant à une compagnie de transport.

En 1981, des menaces de fermeture pèsent sur l’école en raison de la baisse du nombre d’élèves. Grâce à une pétition lancée dans le village, habilement orchestrée par l’instituteur E. Schrobiltgen, l’école est sauvée.

Les cours de gymnastique et de religion, autrefois donnés par les instituteurs ou institutrices, sont confiés depuis une vingtaine d’années à des « maîtres spéciaux ».

C’est ainsi que Brigitte Lucas donne le cours de gymnastique et de natation depuis le 1er octobre 1984. Le cours de religion est confié, selon l’année, depuis le 1er octobre 1987, à Marylène Remacle épouse Georges Theis de Sélange ou à Simone Knops épouse Barthel  de Habergy.

Sources :

Archives de l’Etat Arlon (fonds 4/35, bâtiments publics)

Archives communales de Messancy

Archives de l’école de Turpange (1882 – 1958) recueillies et conservées par madame F. Lamy

Helbo Sabine : mémoire de stage niveau 1, février 2002

Témoignages de : Charles Lommel, Emilien Schrobiltgen (anciens chefs d’école), Georges Guebels.

Articles de l’Avenir du Luxembourg et du Journal des Trois Frontières.

Les 100 ans de notre école : ça ne compte pas pour des babioles. Ouvrage réalisé par les élèves de l’école de Turpange en 2007.

Remerciements :

Nous tenons à remercier madame Frédérique Lamy, institutrice à l’école primaire de Turpange, qui nous a fourni de nombreuses informations et nous a permis de consulter les archives de l’école ainsi que monsieur Emilien Schrobiltgen, chef d’école honoraire, pour sa documentation, ses souvenirs et la collection de photographies mises à notre disposition.

Nous adressons nos plus vifs remerciements à Sœur Françoise Merlet, mariste, qui nous a transmis une très intéressante documentation sur la présence de l’ordre en Belgique au cours du 20ème siècle, a corrigé et abondamment complété les données que nous avions pu recueillir localement sur la création et la vie de l’école Saint-Joseph.

Nos remerciements vont aussi à Arlette Thill et Pascale Vincent qui nous ont fourni les données les plus récentes sur le personnel enseignant, à Léopold Hols pour ses informations concernant l’Institut des Pères maristes à Differt ainsi qu’à notre secrétaire Jean-Marie Zimmerman qui nous a aidé notamment pour les recherches généalogiques.


[i] Livre des comptes de 1807 à 1847. Archives communales Messancy.

[ii] Budgets et exercices 1849 – 1875. Archives communales Messancy

[iii] Fonds des bâtiments publics 4/35, farde 667, Archives de l’Etat Arlon

[iv] Munten L. Les statistiques de l’enseignement en Belgique, Vol II : L’enseignement primaire 1842 – 1878.  Bruxelles 1992

[v] Rapports annuels insérés dans les registres matricules de l’école.

[vi] Gobillot P., Histoire des Religieuses Maristes en Europe et en Océanie, 1934 vol 2.

[vii] Malgré nos recherches aux archives de l’Etat d’Arlon dans les répertoires des notaires de Messancy Jules Tesch et Henri-Joseph Bosseler et du notaire Henrion d’Aubange, il n’a pas été possible de retrouver l’acte d’achat de ce terrain.

[viii] Administration communale de Messancy. Matrice cadastrale Vol. 10

[ix] Registres aux délibérations du conseil communal. Archives communales de Messancy

[x] Registre de population de Turpange 1910 – 1920. Adm. Communale de  Messancy

[xi] Notre Eglise  1851 – 2001, ouvrage collectif édité à l’occasion du 150ème anniversaire de la construction de l’église de Turpange, sous la direction de E. Schrobiltgen (2001).

[xii] Merlet F. Les Sœurs Maristes en Belgique, Travaux de l’atelier d’études maristes, document n° 73, mai 2008

[xiii] Merlet F. Les Sœurs Maristes en Belgique, Travaux de l’atelier d’études maristes, document n° 73, mai 2008

[xiv] Merlet F. Les Sœurs Maristes en Belgique, Travaux de l’atelier d’études maristes, document n° 73, mai 2008

[xv] Registre de population de Turpange 1921 – 1930. Adm. Communale de  Messancy

[xvi] Fonds bâtiments publics 4/35 AEArlon farde 2104 Messancy- Turpange

[xvii] Registre aux délibérations du conseil communal de Messancy

[xviii] Fonds des bâtiments publics. Farde Messancy 2104. AEArlon

[xix] D’après diverses notes ajoutées dans le registre matricule de 1900.

[xx] Gobillot P., Histoire des Religieuses Maristes en Europe et en Océanie, 1934 vol 2.

[xxi] D’après les « registres matricules de fréquentation des élèves ». Archives de l’école

[xxii] Hols L. et Gigi R., Carnet de bord d’une épopée Mariste en Lorraine belge. Differt 1887 – 2000.  Ed. Michel frères, Virton, 2001

[xxiii] Archives de Differt ; carnet d’économat de 1914 à 1917