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Le Pays de Messancy, 1939 – 1945.


Texte publié dans la Chronique n° 14 de 2002

Avant-propos [1]

Notre cercle a choisi comme thème du bulletin annuel 2002 une période à la fois proche si l’on considère les vingt siècles d’histoire qui nous ont précédés et déjà lointaine pour les témoins toujours en vie de ces années douloureuses.

Les données historiques concernant les décisions politiques et les campagnes militaires ont été abondamment publiées. Nous n’y reviendrons brièvement que dans le but de situer les évènements locaux. Nous nous sommes avant tout intéressés à la vie quotidienne des habitants de nos communes d’alors : Habergy, Hondelange, Messancy, Sélange et Wolkrange.

Nous avons fouillé les archives et documents d’époque. Ils nous fournissent des données généralement fiables. Dans le contexte particulier d’une occupation ennemie, cependant, il n’était pas toujours opportun de rapporter tous les faits et il s’avérait parfois utile de modifier leur transcription.

Nous avons, d’autre part, interrogé de nombreux témoins. Une soixantaine d’années après les faits, il n’est pas toujours facile de s’en souvenir avec précision. Leurs évocations au fil des ans en a parfois modifié le contenu. Nous avons tenté de recouper les informations mais nous sommes conscients de la subjectivité de certains propos, des lacunes de certains récits.             Nous espérons que d’autres témoins se manifesteront ; nous pourrons ainsi compléter l’histoire de cette période et publier leurs souvenirs.

Nous exprimons nos plus sincères remerciements à monsieur le Bourgmestre Roger Kirsch et au personnel communal qui nous ont gentiment facilité l’accès aux archives des communes fusionnées, rassemblées à l’hôtel de ville de Messancy.

Toute notre gratitude va évidemment à ces témoins qui nous ont ouvert leur mémoire et leurs tiroirs pour faire revivre avec passion et émotion ces années difficiles :

Paul Back, Jean-Baptiste Friob, Floris Gofflot, Gustave Hagen, Paul Hennico, René Hoeltgen, André Huppert, Maurice Kariger, Félix Léger, Firmin Maus, Arsène Mauer et Léa Muller, Roger Mauer, Rolande Mauer, André Reis, Raymond Royer, Victor Reiland, Albert Schmit, Emilien Schrobiltgen, madame Georges Simon, René Stoffel, Albert Theisen, Léa Thill, Julien Wagner et Alexis Zimmer.

Quelques jalons historiques i,h,g

La défaite de 1918, l’inflation de 1923 et la grande crise économique de 1929 plongent l’Allemagne dans une situation économique sans précédent. Le 30 janvier 1933, le vieux maréchal-président Hindenburg appelle Adolf  Hitler aux fonctions de chancelier. Hitler, réputé pour ses talents oratoires, fut chargé après la défaite de 1918 de l’endoctrinement des troupes. Il adhère au parti national-socialiste récemment fondé pour en devenir rapidement le chef (« Führer »). Ses thèses ultra-nationalistes et racistes amènent son parti au pouvoir. Il impose sa dictature et assume le commandement suprême des armées, réarme son pays,  occupe militairement les berges du Rhin et entreprend l’accroissement du territoire national.

En Italie, Benito Mussolini (le « Duce »), fondateur d’un parti national-fasciste, avait fait de la violence la règle de sa politique intérieure et avait rappelé certaines prétentions territoriales sur la France.

En Extrême-Orient, c’est le pouvoir militaire du Japon qui entreprend une vaste campagne expansionniste en envahissant la Corée et la Chine.

En Belgique, le Roi Léopold III prononce le 14 octobre 1936 un discours qui convainc le gouvernement de la menace germanique et de la nécessité d’un renforcement militaire.

Fondateur du mouvement catholique du Christ-Roi (Christus Rex) et directeur des éditions Rex, Léon Degrelle s’était proclamé en 1935 chef du mouvement Rex, très critique à l’égard du régime parlementaire et favorable au régime fasciste italien de Mussolini. Ce mouvement politique avait recueilli un succès non négligeable aux élections de 1936 avec plus de 15 % des suffrages. Au cours d’élections partielles en 1937 puis en 1939, Rex subit un échec qui l’amène à une fascisation accrue. Beaucoup de rexistes deviendront des collaborateurs actifs de l’ennemi lors du conflit qui se prépare g.

Après que l’Allemagne ait annexé l’Autriche, Hitler propose en septembre 1938 à la France et à la Grande-Bretagne un accord humiliant dont la signature eut lieu à Munich. En Belgique, P.H. Spaak annonce une mobilisation partielle dite « Pied de Paix renforcé ». Cet épisode assez bref (trois jours) fait cependant craindre à la population l’imminence d’un nouveau conflit. Le 29 octobre, Hitler masse 70 divisions entre Aix-la-Chapelle et Wesel.            L’Allemagne pénètre au Danemark et en Norvège en avril 1939 puis, en violation des accords passés, annexe la Bohème et envahit la Pologne le 1er septembre.  La France et l’Angleterre réagissent en déclarant officiellement la guerre à l’Allemagne le 3 septembre. La Belgique, quant à elle, se proclame neutre dans ce conflit, position prise dès 1936 et garantie par Londres, Paris et Berlin en 1937. Le gouvernement belge mobilise 650.000 hommes et renforce les ouvrages de défense.

Le Régiment du 10ème de Ligne, rebaptisé en 1933 Régiment des Chasseurs Ardennais, est stationné à Vielsalm, Bastogne et Arlon avec pour mission de garder la frontière le long de la Province du Luxembourg.

Le 10 mai 1940, c’est l’offensive générale. La Hollande est envahie, les défenses belges le long du canal Albert et de la Meuse sont enfoncées, les blindés se ruent vers Sedan en traversant le Grand-Duché de Luxembourg puis la Province de Luxembourg (guerre-éclair « Blitzkrieg »). La Ligne Maginot, suite de fortifications disposées par la France face à la frontière allemande de Montmédy à Haguenau en Alsace est contournée puis soumise après une courte résistance. Le Roi accepte de signer la capitulation le 28 mai. La Belgique connaît alors le régime d’occupation. Il faut attendre le débarquement allié en Normandie, le 6 juin 1944, pour voir naître un véritable espoir de victoire. Trois mois plus tard, en début septembre, c’est enfin la Libération. L’armée allemande tente une dernière contre-offensive dirigée par le maréchal von  Rundstedt entre le 16 décembre 1944 et le 18 janvier 1945, de Monjoie à Echternach incluant la bataille de Bastogne. Hitler se suicide le 30 avril et la capitulation est signée le 8 mai 1945.

1. Les prémices d’une guerre, la mobilisation.

a. L’ année 1938

Le 28 juin, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Messancy est averti par le commandant du district de gendarmerie d’Arlon Jeangette que la commune devra éventuellement fournir 16 chevaux de trait ordinaires D2. Le 5 octobre, le bureau des contributions d’Athus prévient la commune qu’il est disposé à lui verser les sommes nécessaires pour payer les militaires rappelés sous les drapeaux sur base de 8 f par jour avec accroissement de 3 f 50 par enfant à charge. La commune de Messancy établit le 10 septembre la liste de la levée 1939, jeunes gens nés en 1919 appelés à faire partie de la réserve de recrutement. Nous y trouvons : Bailleux Camille Ernest, Bremer Nicolas, Deboulle Nestor Léon, Duchaine Arthur Aubain, Gilson Raymond, Guischer Emile Nicolas, Kirsch Albert Henri, Mauer Roland Victor, Henry Alexis Firmin, Schiltz Antoine, Schmit Marcel Nicolas, Schumacker Emile Armand, Schumacker Jean-Baptiste, Wagner Adalbert, Wagner Joseph Maria, Zimmermann Léopold auxquels ont été ajoutés les sursitaires et inscrits de 1920 : Caspary Jean-Baptiste, Conrardy Albert, Coos Jean-Pierre, Furst Léon, Gérard Jules, Hames André Désiré, Hebler Nicolas Edmond, Jacob Roger, Jung Michel Théophile, Munster Jean Maurice, Neu Antoine, Schiltz Théophile, Schmit Marcel Nicolas, Tibesar Edmond et Wagner Jean-Pierre D2.

A Sélange, des habitants se rassemblent volontiers près du café Schandeler. Le poste de TSF est posé sur l’appui de la fenêtre et l’on entend Hitler marteler «  Voulez-vous du beurre ou des canons ? » Et la foule allemande de répondre « Des canons ! ». De quoi inquiéter les auditeurs sélangeois. Seul l’épicier Victor Blum restait d’un optimisme irréductible : « Avec ce qu’ils ont ramassé en 1918, ils ne reviendront jamais » GF.

b. L’année 1939

Le premier ou le 2 janvier, les conseils communaux issus des élections d’octobre 1938 prêtent serment. Les administrations communales doivent remplir différents registres en vue de réquisitions : véhicules hippomobiles, tombereaux agricoles, inspection des chevaux etc …

En juillet, on procède à la pose de mines destinées à détruire certains ponts ou certaines routes en cas d’invasion ennemie. Des équipes composées de 4 soldats et d’un sergent sont envoyées aux points stratégiques. Des mines ont été placées en haut de l’actuelle rue de Luxembourg à Messancy, en trois endroits à la sortie du village de Sélange, près des passages à niveau de Longeau et Hondelange. A proximité ont été construits des abris en briques pour les militaires de garde. L’un d’entre eux, transformé en garage, subsiste encore près de la maison sise au 30 rue Schmit à Longeau. Deux chicanes sont également installées peu avant la frontière sur la route Sélange – Clémency. Des hommes sont réquisitionnés pour aider les militaires à poser des obstructions sur les routes de Guerlange à Clémency et à Guerlange au poste fixe. Il s’agit de Schumacher Jean-Baptiste, Schoumacher Ernest, Schrobiltgen Jean, Mauer Emile, Hausemer Jean-Baptiste, Miget Adolphe, Schrobiltgen-Seyler Jean-Baptiste, Schrobiltgen Pierre, Gillard  Emile, Wiltschutz Jean, Schimberg Albert et Rix (le légionnaire !). Sur la route Longeau – Guerlange, 50 hommes ont presté 265 heures 30 à 4 f de l’heure. De Messancy à Clémency, 18 hommes ont travaillé 142 heures D2.

Les militaires en congé illimité qui possèdent une bicyclette sont désignés pour renforcer la Brigade de Gendarmerie d’Aubange aux services à la frontière. Ces hommes sont logés et nourris chez l’habitant. Il s’agit de Eischen Nicolas (classe 1914/19), Hames Léon Jean (17/19), Mauer Nicolas (17/19), Schmit Jean-Baptiste (17/19), Genin Maurice Edmond (18/19), Musty André Joseph (18/19), De Baere Armand Joseph (16/19), Schmit Nicolas (15/19), Stoffel Eugène (17/19), Schockweiler Louis Victor (15/19), Wagner Henri Joseph (18/19) D2.

Par ordre de réquisition venant de la 6éme Compagnie du 2éme Bataillon du 1er Régiment de Chasseurs Ardennais, le capitaine Hansquine demande que Messancy fournisse 22 ouvriers civils munis de pelles, escoupes et pioches en renfort aux militaires. Le travail se fera de 8 à 12 h et de 13 à 17 h. Un camion militaire viendra prendre les hommes chaque matin à 7 h 30 du 10 au 14 octobre, du 16 au 21 octobre et du 23 au 25 octobre D2.

La commune de Messancy envoie au Ministère des Communications la liste des propriétaires d’une automobile (8 habitants) ou d’une voiture inscrite au registre des réquisitions ( 28 habitants) ; la commune de Hondelange compte 5 habitants propriétaires d’ un véhicule. Seuls Paul Joseph Bertholet et Adolphe Castilhon possèdent un pistolet automatique susceptible d’être fourni pour les besoins de l’armée.

Le 5 septembre, la commune de Messancy envoie une circulaire intitulée « Conseils à la population de la commune contre le péril aérien ». On peut y lire :

1- Eclairage : Prendre des dispositions pour que tout éclairage intérieur des maisons puisse être dès la menace d’une attaque, rendu complètement invisible de l’extérieur et du ciel ….

2-  Incendie : Tenir dès maintenant, dans la mesure du possible, les greniers des maisons débarrassés de toutes matières inflammables. Y placer une pelle à long manche et une provision de sable sec …

3- Abri familial : Préparer dans les caves l’aménagement d’un abri familial étanche et susceptible de résister à un effondrement dans la maison ; y déposer des outils et matériaux indispensables : pioche, pelle etc .. Prévoir enfin un éclairage de secours. A défaut d’abri familial dans les caves, creuser dans le jardin à une certaine distance du logis des tranchées suffisantes pour toute la famille ; elles doivent avoir une profondeur de 1 mètre 80 et une largeur de 80 centimètres.

4- Précautions contre les gaz : à défaut de masque anti-gaz, se munir de bandes de gaze ou de ouate hydrophile ; les imbiber en cas d’attaque par gaz d’une solution de bicarbonate de soude ou d’hypersulphite ….

5- Achat de masques : l’administration communale se charge de commander des masques anti-gaz pour ceux des habitants qui voudraient en acheter …

6- Garde civile territoriale de protection aérienne :  l’administration communale réitère encore une fois sa demande d’engagement de volontaires pour la défense passive anti-aérienne ; on accepte même les engagements des anciens militaires des classes 1922 et plus anciens. Ces volontaires doivent simplement assurer le service dans la commune de Messancy en cas d’attaque aérienne et il n’est pas du tout question comme le bruit en a couru qu’ils doivent aller travailler dans d’autres communes du pays …

7- Attaque aérienne : en cas où l’on entendrait tonner les canons anti-aériens du côté de Longwy, faire rentrer immédiatement les enfants et les grandes personnes car malgré la neutralité de la Belgique et sans que cette neutralité soit menacée, les éclats d’obus anti-aériens pourraient retomber jusque sur la commune de Messancy ; il est donc prudent de s’abriter.

8- Renseignements : monsieur Hoffelt, instituteur en chef à Messancy qui a suivi les cours spéciaux au point de vue protection aérienne est à la disposition des habitants qui auraient des renseignements supplémentaires à demander …

Cette circulaire ne doit nullement alarmer la population mais la conseiller.

Tous bien unis autour de notre Roi qui a proclamé la neutralité absolue de la Belgique nous avons du reste tous les espoirs d’échapper à la guerre.

Par le collège, le Secrétaire E. Kirsch et le Bourgmestre R. de Gauquier.2

Les canons de 75 de la Ligne Maginot, d’une portée maximale de 11 km, sont incapables d’atteindre la frontière belge ; la zone en avant de cette ligne est délaissée par le haut commandement français. Il faudra attendre le 3 mars 1940 pour que des unités d’infanterie s’installent enfin sur la « Position avancée de Longwy » j. De temps à autre, des avions allemands passent très haut dans le ciel.

Voilà dans quel état d’esprit vit la population.

Depuis vingt ans, on remémore dans les veillées les terribles années de la Grande Guerre (1914-18) et les atrocités des armées allemandes. Les aînés craignent de revivre ce cauchemar, les adolescents se forgent une idée sur ce qui peut les attendre en cas de conflit.

2. Mai 1940 : l’invasion.

a. Les allemands arrivent ! KR, HR, RR, WJ, KM, HP

Dans la nuit du vendredi 10 mai, avant-veille de la Pentecôte, l’annonce de l’imminence d’une invasion du Grand-Duché provoque la mise en alerte des Chasseurs Ardennais et le rappel des permissionnaires vers 1 h 30. A 2 h, c’est l’ordre d’amorcer les dispositifs de destruction des ponts et routes. Le lieutenant Charles se rend à Messancy avec trois camions pour emmener les hommes en cas de repli. L’ordre de faire sauter les mines est donné à 4 h 53’ k.

Deux explosions assez violentes réveillent alors la population de Messancy. L’armée belge vient de faire sauter les mines installées sous la route de Clémency (en haut de l’actuelle rue de Luxembourg) et sur la route du Dolberg à l’entrée de Longeau. Celle qui se trouvait sous le pont de la rue de la Gare n’a pas été mise à feu, heureusement pour les maisons voisines. Les militaires, leur mission accomplie, quittent les lieux. Poussés par la curiosité, des habitants se rendent au Dolberg et constatent que la route vers Athus est éventrée par un énorme cratère.

A Hondelange, c’est la rue des Mines qui est interrompue par un trou béant.

Le soir du 9 mai, monsieur Gofflot revenait très tard au train et, s’étant arrêté à la halte de Turpange, montait la Klaus à pied. Il se rendit compte d’une effervescence anormale près de la guérite construite à l’entrée de Sélange et fit part de ses impressions à sa famille en regagnant le domicile. Dans la nuit, des coups de fusils claquent et réveillent la population,  signal de l’amorçage des mines. C’est d’abord celle de la rue de la Klaus qui explose. Des blocs de pierre et des gravas s’abattent sur les maisons du quartier et traversent certaines toitures. La ferme Fries, proche de l’explosion, est à moitié rasée. Puis une seconde mine enfouie sous la rue Reichel en direction de Messancy saute également ; enfin celle qui doit détruire la rue du Bois vers Hondelange est mise à feu. Chaque fois, c’est une pluie de terre et de pierres qui tombe sur le village. Des avions passent et des parachutistes auraient été largués entre Sélange et Turpange GF.

A Messancy, dès 7 heures, un motocycliste allemand en long imperméable s’arrête rue du Castel et demande « Nach Türpingen ? » ; ayant reçu l’indication, il part dans la direction de Turpange.

La population se demande alors que faire : quitter au plus vite ou rester au village ? Vers 9 heures, les Pères Maristes de Differt et leurs élèves passent à pied et se dirigent vers Longwy. Les familles juives décident aussi de se réfugier en France. Le magasin Sand situé sur la place se dénommait « Au drapeau tricolore ». Le père Sand se dépêche de décrocher le drapeau qui flotte en façade. Cela n’empêchera pas les soldats allemands de s’y approvisionner, notamment en chocolat.

Un camion stationné sur la place attendait les jeunes gens mobilisés qui devaient rejoindre leurs unités. Il part rapidement vers Arlon. Certains d’entre eux quittent alors le village à vélo, en bleu de travail ou portant une couverture.

Vers 8 heures, quelques habitants de Hondelange attroupés au carrefour de la rue des Rochers voient arriver un motocycliste casqué. Leur premier réflexe est de lui souhaiter bon courage, croyant à une estafette française. Mais lorsque le soldat leur répond « Danke schön », ils ont compris ….  Il va jusqu’à Wolkrange se rendre compte de la situation puis revient HG. L’explosion de la mine a causé de gros dégâts et empêche temporairement la Wehrmacht de passer par le village. Ce n’est qu’en soirée que trois motocyclistes le traverseront.

A 9 heures également, une moto allemande avec side-car pénètre dans Sélange. Les occupants s’arrêtent à plusieurs endroits pour coller des affiches en allemand disant : « La Wehrmacht va avancer ; ceux qui la gênent seront fusillés ». Puis deux ou trois civils, bien habillés, sans bagages et parlant luxembourgeois arrivent de la direction de Clémency. Ils disent aux habitants «  Partez ! ils tuent tout le monde ». C’était manifestement la 5ème colonne qui tentait d’envoyer les populations civiles encombrer les routes de France. Les villageois sont d’abord pris de panique ; certains chargent des charrettes avec l’essentiel puis des concertations ont lieu et, finalement, personne ne part, sauf les mobilisés en congé qui vont tenter de rejoindre leur unité. L’armée allemande arrive alors de Clémency, contourne sans difficulté les chicanes et envahit le village. F. Gofflot se souvient d’un motard qui lui demandait la direction de Turpange en pointant Sélange sur la carte routière fixée sur son guidon. Les emplacements des mines et chicanes y étaient  matérialisés par un point rouge ! Les canons avec caisson suivent. Ils étaient tirés par 8 chevaux ; dans les côtes, le gradé responsable de la pièce criait aux hommes « descendre et aider ».  Une partie de la colonne prend la direction de Messancy par la rue Reichel GF.

Au même moment, un petit détachement motorisé de 50 à 80 soldats français traverse le village de Bébange et le dépasse. Ils entrent en contact avec l’ennemi et résistent à l’orée du bois jusqu’à épuisement de leurs munitions. Il y eut des morts et des blessés. Plus tard, des habitants iront déposer des fleurs des champs sur les tombes creusées en lisière e. Les bébangeois écoutent la radio et apprennent l’invasion du Grand-Duché. Vers 10 heures, un gendarme de Halanzy vient prévenir tous les hommes de 16 à 45 ans : ils doivent partir au plus tôt. Un maigre baluchon est préparé et dès 11 heures, montés sur des vélos (parfois de dame) avec quelque argent en poche, la petite troupe quitte le village. Des soldats français postés sur les hauteurs leur déconseillent d’aller vers Etalle, village déjà occupé par une colonne allemande, et les envoient vers Montmédy où ils dormiront le premier soir. Le second jour, c’est la paille d’une caserne de Verdun qui leur permet de se reposer. Puis la séparation arrive : les mobilisables doivent rejoindre le Hainaut, les autres jeunes gens effectueront un périple jusqu’à Nevers pour revenir en Belgique le 28 juin WJ.

Un Groupe de Reconnaissance d’infanterie français, ayant couvert les destructions que le génie avait effectué le long de la Batte s’aventure jusqu’à Habergy mais n’ayant pas de mission précise, se replie après quelques heures j.

Des avions d’observation allemands sillonnent le ciel et depuis le haut de la route de Clémency, on peut apercevoir au loin un énorme nuage de poussière.

Les enfants de Messancy qui préparent leur communion pour le surlendemain, jour de la Pentecôte, quittent l’église où ils ont suivi le catéchisme. Au bas des escaliers, ils aperçoivent de petits véhicules de l’armée française qui se dirigent vers Arlon ; des soldats penchés aux portières crient à la population « On les aura, les boches … ». Quelques éléments français ont pris position devant le cimetière de Turpange.

A Differt, quatre ou cinq autos-mitrailleuses françaises de la 3ème Division de Cavalerie légère se postent près de la ferme Ries (à cette époque, située au début du « Triangle d’Or »). L’avant-garde allemande qui arrive est prise sous leurs tirs. Les échanges de feu sont violents. Plusieurs Allemands sont blessés ou tués. F. Gofflot verra passer à Sélange des camions chargés de blessés dont un avait le bras arraché. Ces camions remontaient la colonne d’invasion à contre-sens pour filer vers le Grand-Duché GF. Les Allemands déclenchent un tir de mortiers alors que le capitaine responsable du détachement français ne cesse de répéter : « Où reste notre artillerie ? Nous allons nous faire écraser ici » c. Quatre ou cinq Français y ont laissé leur vie et ont été enterrés dans le fond de la propriété des Pères Maristes. Les croix portaient des inscriptions en allemand dont une avait la mention  « Unbekannter farbiger Franzose » (« Français de couleur, inconnu » HP , probablement un spahi marocain.

Les Allemands, croyant que le fermier Ries renseignait les français sur leurs positions, capturent la famille à la fin des combats. Ils les emmènent, bras levés, à travers le village de Turpange et se dirigent vers le cimetière dans l’intention de les fusiller. Le curé Weber est aussitôt prévenu et va parlementer avec les soldats. Il parvient à les convaincre de la bonne foi des Ries et leur sauve ainsi la vie. Leur maison sera cependant incendiée et la famille sera provisoirement hébergée chez les Pères Maristes BP.

Une auto-blindée et un groupe de soldats français restent en poste près de la chapelle Sainte Croix et échangent encore des tirs vers 18 heures. Un autre véhicule blindé léger stationne près de la Biff HG.

A Messancy, un homme en vêtements ecclésiastiques arrive seul de la direction de Clémency (rue de Luxembourg), tenant à la main un pesante valise. Arrivé près du pont, en face de la maison Schneider rue de la Gare, il interpelle un petit groupe d’habitants et commence à leur raconter sa fuite devant l’ennemi. Personne ne le croit (chacun pense à un espion) et, voyant qu’il ne parvient pas à convaincre son auditoire, il poursuit sa route.

Quelques minutes après cet intermède, une première moto allemande s’arrête au bas de la rue de Clémency et, après une courte hésitation, se dirige vers la rue de la Gare, effectue un rapide tour du village et repart vers la frontière luxembourgeoise. A partir de ce moment, entre 9h30 et 10h, c’est une véritable invasion qui fond sur le village. Voitures, camions, autos-chenilles mais aussi charrettes puis beaucoup d’hommes à pied se suivent sans discontinuer KR. Passant par les champs, ils ne s’inquiètent nullement des dégâts occasionnés à la route par l’explosion de la mine. La 17ème Division d’Infanterie du général von Kleist passe par Guerlange et Clémency pour contourner la place forte de Longwy. La 34ème Division les suit.

Les troupes prennent position dans le village de Messancy. Un groupe s’installe dans un petit bois situé à l’emplacement de l’actuelle rue des Cerisiers, un autre envahit le bois communal derrière le château d’eau sur la route de Meix-le-Tige. Les champs sont dégagés et ils peuvent facilement observer la place forte de Longwy. Des abris sont creusés  dans les terres de la Hart. Quelques escarmouches ont lieu avec de petites unités de l’armée française. Un soldat français, Marcel Dufour est tué près de la Hart et enterré sommairement à la lisière du bois, une cinquantaine de mètres avant la chapelle KM. Dans le village, un side-car est atteint : l’un des occupants est blessé, l’autre est tué et déposé devant la maison Royer, rue de la Gare RR. Six soldats allemands seront provisoirement inhumés entre les tilleuls qui dominaient le parvis de l’église. Ils ne seront transférés dans un cimetière militaire qu’en 1943. Deux autres étaient ensevelis près du moulin de Longeau. En 1942, les occupants ont réquisitionné le tombereau de Henri Hennico pour conduire les cercueils au village HP.

Dans l’après-midi, un avion Hurricane de la Royal Air Force est abattu par la DCA (Défense Contre Avions) allemande et s’écrase dans un pré rue de Longeau (rue E. Kirsch). Le pilote est fait prisonnier et conduit à pied au café de la Gare. La carcasse de l’avion devient vite un lieu de rassemblement des jeunes qui récupèrent les débris de vitres en plexiglas pour en confectionner de petits objets tels que bagues ou croix. Un autre Hurricane s’écrase aussi à Messancy en haut de la rue de Clémency RV, D1. Des avions de reconnaissance français volent si bas, au ras des toits, que les soldats allemands tirent dessus au fusil HR. Un avion de chasse allemand (Messerschmitt ?), abattu au début des hostilités, fut découvert quelques semaines plus tard par des jeunes de Turpange. Il s’était écrasé sur le plateau situé entre Turpange et Sélange BP.

Le charroi passant par Messancy est intense et les chauffeurs doivent faire preuve d’agilité. Une moto accouplée à un side-car dans lequel avait pris place un gradé double à vive allure une colonne de camions. Elle ne peut éviter un petit muret et les deux occupants plongent dans la mare de purin présente devant une ferme. Les deux soldats reçoivent les premiers soins dans une maison proche puis sont évacués vers un hôpital de campagne. Les habitants du quartier craignaient des représailles mais il n’en fut rien KR.

Pierre Barnich de Turpange note dans son journal : « les cloches de l’église n’ont plus sonné jusqu’au 17 juin au matin » a.

A Bébange, ce n’est que le 11 mai que passeront les premiers soldats allemands, suivis le lendemain par de l’infanterie qui se dirige vers Longwy e. Une colonne de transport traverse Hondelange le même jour.

b. Familles juives de Messancy

Plusieurs familles juives sont établies à Messancy depuis la fin du 19ème siècle. La communauté locale forte d’une vingtaine de personnes est particulièrement bien intégrée au village. Dès le 10 mai, devant la menace nazie, toutes prennent le chemin de l’exode. Par arrêté du 28 octobre 1940, l’occupant demande auprès des autorités communales l’établissement d’une liste des habitants de confession juive. Celle-ci comporte les noms suivants  :

-       Picard Fernand Salomon, né à Messancy le 23/6/1913, marchand de bestiaux

-       Saccour Elisabeth, née à Halanzy le 6/8/1915

-       Picard Daniel, né à Etterbeek le 14/8/1937, marchand de bestiaux

-       Picard Hubert Delphin, né à Luxembourg le 29/5/1934, marchand de bestiaux

-       Picard Jacqueline Danielle, née à Messancy le 20/2/1942

-       Caën Jean René, né à Arlon le 28/8/1914, « ouvrier d’usine français »

Mais avant guerre, le Registre de population (1930-1940) recense les familles de Lucien Jacob et Hermine Israël comprenant Ginette Jacob et Isaac Jacob, habitant rue d’Arlon ; Edgard Caën, machiniste d’usine et son épouse Marie Joséphine Lejeune, avec Hubert Caën et Robert Caën ; Marcel Jacob, marchand de bestiaux et son épouse Thérèse Meyer, leurs enfants Renée et Andrée ; Gaston Daniel Jacob, marchand de bestiaux, et son épouse Marthe Mayer, Roger et Mady Mélanie Jacob ; Albert Picard, boucher, Estelle et Robert Picard , toutes ces familles domiciliées dans la Grand-rue.

Marie Gérard, femme d’ouvrage chez Gaston Jacob depuis 10 ans, garde la maison et les meubles après le départ de la famille D6.

Lucien Jacob et Clémentine Lévy, tous deux natifs de Messancy, sont arrêtés en France et ,via le camp de Drancy, déportés à Auschwitz en 1943 k.

Roger Jacob, enrôlé volontaire dans les Chasseurs Ardennais à 18 ans, participe à la campagne des 18 jours. Il arrive à rejoindre sa famille en France et s’engage dans un mouvement de résistance. Passé en Angleterre, il est incorporé au « Groupement belge » et participe au débarquement de Normandie [2].

c. L’exode du 11 mai

Des batteries d’artillerie de l’armée française en position près de Longwy (les canons de la Ligne Maginot ne peuvent pas tirer aussi loin) tentent d’atteindre les forces d’invasion à Pétange et Athus principalement. D’autres positions sont également attaquées. Ainsi, un obus tombe dans le parc du notaire de Gauquier (rue d’Aubange), un dans la rue du Castel, un rue d’Arlon devant le Castel. Il atteint un cavalier allemand qui est blessé au mollet tandis que sa monture est tuée. Ce soldat sera déposé dans la maison de Henri Hennico HP. Une batterie allemande en position près du pépiniériste Schmit, rue Deboulle, est touchée de plein fouet. La ferme de Pierre Hennico, rue des Déportés, est atteinte également.

De nombreuses familles décident de s’éloigner momentanément de la ligne de front. Les uns optent pour la France toute proche, les autres prennent la direction d’Arlon. La famille de Roger Kirsch KR en compagnie des familles Schrobiltgen et Charles Neu part à pied vers Turpange, Hondelange, Autelbas. Dans la descente du Wolberg, ils sont arrêtés par un énorme cratère provenant de l’explosion d’une mine. Non sans difficulté, ils parviennent à contourner l’obstacle et à gagner Clairefontaine. Tout ce petit monde trouve refuge au domaine des Pères Jésuites, la concierge les ayant autorisés à loger dans la grande salle. Le lendemain, on décide de retourner à la maison. A Hondelange, les gens leur disent que l’artillerie française bombarde sans arrêt Messancy. Arrivés au passage à niveau après Turpange, ils se rendent compte en effet que des batteries allemandes tirent en direction de la France et que la réponse ne se fait pas attendre. De toute façon, une sentinelle allemande interdit le passage et il faut rebrousser chemin pour regagner Clairefontaine, toujours à pied. Cette fois, ce sont les Pères du Sacré Cœur qui offrent un gîte dans leur nouvelle ferme. Le 13 mai, le père de Roger Kirsch peut emprunter un vélo et revient finalement à Messancy. Il constate que la maison familiale rue de la Gare a été atteinte par un obus qui a endommagé le pignon et la toiture. Plusieurs jours de suite, il reviendra ainsi pour effectuer les réparations les plus urgentes. Comme souvent dans ces périodes chaotiques, des personnes « indélicates » ont visité la maison en l’absence des propriétaires pour y dérober vaisselle, livres, jouets, habits et même un lit, retrouvé non loin quelques jours plus tard. La maison est finalement réquisitionnée par l’armée allemande pour y établir un dépôt de produits pharmaceutiques. La famille Kirsch est ainsi contrainte de rester environ deux mois à Clairefontaine avant de pouvoir réintégrer son domicile où tout est à remettre en état ! KR

D’autres familles sont parties dès le 11 vers Arlon, souvent avec charrettes ou brouettes portant les biens qu’elles estimaient être les plus précieux ou les plus utiles mais, se heurtant aux envahisseurs, elles ont assez rapidement fait demi-tour.

Les troupes allemandes ont elles-mêmes prévu une évacuation de la population civile des communes proches de la frontière française au cours des premiers jours de combats. Leurs camions ont emmené certaines familles à Stockem ou dans la région d’Attert. Le bétail  appartenant aux cultivateurs forcés de partir a été rassemblé à Hondelange dans la pâture Wouters. Le registre des délibérations du 14 septembre rapporte : « Le collège s’est vu forcé sur l’ordre de l’autorité occupante de payer un salaire aux gardiens qui ont gardé le bétail des communes évacuées ». L’ordre d’évacuation des communes de Hondelange et Messancy, d’abord prévu, est annulé en raison de la fin des combats avec l’armée française.

Les réfugiés qui ont choisi de partir vers la France encombrent les routes autour de Longwy, parfois mêlés aux troupes allemandes venant du Grand Duché. Les soldats français, déjà en sous-effectif et mal organisés ne peuvent intervenir à leur guise de crainte de causer de nombreuses pertes parmi les civils. De leur position avancée sur les hauteurs de Piémont, les soldats de la 3ème Division Légère de Cavalerie voient passer de façon ininterrompue les 11 et 12 mai les divisions d’infanterie allemandes derrière les panzers, passant de Messancy à Aix-sur-Cloie. Des réfugiés venant de Messancy racontent à Longwy que « les châteaux du village sont pleins d’Allemands, assez jeunes, mal habillés, mal équipés mais moins mauvais que ceux de 1914 » j.

La majorité des habitants de Messancy choisissent de rester sur place. Ils s’abritent dans les caves. Le bourgmestre de Gauquier et sa famille sont hébergés dans la cave de la maison Henri Hennico, rue d’Arlon. Celles du café de la Gaîté, fort vastes, sont pleines de monde HP.

Les hondelangeois ne voient le passage des premières troupes que le 11. D’abord des fantassins puis des cavaliers. Ensuite, du samedi matin au lundi matin, c’est un passage ininterrompu d’hommes et de charroi. Les troupes qui avaient attaqué Longwy dès le 10 mai viennent se reposer à Hondelange les 13 et 14 HG.

A Bébange, c’est le 12 mai, jour de Pentecôte, que le village est pris sous un tir d’artillerie. Une rangée de canons allemands est disposée le long du bois du Geisert à l’entrée de Wolkrange. Ils ne se manifestent pas mais les artilleurs français qui cherchaient à les atteindre tirent trop court et déversent leurs obus sur le village. Des habitants se cachent plusieurs jours dans les bois, d’autres dans leurs caves, certains dans celles du presbytère. Lors d’une accalmie, on prend le risque de sortir pour traire les vaches. Les dégâts furent importants, notamment aux toitures, mais par bonheur personne ne fut blessé WJ. Le 17 mai, l’abbé Alzinger est arrêté au presbytère sous prétexte qu’il cache des soldats français. Menacé d’être fusillé, un pistolet ayant été découvert dans sa chambre, il est finalement relâché e.

Sur les hauteurs de Sélange, au niveau de la ferme des Quatre-Vents, les artilleurs allemands ont mis en batterie quatre gros canons qui tirent en direction de la France. Le 14 mai, ils inscrivent sur un camion « Longwy tombé » GF.

Dès le début du mois de juillet, les habitants qui étaient partis sur les routes de l’exode commencent à revenir.

d. Présence des troupes allemandes.

Les troupes occupantes, contrairement à ce qui s’était passé en 1914, ne montrent pas d’agressivité vis-à-vis de la population civile, se comportent correctement selon l’avis des témoins de l’époque et n’hésitent pas à rendre service. La présence massive de soldats dure essentiellement jusqu’en juin, quelques détachements étant cependant présents encore au mois d’août. Bien sûr, il faut se plier aux réquisitions : autos, vélos, outils. Quelques vols et pillages sont déclarés comme dommages de guerre : vol de montres, d’une collection de timbres, de linge, de paille et de foin, pillage de la forge de Louis Arend à Hondelange entre le 10 et le 20 mai. Sont-ils le fait de militaires occupants ou, plus vraisemblablement, de civils ayant profité de l’évacuation forcée des maisons proches des mines ou de l’exode des propriétaires ? Certains soldats paient avec de faux billets D3.

Le café de la Gare et son jeu de quilles, à Messancy, servent de logement à la troupe. Une cuisine militaire est installée à côté du café et des gens du village viennent y chercher de la soupe. Les soldats distribuent aussi diverses victuailles, comme des jambons, pris dans des maisons abandonnées MA. Une cuisine ambulante se tient également au coin de la Grand-rue et de la rue du Centre KM. Le troupeau de vaches appartenant à Gaston Jacob, parti en exode, est à l’abandon dans une pâture à côté du terrain de football. Les bêtes sont tuées et fumées pour être distribuées à la population RR.

A Bébange, des soldats donnent un coup de main aux travaux de la ferme WJ.

La troupe stationnée à Hondelange compte de nombreux chevaux. Des écuries sont réquisitionnées, le foin et la paille sont emportés. On dénombre 45 chevaux dans le verger de Achille Sibille D3. La maison de Camille Haas abrite la Kommandantur locale GC. Le village est un centre de ravitaillement. La gare d’Autelbas accueille en permanence 25 wagons citernes et les véhicules militaires passent jour et nuit par Hondelange pour aller s’approvisionner en essence. L’artillerie française tente par deux fois de toucher ce dépôt mais sans succès. Les victuailles sont stockées dans différents bâtiments et, à la faveur de la nuit, les autres cantonnements viennent chercher leurs provisions avec des chariots tirés par des chevaux. Des prisonniers français avec leur propre attelage, sous la garde de soldats allemands, font aussi partie de ces convois HG. Vers le 15 mai, des soldats du génie stationnés à Arlon sont venus remblayer le cratère creusé par l’explosion de la mine. Ils ignorent qu’une partie de la charge de dynamite est intacte et, au cours des travaux, survient une nouvelle déflagration qui tue et blesse plusieurs d’entre eux HG.

A Sélange, une Kreiskommandantur est installée en face de l’église. Les autorités allemandes demandent au garde-champêtre Jean Decker de passer dans les rues, sa cloche à la main, pour avertir les habitants que s’ils se comportent correctement avec les soldats, ceux-ci se comporteront de même avec eux. De fait, l’armée occupante ne fait preuve d’aucune agressivité. Une cuisine ambulante est amenée au centre du village et les civils qui le souhaitent peuvent y obtenir de la nourriture GF.

Les officiers étaient généralement logés chez l’habitant. Le garde champêtre devait inscrire à la craie sur la façade le nombre d’hommes que la maison pouvait héberger. La famille de Henri Hennico de Messancy « accueille » un Zahlmeister et deux soldats (Herman Frantz et Frantz Decker), d’origine mosellane et peu partisans de Hitler. Confiants cependant envers leur armée, ils ont promis à leurs hôtes d’envoyer une carte d’Angleterre et sont persuadés d’être rentrés dans leurs foyers pour Noël. Tous les soldats portent une boite cylindrique contenant leur masque à gaz. Ils ne s’en séparent même pas la nuit pour dormir HP. La Kommandantur de Messancy est installée rue Basse (rue des Chasseurs Ardennais) dans la maison louér par Joseph Sprumont BL.

Le bilinguisme de la grande majorité de la population locale fut certainement un atout pour dialoguer en des termes précis avec l’occupant. Tous les témoins reconnaissent la correction et la serviabilité des premières unités d’occupation. Cependant certaines situations sont parfois délicates. Ainsi un Oberlieutenant demande un jour à la maman de Raymond Royer : « Que signifie ce mot boche que l’on entend régulièrement ? » RR.

Dès son entrée sur le territoire belge, l’armée allemande s’organise. De nombreuses maisons et bâtiments sont réquisitionnés dans chaque village : à Messancy, la maison Kirsch, rue de la Gare, devient un dépôt de médicaments ; à Hondelange des troupes sont logées dans le local de l’Harmonie du 11 mai au 15 juin D3, d’autres dans la maison de Theisen Marie veuve Ferber D3 et dans celle de Nicolas Ferber jusqu’au 3 juin ; à Turpange, la cave de la maison Maus, près du cimetière, est aménagée en cachot pour les soldats ayant commis des délits MF, la maison de Nicolas Goedert sert de Quartier Général pour le commandant Mayer et son ordonnance. Un soir, ce dernier revint seul en disant « Mayer ist gefallen » (Mayer est tombé) MF ; à Differt l’institut des Pères est transformé en « Kriegslazarett » (hôpital de campagne) jusqu’en juillet f. Quatre blessés y sont décédés et ont été enterrés dans la propriété. Ce n’est qu’après 1950 que les corps ont été transférés vers un cimetière militaire.

Un poste de régulation logistique est installé dans le café de la Gaîté à Messancy. Les véhicules transitant par le village doivent s’y signaler. Un jour plusieurs camions chargés de cercueils s’y arrêtent. Ils reprennent la route de Lamadeleine où se déroulaient des combats violents, comme le confient des soldats logés en face dans la maison Kariger KM. Certains témoins se souviennent avoir vu passer en gare des wagons équipés d’énormes canons HP.

Des écriteaux avaient été apposés sur certaines maisons : « Eintritt verboten – hier wohnen Italiänen » (Entrée interdite, ici habitent des Italiens, l’Italie était alors alliée de l’Allemagne), « Wer plündert wird erschossen » (celui qui pille sera fusillé), « Juden » (Juifs) HP. Un autre placard disait « Toutes les armes et munitions doivent être remises dans les 24 heures. Ceux qui ne s’exécuteront pas sont passibles de mort ou de travaux forcés. Ceux qui s’attaquent à l’armée allemande seront punis de mort » KR.

Les autorités allemandes exigent des colombophiles (très nombreux à l’époque) la remise de tous les pigeons pour éviter qu’ils ne servent à transporter des messages HR.

Les soldats se ravitaillent volontiers dans les villages en denrées diverses comme les œufs ou le chocolat. Ils connaissent parfaitement les prix ainsi que le cours du change et payent en marks.

En prévision de l’invasion, tous les panneaux indicateurs avaient été enlevés au bord des routes. Aussi les Allemands installèrent-ils leur propre signalisation en bois ; un grand nombre de ces panneaux étaient accolés au pignon du presbytère de Messancy HP.

Les officiers de Messancy se sont installés dans les locaux du Castel, bâtiment vide à cette époque à l’exception de la famille  Schrobiltgen (Grüber) qui faisait office de concierges ainsi que dans la villa Cailler toute proche. Le chirurgien du Quartier Général a aménagé une pièce de cette villa avec des armoires vitrées contenant ses instruments. Il lui arrive de prodiguer des soins à des civils HP. Ces officiers partent après la percée de Sedan qui libère la route vers Dunkerque.

Une musique militaire est cantonnée dans la salle Concordia à Messancy. Composée d’une vingtaine d’hommes, fifres, tambours et clairons, elle répète dans une sapinière dominant la rue du Dolberg. Chaque soir, le clairon sonne l’extinction des feux RR.

Des pelotons passent en chantant pour se rendre au Jungenbusch s’y entraîner et creuser des tranchées. Une compagnie de transport établit son campement au terrain de football et part de temps-à-autre dans les bois, la pelle au dos, en chantant « In der Heimat …drei, vier.. » HP. Parfois des soldats qui ont été punis doivent faire le tour du terrain de football en « Parade Marsch », au pas de l’oie.  A droite en montant de Turpange à la Klaus, quatre chambres ou petits tunnels avaient été creusés à flanc de colline. Nul n’a pu savoir ce qui y était entreposé MF. A la côte 411, au-dessus de Turpange, l’armée allemande a construit un poste d’observation. Il sera récupéré par les américains en 1944 pour y établir un relais de communication SE.

Le 1er juin, un avion largue une bombe qui explose près de Hondelange au lieu-dit « Bei Lohr » D3.

e. Nos héros morts au champ d’honneur

Les jeunes hommes qui étaient mobilisables ont rejoint leurs unités dès le 10 mai et ont fait leur devoir avec courage et abnégation. Beaucoup furent capturés par l’ennemi, certains y laissèrent leur vie.

Bosseler Joseph Edouard (Messancy)

Né à Messancy le 10/6/1907. Soldat à la 4ème Cie du 1er Régiment des Chasseurs Ardennais, il tombe au combat à Martelange le 10 mai 1940. Il était footballeur au club de Messancy, c’est ainsi que le stade du village porta son nom après guerre.

Degiampietro Georges (Messancy)

Brigadier au 20ème Régiment d’Artillerie. Tombé à Rosmeer près du canal Albert le 12 mai 1940 D13.

de Mathelin Charles (Carl) (Messancy)

Né à Messancy en 1887. Il fut aviateur durant la guerre 1914-18 puis participa à celle de 40-45 dans la marine. Officier sur le S/S Clarisse Hadeliffe torpillé par les Allemands, il est « présumé décédé en mer le 9 mars 1943 » (Registre de population de Messancy).

Friob Nicolas ( Wolkrange)

Né en 1910. Soldat au 4ème Régiment des Chasseurs Ardennais, il est blessé à Gottem lors de la bataille de la Lys le 26 mai 1940 et décède le surlendemain.

Heymans René (Messancy)

Soldat au 4ème régiment des Chasseurs Ardennais. Il décède en captivité le 23 juin 1942.

Lichtfus Lucien (Turpange)

Chasseur Ardennais, il participe avec la 1ère Division à la bataille de la Dendre. Tombé à Vinkt le 27 mai 1940 à l’âge de 23 ans.

Malhage Robert (Messancy)

Né à Messancy en 1910, il défend la ligne KW (Anvers – Namur) avec le 2ème Bataillon motocycliste de la 1ère Division des Chasseurs Ardennais. Tombé à Perwez le 12 mai 1940 au cours d’un bombardement.

Munster Nicolas Léopold (Turpange)

Il est mort au combat le 24 mai 1940 à l’âge de 23 ans à Cauroir (Département du Nord) ; il est inhumé à Turpange a.

Prignon Lucien (Messancy)

Né en 1916 à Villers-la-Loue, soldat au 4ème Régiment des Chasseurs Ardennais, blessé à De Knock le 26 mai 1940, il est décédé le 29 à Zarren (Dixmude)D13.

Schockmel Camille (Messancy)

Soldat au 1er Régiment des Chasseurs Ardennais. Invalide de guerre, il est décédé le 8 mai 1942.

Schroeder Charles (Messancy)

Chasseur ardennais prisonnier au Stalag XXB. Décédé des suites de captivité le 3 mars 1944.

Wagner Emile (Wolkrange)

Né en 1903, maréchal des logis de 1ère classe, il est gravement blessé en service commandé à Petergensfeld (Raeren) le 9 avril 1945. Il décède de ses blessures à l’hôpital d’Aix la Chapelle D13.

3. Vie au quotidien de juin 1940 à septembre 1944

a. Alimentation et agriculture

Se nourrir reste durant tout le conflit une préoccupation majeure. Le caractère rural de la région permet heureusement de ne jamais manquer de l’essentiel. L’occupant surveille la production des fermes et procède à des réquisitions mais la débrouillardise de chacun permet souvent de s’en sortir.

La Kommandantur d’Arlon posséde un état des lieux des différents villages basé sur une enquête auprès des communes réalisée en juillet 1940 KA. Nous trouvons pour Hondelange : les épiceries Kraus – Tockert, Eischen (Economie Populaire), Lordong – Steyer, Schouweiler – Lafontaine (également boulangerie) et Fries – Nilles. La turbine locale pour l’écrémage traite environ 1.000 litres de lait par jour pour la laiterie Socolait de Virton. A Messancy, 800 habitants sur 2400 sont considérés comme cultivateurs. On dénombre 17 épiceries au village, 1 à Differt et 4 à Turpange. Deux moulins sont en activité : à Longeau celui de Jean Lippert et à Differt celui de Nicolas Hesse. Les bouchers sont Joseph Wagner, Nicolas Scharff, René Scharff et Jean Tockert. La turbine à écrémage se trouve chez Nicolas Thill ; celle de Turpange (Juckmes – Wagner) est à l’arrêt. Sélange ne compte qu’une boulangerie ( Vergerio – Lichtfus) et un boucher (Jean Gehlen). L’écrémeuse traite journellement 300 litres de lait pour la société Saint Joseph. Enfin à Wolkrange existent quatre épiceries : Diderich – Eppe qui vend aussi de la farine, Eischen  François, Rodesch Théophile et Schmit Pierre Alfred de Buvange qui vend également de la bonneterie.

Un recensement agricole de 1941 nous donne la composition (officiellement déclarée) du cheptel à Hondelange : 233 vaches laitières, 8 taureaux, 161 bovidés de moins de 2 ans, 133 porcs, 123 porcelets, 83 chevaux de plus d’un an D2. Les superficies de terres en culture sont de 825 ha pour Messancy, 420 ha pour Habergy, 275 ha pour Hondelange, 230 ha pour Sélange et 430 ha pour Wolkrange.

Dès l’occupation de 1940, divers arrêtés sont pris à Bruxelles pour assurer le ravitaillement. Le but était de faire face à la pénurie de denrées alimentaires dont souffre la population, essentiellement dans les villes. La tâche des gouverneurs de province, des commissaires d’arrondissement et des bourgmestres est accrue, leurs responsabilités également. Les bourgmestres doivent veiller à l’exécution des arrêtés concernant le rationnement et le ravitaillement : fourniture du bétail, des produits laitiers, des céréales et autres produits agricoles, les recensements divers, l’évaluation des récoltes. Certains bourgmestres résistent et traînent dans l’exécution des missions. Le Ministère de l’Intérieur n’hésite pas à révoquer les récalcitrants et à les remplacer immédiatement. C’est le cas à Wolkrange où Nicolas Wiltgen est démis de ses fonctions en 1941.

Les contingents de produits à réquisitionner sont fixés à Bruxelles. La responsabilité des bourgmestres est aussi engagée quand les livraisons ne s’effectuent pas dans les délais impartis. Ainsi le 18 octobre 1941, Octave Reichling, bourgmestre de Hondelange reçoit un rappel stipulant que sa commune accuse un retard de 6.076 kilos dans ses livraisons de bétail et que ce retard doit être comblé dans la quinzaine. Cette situation est jugée inadmissible en haut-lieu et les responsables sont passibles de sanctions graves.

Les rendements des produits agricoles sont généralement surestimés. En octobre 1942, le Commissariat d’Arrondissement d’Arlon, sur ordre de Bruxelles, doit fixer le quota en pommes de terre des petits producteurs à 16.400 kilos l’hectare au lieu des 11.000 admis l’année précédente. Il était de notoriété publique que la production n’avait jamais atteint pareil rendement dans la région. Devant cette situation, tous les bourgmestres du canton se réunissent à Messancy le 25 octobre 1942, sous la présidence de Raymond de Gauquier pour adopter une attitude commune.

Les cultivateurs, devant ces réquisitions abusives et ces estimations exagérées, font preuve d’imagination. Lors des recensements, souvent avec la complicité des autorités locales, ils n’hésitent pas à déclarer des superficies cultivées inférieures aux superficies réelles. La quantité de lait  provenant des différentes traites est pratiquement incontrôlable. Une partie peut donc être prélevée pour préparer du beurre destiné à la consommation familiale ou à la vente au marché noir, chaque ferme possédant sa propre écrémeuse. Des porcs et parfois des veaux sont élevés clandestinement derrière des fagots ou des bottes de paille, dans un hangar ou même dans la cave. La simulation de vol est une astuce pour soustraire des biens ou du bétail à la réquisition. Mais il arrive aussi que des vols réels soient commis. Ainsi des timbres pour produits comestibles sont subtilisés à la maison communale de Hondelange le 26 janvier 1944 D2. Mais on voit aussi des gens se faisant passer pour des résistants qui volent des cochons pour les revendre au marché noir. Les hommes du village, comme ceux de Bébange, organisent alors des rondes munis d’un laisser-passer délivré par les Allemands WJ.

Seuls les moutons ne sont pas sujets à un contrôle particulier ; certains en font donc l’élevage durant l’occupation HG.

Les cultivateurs sont dispensés du travail obligatoire en Allemagne. Ils sont munis d’un document délivré par la Werbestelle d’Arlon qui les oblige à se présenter tous les trois mois au bureau de la  Feldkommandantur pour y faire apposer un cachet WJ.

Des agents spéciaux furent nommés pour effectuer des contrôles dans les fermes. Ils sont parfois originaires de la région. Bien que leur tâche soit délicate, ils jouent généralement le jeu en faveur du cultivateur. D’autres dénoncent froidement les délits, ce qui amena des rancœurs tenaces après guerre. Evidemment, l’apparition d’un contrôleur dans le village est aussitôt répercutée et toutes les formes ingénieuses de camouflage sont immédiatement mises en place. On emmène le porc « fraudé » à l’étage ou sous l’escalier menant à la cave en espérant qu’il ne se manifestera pas !

Le 2 juillet 1940, il est porté à la connaissance des habitants que tout qui possède une chèvre, plus de 20 poules ou cultive au moins 1 are de pommes de terre est tenu d’en faire la déclaration à la commune D2.  A Messancy, c’est le garde champêtre Damiany qui vient compter et peser les porcs. Avec deux verres de « goutte » on parvient toujours à faire baisser le poids du cochon ! KM.

Ce sont les habitants d’Athus et d’Aubange principalement qui viennent se ravitailler en lard, œufs, beurre dans les fermes. Le troc est souvent pratiqué : telle quantité de lard contre un pantalon par exemple WJ. La farine est moulue dans les moulins locaux ( Buvange, Longeau, Turpange) et les agriculteurs ont du pain en suffisance pendant toutes les hostilités. Un jour, un petit groupe de jeunes gens se rend à Piémont chercher un bœuf vivant et le ramène à Messancy par les petits chemins. Cette bête est tuée et découpée dans la ferme Schmit par Emile Thill, charron de son état, mais qui avait acquis une certaine expérience en aidant le boucher Tockert SA. Chez Hoeltgen, comme dans beaucoup de familles, on élève des poules, des lapins et une chèvre qui donne du lait dont on fait du fromage. Des pommes de terre sont cultivées dans chaque jardin HR. Les fumeurs invétérés arrivent à faire pousser quelques plants de tabac au milieu du potager, cachés par les légumes à haute tige RA. Le café est remplacé par de l’orge torréfiée. Les habitants de Sélange ont la chance de pouvoir acheter des sacs de farine de 50 kg chez Kremer à Clémency GF.

Tous n’ont cependant pas ces facilités. A la fin des moissons, certains se rendent dans les éteules pour glaner les épis restés sur le sol ou dans les champs de pommes de terre pour récupérer quelques tubercules restés en terre après l’arrachage KR. Ceux qui travaillent au Grand-Duché rapportent parfois de la nourriture. Dès la fin du mois d’octobre 1940 on organise l’aide aux plus démunis. Le « Secours d’Hiver » distribue vivres et vêtements ainsi que de l’huile de foie de morue pour les enfants des écoles.

Les administrations communales fournissent selon divers critères des cartes de ravitaillement sur lesquelles il faut appliquer des timbres : lait, pain, café, charbon etc …

Les obligations imposées aux communes pour le service du ravitaillement contraignent celles-ci à désigner des employés pour ces tâches puis, devant leur ampleur, à en engager de nouveaux. La commune de Messancy nomme à titre temporaire Jules Jungers le 28/1/1942 D8. Les ressources des Commissions d’Assistance Publique sont rapidement épuisées. Hondelange doit contracter un emprunt de 15.000 f le 7 avril 1941 D4.

Les cultivateurs livrent leur production de pommes de terre à Athus, Aubange ou directement dans des wagons stationnés en gare de Messancy WJ. A Hondelange, Emile Steyer dispose d’un « Schein » (laisser-passer) qui consiste en un rectangle de papier bleu clair pour ses livraisons qu’il effectue avec sa Chevrolet. Ce « Schein », émis par la Centrale des pommes de terre à Bruxelles, est signé par le procureur du Roi A. Lucion. Il est accordé à ceux qui transportent des denrées pour l’armée allemande D2.

Dès le 20 mai 1940, un arrêté paru au Moniteur du 17 juin confie au Service de Réquisition militaire la mission d’acheter les laines du pays. Les administrations communales doivent renseigner les bergers, bergeries et le nombre de moutons sur leur territoire D2. En 1941, la paille est réquisitionnée et doit être regroupée chez Germain Dury, négociant-chargeur à Florenville.

Les occupants imposeront même le recensement des marronniers d’Inde et des chênes dans le cadre du contrôle et de la récupération des matières premières pouvant servir à l’alimentation du cheptel. Hondelange déclare 100 chênes mais aucun marronnier D4.

Des personnes sans scrupules, malheureusement, profitent toujours de ces situations particulières. En sa séance du 11 août 1940, le Conseil Communal de Messancy déclare : « Attendu qu’il importe de prendre de toute urgence toutes les mesures nécessaires pour mettre fin aux vols qui se commettent tant de jour que de nuit sur toutes les parties du territoire, vols commis aussi bien par des habitants de la commune que des étrangers et de mettre fin également aux déprédations de toutes sortes occasionnées aux récoltes sur pied, déprédations faites intentionnellement et méchamment en vue de leur destruction partielle ou totale, …décide qu’il y a lieu de renforcer de suite la surveillance des récoltes… et de procéder à la nomination du personnel nécessaire ». A nouveau le 26 juin 1943, le collège sollicitera l’autorisation d’envoyer à titre temporaire un ou plusieurs surveillants des récoltes D8. A Hondelange, le garde champêtre Decoox doit s’occuper du vol de pommes de terre dans les champs en 1944 D4.

b. L’enseignement et les écoles

Malgré les bouleversements dus au régime d’occupation, à la présence de troupes, à l’absence de certains instituteurs, aux difficultés diverses, les communes tentent de donner une scolarité normale aux enfants pendant cette période troublée.

Après la Pentecôte 1940, les cours des écoles communales sont suspendus environ deux mois.

A Messancy, il existe une école privée pour filles avec une section maternelle mixte tenue par les Sœurs de la Doctrine Chrétienne (Villa Clainge) et une école communale pour garçons (rue des Déportés) dont Nicolas Hoffelt occupe les fonctions de chef d’école. L’instituteur Kergé ayant été rappelé sous les drapeaux, J.B. Hesse, chef d’école pensionné en 1938, reprend du service bénévole en tant qu’instituteur. Un autre membre du corps enseignant sera révoqué à la fin de la guerre en raison de ses sympathies pour l’occupant. La commune décide le 26 juin 1941 qu’une quatrième classe sera crée à l’école des garçons, projet concrétisé en 1946 seulement. Le 6 août, elle confirme pour six ans l’adoption de l’école privée pour filles dont le comité de patronage est composé du doyen Perrad, de M. Neu et de P. Schaeffer. (v. Chronique 2000, page 10).

L’école des Pères Maristes de Differt qui a acquis une renommée internationale est dirigée depuis 1939 par un nouveau supérieur, le Père Edouard Pisters, d’origine hollandaise. A côté du scolasticat destiné à former des prêtres s’ouvre une « école apostolique » en 6 classes. Le 10 mai 1940, l’école est évacuée à l’exception du supérieur, de deux Pères et d’un Frère. Elle sera réoccupée le 10 août et les cours se poursuivront durant la guerre avec des effectifs fluctuants f.

Les difficultés matérielles obligent parfois un changement dans le programme des cours. En janvier 1945, le conseil communal constate que «  par suite de l’impossibilité où se trouve la commune de se procurer les matières nécessaires pour le chauffage de l’école ; de ce fait, par suite du froid intense qui règne actuellement, les cours de ces écoles devront forcément être suspendus pendant une certaine période ». Le 28 mars, le conseil établit de nouvelles dates de vacances car « les cours des écoles de Turpange et Messancy ont été suspendus une grande partie de l’année par suite de l’occupation des locaux scolaires par les soldats de l’armée américaine »  D7.

A Sélange, le conseil communal du 20 avril 1941 nomme Julien Hirtz, instituteur diplômé, combattant de 1940 et ancien prisonnier de guerre pour remplacer monsieur Bartholomé toujours en captivité en Allemagne D10.

Une dépêche de l’inspection principale de l’enseignement primaire parue en janvier 1941 demande à chaque commune d’organiser l’enseignement en langue allemande. Bien que cette langue fut enseignée avant- guerre et que, par le catéchisme et les sermons, la population fut de fait bilingue, les autorités communales vont tenter de résister à l’imposition de l’allemand comme seule langue véhiculaire dans les écoles. Il est intéressant de reproduire les motivations avancées dans chaque commune.

Hondelange réagit en sa séance du 17 février 1941 : « Vu la dépêche de l’inspecteur principal ; vu que notre commune est classée d’après le recensement de 1930 parmi les communes bilingues ; vu que notre commune se trouve située très proche de la frontière linguistique wallonne et de la frontière française et que de ce fait la connaissance approfondie de la langue française est indispensable à toutes les classes de la société et principalement à la classe ouvrière qui généralement cherche son gagne-pain en France en qualité d’ouvrier frontalier de l’industrie métallurgique, le Conseil à l’unanimité de ses membres présents décide 1) La langue allemande sera la langue véhiculaire dans la ou les classes du degré inférieur de nos écoles primaires   2)  la langue française et allemande, chacune à part égale, dans la ou les classes du degré moyen  3) la langue française et allemande avec prédominance du français dans les classes du degré supérieur » D4.

Messancy se prononce le 29 janvier 1941 : « Considérant que d’après la liste publiée au Moniteur belge du 22/4/1934, la commune de Messancy est classée parmi les communes bilingues ; considérant que même pour la majorité des personnes d’expression allemande, la connaissance du français s’affirme comme une nécessité dans notre contrée ….décide de prier l’autorité supérieure … de donner satisfaction aux deux groupes qui constituent la population de la commune en autorisant de faire dans l’horaire une part égale aux deux langues pendant toute la durée de la scolarité » D8.

En sa séance du 24 février 1941, le conseil de Sélange décrète : « Attendu que sur 622 habitants, 50 sont d’expression française et 572 bilingues français-allemand, considérant que par suite de la proximité de la frontière linguistique ainsi que dans tous les déplacements il y a une nécessité absolue à ce que les habitants aient une connaissance suffisante du français, décide : dans les écoles communales il sera fait une part égale aux langues française et allemande pendant toute la durée de la scolarité » D10.

Mais les doléances des communes ne sont pas prises en compte et, en novembre, elles actent les décisions imposées. A Messancy : « Suite à l’ordre donné par l’autorité supérieure, décide suivant les termes mêmes dudit arrêté qu’à partir du 1er décembre 1941 la langue véhiculaire sera l’allemand et cela dans toutes les écoles de la commune et qu’il y aura pour les première et deuxième années d’étude six heures de français par semaine et à partir de la troisième année huit à dix heures de cours en français ». A Habergy : « Vu la circulaire en date du 18 novembre 1941 de l’inspection scolaire, prend acte du régime linguistique dicté aux écoles de la commune de Habergy et invite le personnel enseignant d’appliquer tel qu’il est établi dans l’arrêté précédent » D5. L’instituteur y est Jean Feltes.

Ces directives ne seront évidemment pas appliquées avec rigueur.

c. La vie paroissiale

La vie paroissiale suit un cours normal. Non seulement les messes mais aussi les vêpres et saluts du dimanche sont suivis avec assiduité.

Pendant la période concernée, nos pasteurs sont :

- le doyen Eugène Perrad, curé de Messancy depuis 1925 jusqu’à sa retraite en 1945 ; le vicaire Jean Pierre Maire, originaire de Bébange, de 1927 à 1942 (nomination comme curé d’Aix-sur-Cloie), le vicaire Raymond Hesse, d’ août 1939 à décembre 1944 (nomination comme vicaire à Martelange).

- L’abbé Adolphe Alzinger, curé de Bébange de 1930 à 1945 mais remplacé pendant sa déportation de 1943 à 1945 par l’abbé Christian Kamphuis.

-  A Habergy, l’abbé Théophile Mathieu de 1924 à 1957.

- L’abbé Jean Grethen, curé de Hondelange de août 1921 à septembre 1946.

- A Sélange, l’abbé Arthur Thommes.

- L’abbé Alfred Weber, curé de Turpange de 1915 à 1946.

- A Wolkrange, l’abbé Charles Gangler de 1927 à 1954.

A Messancy, le vicaire célèbre sa messe à 6 h 15, le doyen à 6 h 45. Le sacristain Frédéric Schmit y officie comme chantre également SA.

A Bébange, l’abbé Alzinger dit deux messes le dimanche : à 7 h et à 10 h ainsi que les vêpres et le salut. Les offices sont suivis par une grande partie de la population WJ.

La langue utilisée depuis toujours dans nos villages pour les sermons, le catéchisme, la récitation du chapelet et les offices est l’allemand. Elle sera remplacée par le français dès la fin de la guerre. Les prêtres étaient donc de parfaits bilingues a.

Pendant le séjour des troupes allemandes en mai et juin 1940 à Messancy, l’aumônier militaire dit chaque matin sa messe à l’autel latéral droit (Saint- Jacques) HP. Les registres paroissiaux de Messancy nous font découvrir deux mariages en 1940, huit en 1941, sept en 1942, dix en 1943, huit en 1944 et trois en 1945.

Parmi les décès, relevons celui de Anne Marie Perrad, sœur du doyen, le 24 mars 1943 « résidant dans la maison du curé ».  Nous ne retrouvons dans ce registre aucune mention des décès des soldats allemands et français tués sur le sol de la commune en mai 1940.

Il y a parfois des enterrements à sept prêtres.

Le doyen Perrad est un homme autoritaire et n’hésite pas à tancer ses paroissiens. La kermesse, interdite de 1940 à 1942, est à nouveau autorisée en juillet 1943. C’est l’occasion de nombreux débordements de la part d’une population privée de délassements. Le dimanche suivant, le doyen, monté en chaire, réprimande vertement ses ouailles pour leurs excès. Il commence son sermon en disant : « Messancy peut mettre une plume à son chapeau …» RV.

Les communions sont célébrées à Bébange et Turpange le jour de l’Ascension 1940. Celles de Messancy, prévues le 12 mai, sont post-posées en raison des événements.

Les confirmations ont lieu le 26 septembre 1941. C’est Mgr Bauwens, Père abbé de l’abbaye de Leffe, délégué par l’évêque Mgr Charue qui donne le sacrement aux enfants nés en 1927, 1928 et 1929. Les jeunes filles ont pour marraine mademoiselle Maria Biver et le parrain des garçons est Elimar Wagner RR.

Jean Neu, originaire de Messancy, est ordonné prêtre à Verdun le 5 mars 1944. Il célèbre ses prémices dans son village natal le 12 mars de la même année. La population a, selon la coutume, érigé un arc de triomphe en branchages l.

Les comptes des fabriques d’église sont tenus régulièrement par les marguilliers et approuvés par l’administration communale. Chaque année, l’un des postes importants s’avère être l’achat de charbon. Les dons et legs sont peu nombreux. L’encaisse de Messancy est placée pour fructifier dans des titres des Chemins Vicinaux à 3 % D8.

En 1941, la commune acte la réception des réparations de vitraux et la pose de vitrages à l’église de Turpange D8 , travaux effectués en 1939.

d. Travail obligatoire et réfractaires.

Quatre ordonnances parues le 6 octobre 1942 dans le « Verordnungsblad » (le Moniteur allemand) organisent la déportation en Allemagne des hommes âgés de 18 à 50 ans et des femmes célibataires de 21 à 35 ans pour participer au travail obligatoire. Elles frappent les réfractaires de sanctions pénales, de privation des cartes de ravitaillement et prévoient des mesures de représaille à l’encontre des membres de la famille et des éventuels complices c. Le Grand-Duché ayant été incorporé au Reich, les Belges qui sont employés dans les industries luxembourgeoises sont considérés comme travaillant en Allemagne. Ceux qui peuvent être engagés aux chemins de fer belges échappent aussi au travail obligatoire HG. Seront considérés comme déportés, selon les termes d’un arrêté-loi belge du 24 décembre 1946, ceux qui, en exécution d’un ordre écrit et formel de l’ennemi ont été amenés à aller travailler en Allemagne ou dans un pays occupé sans avoir eu l’occasion de se soustraire à ces ordres. Seront considérés comme réfractaires : les Belges qui se sont volontairement soustraits aux obligations à caractère militaire imposées par l’ennemi, ceux qui se sont volontairement soustraits au travail obligatoire imposé par l’ennemi, ceux qui, rentrés d’Allemagne en Belgique à l’occasion de congés se sont soustraits aux obligations imposées par l’ennemi.

Notre région frontalière accueille également beaucoup de jeunes Luxembourgeois, assimilés de force à la nation allemande et fuyant leur incorporation dans la Wehrmacht.

Des habitants de nos communes sont déportés, d’autres, par contre, acceptent de travailler volontairement en Allemagne. De nombreux réfractaires sont cachés dans nos villages, généralement amenés dans des familles par les filières de la Résistance, principalement celle qu’animent le frère Colomban à l’Institut Sainte Marie d’Arlon, monsieur Mathen au Clémarais et l’abbé Alzin à la cure de Bébange d.

Un jeune Luxembourgeois, Breckler, qui devait être incorporé dans l’armée allemande se cache pendant toute la guerre à Bébange WJ. Un réfractaire polonais, Tomiak, s’y terre aussi  avant d’être hébergé à Habergy d. Deux réfractaires luxembourgeois sont cachés à Habergy de 1943 à 1945, l’un chez Norbert Kemp, l’autre dans la ferme de Josse Tibesart (Josse Fautch) RV, d.

Aloÿs Hennico, embarqué en 1943 dans un train qui devait le déporter en Allemagne, réussit à sauter du wagon lors d’un ralentissement près d’Autelbas. Il s’échappe à travers champs et se rend chez Lippert à Guerlange où il se cache jusqu’à la fin du conflit RV.

Un membre de la Gestapo d’Arlon, Richard Vieuxtemps, est particulièrement affecté à la recherche des réfractaires et sévit dans nos villages [3]. Il se rend plusieurs fois à Bébange. Paul Bergmann, époux d’une messancéenne est un autre membre de cette sinistre organisation. Il s’enfuit en Allemagne à la fin de la guerre mais est capturé près de Leipzig par des soldats belges [4] dont René Colas de Messancy qui le reconnaît HP.

e. La Gestion communale

Les nouveaux conseils sont issus des élections communales d’octobre 1938 ; ils sont entrés en fonction au 1er janvier 1939. Mais le 11 avril 1941, l’autorité allemande suspend leur activité. C’est le bourgmestre en personne qui devient seul interlocuteur vis-à-vis de l’occupant. De ce fait, il doit assumer de nombreuses responsabilités, prendre des décisions souvent courageuses pour défendre autant que possible ses administrés, faire face à des situations pour le moins inhabituelles avec des ressources très limitées. Dans ses actes et sa gestion, il peut être personnellement mis en cause par les administrations officielles. Les collèges peuvent se réunir mais l’avis des échevins ne peut être sollicité que pour les actes de gestion journalière. Pendant la durée du conflit, c’est Nicolas Mauer, cultivateur né le 22/04/1878 qui est bourgmestre de Habergy, Pierre Octave Reichling, cultivateur né le 31/12/1887 à Hondelange, Raymond de Gauquier, notaire né le 14/10/1896 à Messancy, Adolphe Limpach, cultivateur né le 25/01/1876 à Sélange et Nicolas Wiltgen, cultivateur né le 15/05/1880 à Wolkrange, mais remplacé de 1941 à 1945, après son éviction par les Allemands, par Pierre Ferdinand Winandy, cultivateur né le 24/10/1897 GC. Nous constatons qu’aux premières élections communales d’après-guerre en octobre 1946, aucun de ces bourgmestres ne s’est représenté aux suffrages GC.

Les secrétaires communaux sont Jean Pierre Thill à Habergy, Henri Paul Zimmer à Hondelange, Emile Kirsch à Messancy, Edmond Muller à Sélange, Edouard Back à Wolkrange.

De nombreuses tâches, dès avant l’ouverture des hostilités, consistent en recensements, états de ressource, registres divers.

Après le 10 mai 1940, les administrations communales doivent organiser la surveillance des récoltes, la distribution des cartes de ravitaillement et des timbres, les commissions de contrôle des céréales.

Les administrations communales doivent recueillir auprès des habitants les déclarations relatives aux « dommages de guerre ». Ceux-ci comprennent aussi bien les destructions immobilières, les vols, les pillages dus aux troupes ennemies, les frais causés par le logement des soldats et de leurs chevaux que les dégâts causés par les mines, les bombes et les combats.

A Hondelange, c’est le garde-champêtre Decoox qui reçoit mission de constater les dégâts aux immeubles. A Messancy, en 1946, l’architecte Nestor Deboulle réalise les constats et les évaluations de ces dommages. Le 10 juin 1946, il est aussi chargé par le conseil de dresser un plan particulier d’aménagement pour la commune sinistrée.

Le manque de rentrées financières rend la gestion communale délicate. Le conseil de Habergy se plaint dès le 2 septembre 1940 : « malgré les coupes et ventes de bois, les rentrées ne suffisent pas pour couvrir les dépenses de travaux de voirie » D5. Le collège de Hondelange se dit « forcé de faire un emprunt de 10.000 f chez un particulier » en sa réunion du 14 septembre 1940 D4. Sélange, le 9 janvier 1941, vote la réparation des chemins détruits par les obstructions du 10 mai 1940 D10. La commune de Messancy parvient à réaliser quelques travaux : construction des égouts à Turpange en 1941, reprise du chemin particulier que Deboulle Alexandre a construit dans sa propriété pour l’incorporer à la voirie communale (21/9/41), restauration du lavoir de Turpange par Achille Schmit en 1943, approbation du cahier des charges de Sodelux pour l’électrification de Differt (6/11/43), travaux de captage en 1944 car la commune a plusieurs fois manqué d’eau l’année précédente, plans de l’architecte Nestor Deboulle pour aménager une classe supplémentaire à l’école communale. Lors de la réunion du 8 juillet 1942, le nouveau règlement organique du corps des pompiers est adopté. Ce corps ne comprend plus qu’un sous-officier, deux caporaux, neufs hommes et un clairon. Il ne possède plus de matériel mais dépend de celui de la commune ou de l’usine d’Athus.

Les comptes des fabriques d’église et les concessions dans les cimetières sont régulièrement acceptés. Nous constatons de nombreuses demandes de raccordement à la distribution d’eau D8.

Citons encore un fait cocasse : Henri Goedert, parti en exode vers la France le 10 mai 1940, en revient peu après accompagné d’un cheval. Il parvient à le revendre à la commune pour la somme de 1000 f … mais ce cheval sera réquisitionné par l’armée allemande en avril 1944 ! D8

Pendant la nuit du 14 au 15 septembre 1943, la maison communale de Wolkrange est la proie des flammes. Toutes les archives entreposées depuis la création de la commune au 1er janvier 1923 sont parties en fumée D11. Cet incendie volontaire servit à maquiller le vol de timbres de ravitaillement et le trafic de faux documents.

La maison communale de Hondelange est cambriolée et tous les timbres de ravitaillement emportés. Les voleurs se seraient introduits par une fenêtre …. mais les débris de verre sont retrouvés à l’extérieur du local !

A la suite d’une circulaire du gouverneur datée du 12 février 1944, les communes édictent un règlement sur la tenue des bals et concerts. Toutes les réunions publiques sont interdites pendant la durée de la guerre. Les lieux publics, notamment les cafés, doivent impérativement être fermés à 24 heures.

En 1944 et 1945, après la retraite des Allemands et le passage des armées américaines, surtout des chars, il faut réparer la voirie. A Sélange, le mur devant l’église est défoncé et le pavement arraché  D10. A Wolkrange, le pont dit « Katzelach » détruit par les Allemands est provisoirement reconstruit en bois. Les égouts entre Wolkrange et Weyler d’une part, Wolkrange et Hondelange d’autre part sont défoncés et doivent être remplacés D11. Messancy décide aussi, en séance du 28 mars 1945, de procéder à la réparation des chemins endommagés D7.

A maintes reprises, les administrations communales font preuve de solidarité.

Dès le 27 juillet 1940, le conseil de Messancy se penche sur le sort des combattants et de leurs familles :

« Attendu qu’il est du devoir de reconnaissance pour les pouvoirs publics de venir en aide aux victimes de la guerre, veuves, ascendants et descendants des militaires tombés au champ  d’honneur et domiciliés dans la commune de Messancy

Décide d’accorder 1°) aux veuves de ces militaires une indemnité de 2000 f plus 500 f par enfant et aux parents de militaires célibataires une indemnité de 2000 f ;

2°) aux militaires de la commune blessés gravement et incapables de se livrer à aucun travail et revenus dans leurs foyers une indemnité de 500 f ;

3°) de prendre à la charge de la commune le rapatriement des corps de ces militaires ainsi que les frais d’exhumation, d’inhumation et frais de funérailles ;

Les crédits seront répartis comme suit : madame veuve Bosseler-Nilles, madame veuve Degiampietro-Kesseler, madame veuve Malhage-Robert, messieurs Schumacher Armand, Henry Julien de Turpange, Arend Joseph de Turpange, André Joseph de Longeau et André Albert de Longeau » M2.

Ultérieurement des crédits seront accordés pour le rapatriement des corps et les funérailles de Bosseler Edouard (tué à Martelange), Degiampietro Georges (tué à Rosmeer), Lichtfuss Lucien (tué à Vinkt), Malhage Robert (tué à Perwez), Prignon Lucien (tué à Zarren) et Heymans René décédé en captivité. Il est accordé la gratuité de concession au cimetière pour tous les militaires et résistants tombés au cours de la guerre.

En avril 1943, Messancy vote un crédit de 1000 f pour venir en aide aux sinistrés d’Anvers.

Le collège décide en 1944 de procéder, par voie de tirage au sort, à la distribution de produits forestiers susceptibles d’être employés comme bois de chauffage à raison de 1 stère (1 m3) par ménage (279 stères dans la coupe de Messancy et 54  stères dans la coupe de Turpange) D8.

Des frais sont remboursés à certains habitants : Wolkrange prend en charge la facture de consommation d’électricité due à la présence de l’armée allemande en retraite dans l’immeuble de Charles Huppert, Messancy octroie un paiement à madame veuve Guissart Emile, réquisitionnée en 1940 pour faire la cuisine des troupes de l’armée occupante.

Hondelange et Messancy votent des crédits pour les festivités de la libération et du retour des prisonniers.

A Messancy, à l’initiative de la Fédération des Combattants, section locale, un comité est mis en place pour ériger un monument en souvenir des victimes des guerres 1914-18 et 1940-45. Le 20 décembre 1945, la commune désigne ses représentants : Hames Joseph et Hames Jean Pierre, conseillers et Kirsch Narcisse, échevin.

f. Les mouvements de jeunesse

(1) La troupe scoute de Messancy RR, HP, D12

Pendant les vacances de 1941, de jeunes étudiants du village se retrouvent pour jouer ensemble ; au cours de ces sorties improvisées et inorganisées germe l’idée de faire du scoutisme. Le vicaire Raymond Hesse est sollicité et une patrouille « expérimentale » est créée. Des garçons plus jeunes demandent eux aussi à être admis dans la troupe. Les plus âgés, à l’origine du groupe, n’insistent pas longtemps alors que les plus jeunes s’accrochent. Les uniformes et les foulards sont confectionnés par les parents. La première sortie officielle a lieu le lundi de Pentecôte 1942 à Battincourt. Le 7 juillet, les trois chefs de patrouille font leur promesse. Au cours de l’été, du 6 au 14 août, un premier camp est organisé à Metzert dans la ferme Raths ; c’est le boucher Nicolas Scharff qui conduit les jeunes dans la vallée de l’Attert. En octobre, une petite revue baptisée « L’Etape » voit le jour.

Les réunions se tiennent dans l’ancienne classe contiguë au presbytère ou dans un local de l’Institut à Differt. La troupe prend pour nom « Les Compagnons de Saint Jacques ». Elle appartient à  la 5ème Sud-Luxembourg et comprend trois patrouilles : les Castors, les Sangliers et les Faucons. Le chef d’unité est un Aubangeois, Lucien Schmit  et l’aumônier bien sûr est l’abbé Hesse. Parmi les B.A.(Bonnes Actions) réalisées, relevons la vente de l’agenda au profit du  Service Social  des Chasseurs Ardennais.

Nous avons retrouvé comme membres de la troupe: Cousin René, Deboulle Nestor (staff), Eischen Jean, Garant G., Goffin Adolphe, Goffin Narcisse, Hennico Paul, Hennico Thierry, Hoffelt Adrien, Kettels Robert, Kolkes André, Kolkes Jean, Mathieu André, Mathieu Joseph, Mathay Louis, Mauer Josy, Niclou Lucien, Royer Raymond, Ruar Roger, Scharff Fernand, Schrobiltgen Jean, Thill Louis.

(2) Le Patro de Turpange BP.

Durant la guerre, le curé Weber et une institutrice, mademoiselle Poncé, créent un patro pour les jeunes de 7 à 17 ans. Ils sont une vingtaine à se retrouver le dimanche après-midi dans un local mis à leur disposition par les Pères Maristes à Differt ou au presbytère du village.

Parmi les activités hivernales, plusieurs représentations théâtrales sont proposées aux Turpangeois dans une salle de l’Institut. Monsieur Ambroise, instituteur titulaire d’un premier prix de conservatoire, accompagne les pièces ou agrémente les entractes en jouant du piano.

g. Les activités culturelles et récréatives

Les activités culturelles sont réduites, d’ailleurs soumises à l’autorisation de la Kreiskommandantur d’Arlon. Plusieurs associations ou groupes d’habitants réussissent cependant à mettre sur pied des soirées théâtrales qui recueillent chaque fois un énorme succès. Le bénéfice des entrées est destiné à l’achat de vivres et de vêtements dont on confectionne des colis pour les prisonniers. Il est remarquable de constater qu’à l’occasion de ces manifestations, les clivages politiques bien présents dans nos villages sont généralement ignorés.

(1) Hondelange.

Dès la fin de 1940, des pièces de théâtre y sont organisées  HG. A l’initiative du Service Social des Chasseurs Ardennais et sous le patronage de l’Administration communale, deux soirées sont mises sur pied les dimanches 12 et 19 avril 1942. Au programme figurent :

« Ouverture » : marche des Chasseurs Ardennais par un orchestre créé pour la

circonstance par des musiciens hondelangeois.

« Le Médecin des pauvres » : drame en six actes et un prologue de Xavier de Montépin et

Jules Dernay, musique de M. Herman. Les costumes et perruques sont loués à la maison Jos Halfaux de Liège.

« De Geheimnisvollen Zaubermänchen » E leschtegt schteck an engem akt vum Henn Collignon (Le petit magicien mystérieux, pièce amusante en un acte de Henn Collignon)

Ces deux pièces sont interprétées par les acteurs suivants : Claus Julien, Claus Léon, Claus Paul, Claus Valentine, Fonck Germain, Gillet Elysée, Kellen Justin, Maus Arthur, Pringot Roger, Reichling Louis, Reichling Raymond, Reuter Albert, Rotty Albert, Schouweiler Emilie, Theisen Elie, Theisen Firmin, Theisen Joseph, Theisen Marie et Zimmer Charles.

Le succès est fantastique. La salle est comble pour les deux soirées. Toute la région est venue applaudir ces acteurs qui se dévouent pour la bonne cause GC.

(2) Bébange WJ

C’est au café Kintziger que se donnent des représentations en luxembourgeois durant l’hiver. Les jeunes des villages voisins viennent y assister également.

(3) Messancy RR

En 1941, Le Comité des Combattants de 1940 organise des fêtes en collaboration avec le Service Social des Chasseurs Ardennais. Des représentations théâtrales ont lieu dans la salle de la Gaîté, dans celle de la Royale Concordia et au café de la Gare ; la pièce « Le  sac du crime » y est notamment jouée. Ce comité récolte aussi des fonds grâce à des collectes à l’église et à l’organisation de matchs de football.

La projection d’un film est également programmée en matinée et en soirée (film loué  aux Ets Schrijen – Films). Un projecteur avait été installé avant guerre dans la salle Concordia et l’opérateur en était Jean Schrobiltgen RR.

Les recettes de 1941 se montent à 6464,35 frs. Elles sont réparties entre les familles des 15 prisonniers encore en Allemagne, les orphelins, les enfants de prisonniers et l’organisation d’une fête de Saint-Nicolas pour les enfants [5].

Les footballeurs jouent aussi des pièces de théâtre durant l’hiver. La soirée se compose d’un drame en français et d’une comédie en luxembourgeois SA. L’une des pièces s’intitule « Le grand nettoyage dans le poulailler du professeur » RR.

Notons encore que la troupe scoute, en 1944, prépare une pièce qui doit être présentée à Noël dans la salle de la Gaîté : « Notre Dame de la Mouise ». Au cours de l’offensive des Ardennes, l’armée américaine réquisitionne cette salle et la représentation n’eut jamais lieu HP.

(4) Sélange

Aucune représentation théâtrale n‘y est organisée GF.

Les harmonies restent en veilleuse pendant toute la guerre. Chaque musicien garde son instrument à la maison. La « Royale Concordia » et l’ « Emulation » de Messancy , respectivement de tendances politiques libérale et catholique, se reforment après la Libération et marquent de leur présence les cérémonies patriotiques ainsi que les festivités organisées à l’occasion du retour des prisonniers. RR

Initiative isolée et quelque peu osée, Germain Fonck de Hondelange a formé un petit orchestre baptisé « Wildboer » (Le Sanglier sauvage). Des bals sont organisés le dimanche dans son café, ce qui amène des patrouilles allemandes à effectuer des contrôles HG.

Signalons encore que le pépiniériste Lucien Schmit, domicilié rue du Moulin à Messancy, donne des conférences horticoles en 1941, notamment sur l’analyse des terres D6.

h. Les activités sportives

Le football, sport déjà bien présent dans la région, connaît un succès tout particulier durant la guerre. Chaque village possède son équipe et les matchs ont lieu tous les dimanches. Des équipes nouvelles se créent car les autres distractions pour la jeunesse sont très réduites. Les joueurs s’entraînent une ou deux fois par semaine, après le travail et sans moniteur qualifié. L’équipe de Longeau bénéficie cependant d’une salle de gymnastique aménagée dans le moulin Lippert.

Celle de Messancy  dispose pour ses déplacements, qui la mènent dans toute la province, d’un camion de la firme Boset d’Aubange. En semaine, ce camion sert à livrer le charbon. Le dimanche matin, on y aménage des bancs en planches et l’équipe s’en va sur les routes poussiéreuses. Un comité dévoué organise la vie du club. Par tradition, chaque lundi de la fête un match oppose les vétérans en maillots zébrés, à l’équipe première, en maillots blancs. Le lundi 26 juillet 1943, deux membres de la Gestapo, Bergmann et Vieuxtemps, font une descente dans le village et, sous la menace de leur pistolet, rassemblent près de la gare tous les jeunes hommes présents à la fête. Ils les contrôlent sans inquiéter personne cependant puis se dirigent vers le terrain de football. La nouvelle s’y répand rapidement. Les joueurs en tenue sportive ramassent rapidement leurs effets civils et vont se réfugier à Turpange où les sinistres gestapistes ne les suivent pas. Les nombreux spectateurs présents s’éclipsent et en quelques instants la plaine est complètement déserte KM.

La Jeunesse Sportive dispute un match au profit des sinistrés de Marloie le 30 juillet 1944 et un autre entre équipe première et vétérans le dimanche 8 octobre 1944 au profit des sinistrés du village [6].

L’équipe de Bébange joue aussi chaque dimanche et se déplace dans les environs : Hondelange, Rachecourt, Chatillon WJ.

Les footballeurs de Wolkrange se retrouvent au terrain situé « A Geisert », actuel lotissement Origer.

Ceux de l’Etoile Sportive de Turpange jouent à mi-chemin du village et de la ferme Witry, près de l’actuelle entrée des fournisseurs du magasin Cora.

Hondelange compte deux équipes. L’une, composée exclusivement de garçons du village, est officiellement affiliée à la Ligue et s’entraîne en haut de la rue des Rochers. Le maillot est blanc barré obliquement d’une bande rouge, confectionné avec les moyens du bord. Si l’on trouve toujours des bouts de tissu, il est cependant beaucoup plus difficile de se procurer des chaussures. L’autre équipe, formée de jeunes provenant surtout des villages voisins, dispute ses matchs près de la gare d’Autelbas HG.

Germain Fonck, cafetier à Hondelange et ancien champion luxembourgeois du 10.000 mètres, organise aussi dans son village quelques meetings d’athlétisme basés essentiellement sur les courses HG.

i. La vie au village

Bien sûr, on écoute la radio de Londres en cachette. Parfois un enfant fait le guet près de la porte. Et il faut s’accommoder du couvre-feu décrété à 23h30. Toutes les lumières doivent être occultées.

Messancy est pourvu d’un bureau cantonal de l’Enregistrement. Il se trouve dans la maison située au n° 20 de la rue du Castel (coin de la rue des Déportés). Monsieur Kensière en est le préposé, Albert Schmit y est employé. On y délivre beaucoup de timbres fiscaux pour la douane d’Athus ; ils sont nécessaires pour importer les marchandises en provenance de France et du Grand-Duché. Par contre, il y a très peu d’activité dans les ventes de terrains car personne ne construit. Le bureau s’occupe aussi des successions SA.

Quand un avion s’écrase dans les parages, la foule va voir sur place et, surtout, essaie d’emporter des morceaux de plexiglas ou mica pour en faire des colifichets. Les avions américains lâchent des leurres pour brouiller les radars ennemis. Ces bandes d’aluminium sont récupérées par les enfants pour en faire des jeux.

Le garde-champêtre de Messancy, Gustin Damiany, parcourt le village en annonçant les avis à haute voix. En début d’occupation, il visite les maisons pour y loger les soldats allemands et marque à la craie sur la façade le nombre de militaires et de chevaux susceptibles d’être hébergés RR. Ce même garde-champêtre réquisitionne les étudiants pendant les week-ends pour effectuer des surveillances autour de la gare car des wagons sont parfois sabotés RV.

Messancy se trouve vraisemblablement sur une ligne aérienne de transport de courrier. En effet, un avion postal allemand dont l’immatriculation DA-URE est facilement identifiable passe régulièrement au-dessus du village HP.

Les cafés sont surveillés par l’armée allemande qui y fait régulièrement des contrôles. Quand on y danse et qu’une patrouille arrive, on se sauve par l’arrière de l’établissement.

En 1942, les Allemands récupèrent les métaux non-ferreux. La récolte de Hondelange permet de rassembler 43,2 kg de bronze, 175,3 kg de laiton, 211 kg de plomb et 1,7 kg d’étain D4.

5. Résistance

a.     Les maquis

De nombreux hommes, quelques femmes également, originaires ou habitants des communes d’alors, parfois bien jeunes, gagnent différents maquis pour participer à la résistance armée. Plusieurs d’entre eux  défendent la Liberté et leur idéal au prix de leur vie, d’autres connaissent les affres de la torture et des camps.

Divers groupements se constituent dans la province surtout en 1943, agissant alors de manière indépendante e, h. En 1944, l’Armée Secrète (AS) apporte de l’ordre dans les divers mouvements et regroupe le Front de l’Indépendance (FI), Le Mouvement National Belge (MNB), les Insoumis et d’autres petites formations. Les parachutages d’armes et de matériel promis par Londres ne sont que partiellement effectués et ne permettent pas d’armer tous les maquisards. A l’arrivée des troupes américaines, les résistants fournissent aux libérateurs des indications pour faciliter leur progression, occupent certains villages, nettoient l’arrière des troupes ennemies, reçoivent la mission de maintenir l’ordre dans les régions libérées et de capturer les traîtres et collaborateurs afin de les livrer à la justice  d, b, c.

Les différents mouvements de résistance actifs dans la province et auxquels prennent part plusieurs habitants de nos communes sont d :

L’ A.L. (Armée de Libération).

L’ A.S.A (Armée Secrète des Ardennes).

La B.B.L. (Brigade Blanche Luxembourgeoise) dont le chef pour le secteur de Messancy est Thill alias Roger.

Les Insoumis dont le chef provincial est Pierre Luttgens de Messancy.

Le F.I.P.A. (Font de l’Indépendance – Partisans armés).

Le M.N.B. (Mouvement National Belge) dont le chef du secteur de Messancy est Paul Back de Turpange.

Le « Réseau Colon » qui deviendra le « Service Psichari », fondé par le Frère Colomban de l’ISMA à Arlon secondé de Roger Mathen du Clémarais.

Généralement, les maquis se composent d’un état-major, de brigades et de groupes de choc. Ces derniers exécutent les missions les plus délicates et risquées (sabotages, vols d’armes, élimination des traîtres etc …).

Un groupe originaire de nos communes, particulièrement actif, fait partie de l’A.S.A. dans les maquis de la région de Houdemont et Rulles. On y retrouve André Hames, Joseph Mauer, Hippolyte Kirsch, Roland et Roger Mauer de Messancy ainsi que Yvette Nicolas de Hondelange. Un groupe de choc commandé par René Filet  mène de nombreux sabotages et attaques armées c.

Un second maquis armé accueille des réfractaires de nos communes, celui de la région de Bertogne et Engreux entre Houffalize et Ortho créé à l’initiative des Partisans Armés de Houffalize. On y trouve  Raymond François, Vincent Longton, Victor Meunier de Messancy ainsi que Raymond Damart de Wolkrange.

Les principaux résistants membres des maquis extérieurs à nos communes sont :

Damart Raymond   (Wolkrange)

Travaillait à l’usine de Rodange. Dit « Tintin » dans la Résistance [7]. Membre du maquis d’Engreuxc. Arrêté et déporté, il est mort au camp de Buchenwald en avril 1945 âgé de 21 ans.

Filet René l,. (Messancy)

Né à Messancy en 1918, habitait rue de la Gare. Il fait son service militaire en 1937 au 1er Régiment des Chasseurs Ardennais. Mobilisé en 1939, il est affecté le long de la Meuse. Fait prisonnier près de Dunkerque, il s’évade et revient travailler à l’usine d’Athus puis dans d’autres aciéries où il entre en contact avec l’Armée Secrète, recruté par l’abbé Poiré c. Repéré par la Gestapo, il parvient à s’échapper. Grâce à la filière mise en place par l’abbé Ley de Battincourt trouve refuge dans une ferme à Villers-sur-Semois. Il prend la tête d’un groupe de choc de l’Armée Secrète, construit les camps de Mortinsart, Ebly et Houdemont. En mai 1944, le groupe Filet attaque l’entrepôt Lambert en gare d’Arlon pour y emporter 29 carabines qui faisaient partie de la dotation des douaniers. Il réussit également la prise du poste de douane de Kahler où sont récupérés 7 carabines et un émetteur radio c. Il exécute divers sabotages et « neutralisations » de traîtres ou collaborateurs. Leur tenue était la salopette bleue dont le groupe avait réussi à subtiliser une importante quantité à l’usine d’Athus. A l’arrivée des Américains, René Filet est incorporé comme officier de liaison dans une de leurs unités (102ème Mot. Cavalery) et combat avec eux sur le Rhin près de Remagen. Il participe notamment à la libération du camp de Buchenwald. Il épouse Margot Eischen de Clémency, elle-même issue d’une famille de résistants, rescapée du camp de Ravensbruck c.

François Raymond (Messancy)

Né à Algrange en Moselle. Arrêté au maquis d’Engreux vers le 13 mars 1944 c. Incarcéré à la prison Saint-Léonard puis transféré à la Citadelle (Liège). Torturé puis condamné à mort le 18 juillet 1944, il est fusillé le 2 septembre.

Hames André (Messancy)

Né à Messancy le 18 septembre 1920. Il participe à la campagne des 18 jours en qualité de radio-télégraphiste de l’aviation belge. Il s’engage dans le maquis de l’ASA dans la région de Rulles où il fait partie du groupe de choc « Schingtienne ». Il est abattu le 27 juillet 44 dans le village de Thibessart, lors d’un accrochage avec une patrouille allemande.

Kirsch Hippolyte ( Messancy)

Membre du groupe de choc « Schingtienne » dans le maquis de Rulles puis, après démantèlement de celui-ci, du groupe de choc Filet. Il est un des rescapés de la tragédie de Thibessart. Il vécut ensuite dans les maquis des Croisettes puis des Charmois. Il participa à différentes opérations armées.

Longton Vincent (Messancy)

Né à Longwy-Bas. Il travaillait à l’usine de Rodange. Arrêté au maquis d’Engreux vers le 13 mars 1944 c, il est  condamné à mort le 18 juillet, incarcéré à Saint-Léonard (Liège) et fusillé à la Citadelle le 2 septembre 1944.

Luttgens Pierre (Messancy)

Il est chef provincial du mouvement des « Insoumis », particulièrement actif au sein de l’usine d’Athus où il est ingénieur. Son groupe participe au service de renseignement et à de nombreux sabotages [8]. Après les exactions du 3 septembre 1944, des Allemands reviennent à Athus le 5. Pierre Luttgens est intercepté et sommé d’indiquer la cache des « terroristes ». Arrivé près de la case à mine, il est mitraillé, tente de se sauver mais s’écroule, mortellement blessé, 4 jours avant la libération d’Athus.[9]

Mauer Joseph (Messancy)

Membre du groupe de choc Schingtienne, il fait partie du maquis de l’ASA de Rulles. Arrêté par les Allemands le 27 juillet 44 à Thibessart lors d’un accrochage avec une patrouille allemande, il est sommé de dénoncer les membres du groupe. Il conduit les soldats dans un ancien campement abandonné, laissant ainsi à ses camarades le temps de se mettre à l’abri. Comprenant la supercherie, ses tortionnaires l’abattent dans les bois de Villers-sur-Semois et l’enterrent sur place. Des habitants du village viennent récupérer son corps pour lui donner une sépulture décente. C’est à Hippolyte Kirsch accompagné de Yvette Nicolas (Fauvette) que revient la délicate mission d’annoncer le décès à ses parents, le lundi de la kermesse de Messancy MA.

Mauer Roger (Messancy)

Réquisitionné pour le travail obligatoire, il travaille à Differdange au début de l’année 1943. Il parvient à y échapper en se faisant opérer d’une appendicite fictive. Après sa période de convalescence, il prend contact avec l’abbé Ley de Battincourt qui, à son tour, contacte le réseau Colon. Suite aux ordres reçus, Roger prend le train à Turpange et  se rend à Houdemont puis Orsinfaing pour rejoindre le maquis dont René Filet est chef de groupe. Il y retrouve André Hames, Hippolyte Kirsch, Pierre Weber, son cousin Joseph Mauer et son frère Roland. Il participe à de nombreux coups de main dont l’attaque de l’entrepôt Lambert de la gare d’Arlon avec le groupe de choc Filet. Après la Libération, il s’engage comme volontaire pour l’Irlande où il est incorporé dans la 2ème Brigade. Il est titulaire de nombreuses décorations dont celle de la Résistance Luxembourgeoise MRG.

Mauer Roland (Messancy)

Il participe à la campagne des 18 jours au sein du régiment des Chasseurs Ardennais et combat notamment à Martelange. Maquisard du Groupe I avec son frère Roger, il fait partie des maquis de la forêt de Rulles. A la libération, il s’est mis au service de l’hôpital de campagne déployé par les Américains à la villa Clainge.

Meunier Victor (Messancy)

Membre d’un maquis issu du groupe X9 puis repris par les Partisans Armés de Houffalize. Ce groupe occupe divers camps dans la région d’Engreux. Il dynamite notamment la ligne à haute tension Athus-Liège c. Son surnom est « Milou ». Il est capturé lors de la prise du moulin de Rahimont près de Bertogne. Il connaît alors diverses prisons allemandes puis, finalement, le camp de Dachau d’où il est libéré par les Américains le 29 avril 1945 c. Il est le cousin germain de Joseph Mauer abattu à Villers-sur-Semois.

Noël Nicolas (Longeau)

Agent de l’Armée de la Libération, il contracte une grave maladie suite au dévouement dont il fait preuve à l’égard des jeunes réfractaires luxembourgeois. Il est enterré à Guerlange le 15 novembre 1944.[10]

Nicolas Yvette ( alias Fauvette) (Hondelange)

Réfractaire cachée à Rulles avec son frère Robert et René Thill de Hondelange également, elle est incorporée au groupe William. Elle fait fonction d’estafette et transmet le courrier pour le groupe I de l’Armée Secrète. C’est elle qui prévient les parents de Joseph Mauer et de André Hames de la mort tragique de leur fils l.

Stoffel René (Hondelange)

Caché à Lischert en 1944 HG

Poiré François (Sélange)

Né à Sélange en 1887, l’abbé Poiré est durant la guerre curé de Schockville et Parette. Il aide les réfractaires et édite des tracts. Il est déporté en Allemagne le 15 avril 1944 et connaît les camps de Buchenwald, Harzungen et Songerhausen c. En septembre 1945, il est nommé curé de Messancy et installé doyen par Mgr Charue le 16 octobre.

Theisen Raymond (Hondelange)

Agent colonial de la Forminière, il est membre du S.R.A. de l’Armée belge des Partisans et du service luxembourgeois de renseignement P-men. Arrêté en août 1944, il est assassiné par les S.S. au camp de Mauthausen [11].

Thill Roger (Messancy)

Membre de la Brigade Blanche de la province de Luxembourg, chef du secteur de Messancy c, les Allemands le condamnent à mort par contumace. Il participe notamment à l’attaque du bureau de comptabilité d’Arlon [12].

Weber Pierre

Membre du groupe de choc Filet dans les maquis de Rulles.

Wittamer  Adrien (Messancy)

Natif de Messancy, il est avocat à Arlon pendant la guerre. Il s’engage dans la résistance au sein du M.N.B. dont il devient l’adjoint du chef de zone. Il s’occupe plus particulièrement de l’approvisionnement. Le 27 juillet 1944, il parvient à échapper à la Gestapo qui venait l’arrêter à son domicile. Après être resté caché à Stockem, il réussit à gagner Bruxelles où il a vécu la Libération k.

b. La résistance dans le Pays de Messancy

Un groupe de résistants dépendant du M.N.B. est fort actif dans la commune de Messancy. Une structure se met en place à la fin de 1943. La responsabilité en incombe à Paul Back de Turpange. L’effectif est divisé en quatre brigades : Messancy, Sélange, Turpange et Wolkrange.

Les activités et missions sont diverses :

-       Distribution de la presse clandestine. Pour contrer la propagande nazie distillée par des journaux belges aux mains de l’ennemi, diverses publications périodiques rédigées dans la clandestinité sont régulièrement déposées dans les boîtes aux lettres. La Libre Belgique, Le Luxembourgeois (journal provincial du M.N.B.), l’Insoumis sont acheminés puis distribués par la résistance.

-       Recherche et distribution de matériel et de nourriture pour les maquis et caches de réfractaires.  Le vol de timbres de ravitaillement dans les maisons communales, notamment, permet de se procurer des denrées essentielles.

-       Accueil des réfractaires. Plusieurs caches sont aménagées.

-       Renseignement. Le réseau reçoit de l’échelon supérieur des demandes d’information sur les troupes occupantes. Par exemple, Paul Back est employé à la gare d’Athus. Il doit repérer le passage de certains types de wagons et communiquer ces renseignements à des correspondants qu’il ne connaît pas. Il apprend plus tard que ces wagons particuliers transportaient des éléments de rampes de lancement pour les V1.

-       Sabotages. Notamment après le débarquement de 1944, ils servent à désorganiser autant que possible les activités de l’occupant dans l’attente des libérateurs.

-       Confection et transport de fausses cartes d’identité.

De nombreuses femmes contribuent au fonctionnement de ces réseaux. Elles

jouent principalement un rôle de transport du courrier, de documents et de colis compromettants. Moins surveillées que les hommes, elles passent plus facilement les contrôles et usent de subterfuges comme l’usage des landaus pour cacher les plis BP.

(1)  Bébange

Le Service Psichari, fondé par le frère Mariste Colomban, compte dans ses rangs l’abbé Alzinger, curé de Bébange et Albert Furst. Ce dernier, troisième adjoint  du frère Colomban est responsable des lieux de résidence et de transit pour les réfractaires. Il est aussi membre du comité de rédaction de la revue clandestine « La Fusée » c.

Adolphe Alzinger (mieux connu sous son pseudonyme d’écrivain Josse Alzin) est originaire d’Aubange. Vers Noël 1930, il est désigné comme curé de Bébange. Il participe activement au réseau Psichari ; il est rédacteur de la revue clandestine « La Fusée » fondée en octobre 1943. Il cache des réfractaires dans son presbytère, parmi lesquels Tomiak, un Polonais d.

Il est surveillé par les membres de la  Gestapo dont Vieuxtemps. Un jour, ceux-ci arrêtent Albert Barthel, frère de l’instituteur, l’emmènent puis finalement le relâchent WJ.

L’abbé Alzin est arrêté le 4 juillet 1944, torturé puis déporté aux camps de Neuengamme et Hausbruck d’où il est libéré par les soldats anglais.

Divers refuges pour réfractaires et évadés sont organisés dans la commune : la ferme Charlier à Guelff (mai 1944) en héberge une dizaine, le presbytère de Bébange, la ferme de Josse Tibesart à Habergy. C’est le château de Clémarais à Aubange, propriété de Roger Mathen qui en est le centre névralgique du réseau c.

(2)  Hondelange

Village dont les enfants sont marqués dès l’école par l’exemple et les cours de patriotisme des instituteurs et institutrices, Hondelange connaît un groupe fort actif, notamment dans le renseignement mais aussi dans l’accueil des réfractaires luxembourgeois. Le chef local est Raymond Reichling. On trouve notamment dans ce groupe Philippine Theisen, Albert Theisen surnommé « Churchill » qui transmet le courrier à l’avocat Wittamer, le jeune Alexis Zimmer qui effectue de nombreuses sorties nocturnes et son père Paul qui s’occupe du placement des réfractaires et des soldats évadés, Camille Roeser, ancien combattant de 1914-18, le cafetier Germain Fonck, Jules Filbig et Vital Lejeune. Roger Pringot, natif de Vlessart mais demeurant dans l’actuel hôtel des Blés d’Or, y cache son parent Raymond Theisen.

Le boulanger  Schouweiler fournit du pain aux réfractaires et différentes denrées aux habitants du village. Les jeunes réfractaires luxembourgeois arrivent par Grass et se faufilent près de la voie du petit train. Lorsque la locomotive approche du croisement avec la route, elle siffle et, profitant du bruit et du nuage de vapeur, ils passent sous la route par une canalisation. Les passeurs les attendent du côté belge pour les mener en sûreté à travers bois. Gustave Hagen se souvient d’avoir aidé au passage de la frontière HG. Jules Filbig est professeur d’allemand à l’Institut des Frères Maristes d’Arlon où il est recruté par le Frère Colomban. Etant légèrement handicapé et marchant avec difficulté, il n’attire pas l’attention. C’est lui qui apporte l’argent dans les différents refuges du service Psichari HG.

Le samedi avant la Pentecôte 1944, un avion américain s’écrase à proximité de Clairefontaine. Un des aviateurs qui a réussi à sauter en parachute est récupéré par la résistance de Hondelange et sera caché au village jusqu’à la Libération HG.

(3)  Messancy

Dans la nuit du 12 au 13 août 1942, des inconnus coupent la ligne téléphonique le long de la voie ferrée entre Aubange et Messancy et 350 m de câble aérien sont emportés. La gendarmerie d’Aubange qualifie cet acte de vol D6 tandis que l’administration communale de Messancy parle de sabotage. L’autorité allemande contraint la commune, à titre de représailles, de faire surveiller la voie ferrée chaque nuit de 7 h du soir à 6 h du matin  par 48 hommes valides. Roger Thill est désigné pour organiser cette surveillance qui dure du 13 septembre au 10 octobre D8. Albert Schmit se souvient y avoir participé SA. Aucune source n’a permis d’identifier les auteurs de ce coup.

Le groupe local du M.N.B. a pour chef Joseph Goedert, fondeur à l’usine d’Athus, habitant Grand-rue en face du presbytère. Son groupe aurait compté dans ses rangs notamment Jean Pierre Altenhoven VR, Albert Bremer AM, Emile Dillembourg VR, Josy et Nicolas Hoeltgen VR, Emile Mauer[13] , Jean Schutz VR, Constant Schutz AM, Camille Schwartz RR et Eugène Weicker HP. On peut retenir à son actif l’établissement d’un camp de transit en collaboration avec le groupe de Turpange. La cachette se trouve dans la colline entre Messancy et Turpange, au sein d’une sapinière appartenant au boucher Kieffer de Sélange. Albert Schmit se rend fréquemment en compagnie de son père Frédéric dans un de leurs champs tout proche au lieu-dit Erzenthal, soit pour y travailler, soit pour simuler un travail et ils en profitent pour déposer de la nourriture ou divers colis dans un bosquet. Il y a parfois une dizaine d’hommes dans la cache SA.

Des wagons en gare de Messancy sont sabotés : les conduites de freins ont été sectionnées. Victor Reiland fait partie d’un groupe d’étudiants que le garde-champêtre Damiany a dû réquisitionner pour surveiller les quais RV.

Durant l’été 1944, le château Haebler (actuelle maison communale) aurait abrité pendant quelques jours l’état-major de l’amiral Dönitz. Emile Dillembourg, menuisier de son état, effectuait alors des réparations pour le compte de la baronne. Il propose de bourrer sa boîte à outils avec des explosifs et de faire sauter le château pendant une réunion de l’état-major. Ses camarades l’en dissuadent de peur des représailles que les Allemands n’auraient pas manqué d’infliger à la population du village RV.

Le percepteur des postes de Messancy, monsieur Mauer, collabore également au groupe de résistance local. Il lui arrive de subtiliser des lettres destinées aux autorités allemandes. Il a notamment remis à la résistance une lettre de dénonciation désignant comme pro-américains messieurs les notaires de Gauquier et Tréfoy  ainsi que l’épicier, monsieur Sand RV.

Lorsque les Américains entrent à Athus le 9 septembre 1944, le groupe Goedert est averti qu’un véhicule en provenance d’Arlon a forcé un barrage. Quelques hommes dont Jean Schutz, Josy et Nicolas Hoeltgen ainsi que Camille Schwartz se postent en face du presbytère pour l’intercepter. Camille Schwartz tente de tirer dans les pneus mais la balle ricoche et blesse à la jambe le doyen Perrad présent de l’autre côté de la route RV, KM, RR.

Ce même jour, un peloton cycliste de soldats allemands en retraite essuie des coups de feu, tirés par des résistants, au bout de la rue d’Arlon. Rapidement couchés au sol, les soldats ripostent et mettent les tireurs en fuite. Par vengeance, ils lancent des grenades incendiaires dans quatre maisons (Liétard, Bertholet, Watry et Schrobiltgen) qui furent la proie des flammes RV, HP.

Les frères René et Joseph Witry exploitent la ferme entre Differt et Turpange. Ils approvisionnent la résistance en denrées alimentaires. Un soir, René a une altercation avec des individus venus chercher des victuailles et il est abattu. On n’a jamais identifié l’auteur de ce meurtre HP, RR.

Le vicaire de Messancy, Raymond Hesse, seconde Robert Reding, chef du M.N.B. d’Athus k. Ses promenades en compagnie des patrouilles scoutes, les conduisant notamment à Battincourt et à Bébange n’étaient probablement pas innocentes. Ce pouvait être une bonne couverture pour nouer de discrets contacts avec les curés Ley et Alzin.

L’entrepreneur Eugène Neu aurait caché des réfractaires dans son entreprise des Usines de la Chiers. Victime d’une vengeance personnelle en septembre 1944, il est brièvement arrêté puis aussitôt relâché [14].

Le mari de la garde-barrière, monsieur Tremblay, ne cache pas ses sympathies communistes et distribue des écrits clandestins ou vend des photos représentant les chefs de guerre russes au profit du parti communiste KM. IL est membre du mouvement des Partisans Armés. Cheminot à Athus, il participe à de nombreux sabotages de matériel ferroviaire à Messancy et Athus. A la fin de la guerre, il s’engage volontairement à l’armée et rejoint les troupes d’occupation en Allemagne pour y occuper un poste de surveillance des chemins de fer allemands BL.

Joseph Sprumont dont la maison qu’il loue à la rue Basse a été réquisitionnée pour y héberger la Kommandantur est également membre de la Résistance BL.

(4) Sélange

Le groupe local du M.N.B. a construit un chalet dans les bois de Sélange pour accueillir des réfractaires. Il est bien aménagé mais des indiscrétions malheureuses dévoilent  son existence à certaines familles du village BP. Il doit être abandonné avant d’avoir servi. Deux Sélangeois viennent régulièrement à Messancy au domicile de J. Goedert : Firmin Deroisy et Kroemer RV.

En 1941, Floris Gofflot trouve du travail à Frassem, dans la ferme Origer. Soudain, en 1943, la Gestapo fait irruption et emmène les cinq jeunes gens alors employés aux travaux agricoles. Ils sont embarqués dans un train à destination de l’Allemagne mais, suite à un contre-ordre, se retrouvent finalement dans un camp de travail entre Schifflange et Esch-sur-Alzette. En compagnie de jeunes Luxembourgeois et de prisonniers russes, ils sont obligés de travailler sur les crassiers, sous la surveillance des S.A (Section d’Assaut). En 1944, le jour de ses vingt ans, Floris prend la décision de s’évader quoi qu’il arrive. Profitant d’une alerte, il réussit à fausser compagnie à ses gardiens et, marchant de nuit, il regagne Sélange. Averti qu’il était à nouveau recherché par la Gestapo, il se cache dans les bois puis rejoint le maquis du M.N.B. GF

En 1944, un tailleur retraité, monsieur Ney et son épouse ont organisé dans leur maison de Sélange un relais pour les jeunes Luxembourgeois qui fuient l’incorporation dans la Wehrmacht. Ils travaillent en collaboration avec le mouvement luxembourgeois L.P.L. Un jour, des membres de la Gestapo viennent contrôler la maison et y trouvent un déserteur de l’armée allemande. Ce dernier est emmené tandis que le vieux couple Ney est sauvagement battu GF.

(5) Turpange

Le groupe M.N.B. de Turpange s’occupe de l’établissement d’une cache-relais pour les réfractaires et évadés. Les familles d’ Adolphe Kirsch et de Joseph Kirsch, coiffeur et joueur d’accordéon dans les bals de village, sont particulièrement actives. Une maison inoccupée à la sortie du village est d’abord choisie. Rapidement, il faut trouver un endroit mieux caché. Un vaste abri est creusé dans  la colline (v. Messancy) en avril 1944. Pour le couvrir, les hommes utilisent et déplacent sur 1 km les tôles d’un hangar à vaches. Le camp est commandé par un sergent d’origine luxembourgeoise. Outre des réfractaires belges et luxembourgeois, des prisonniers russes évadés sont aussi recueillis BP.  Adolphine Kirsch, va les ravitailler. Elle fut un jour accidentellement blessée à la jambe par une balle SE.

Léa Muller, alors étudiante à Arlon, accepte de transmettre des plis à divers contacts du chef-lieu. On lui confie aussi des colis qu’elle doit remettre à des résistants de la commune. Un jour, elle prend livraison d’une petite caisse et, revenant en train, elle la dépose dans le fourgon. A l’arrêt de Turpange, voulant récupérer la caissette, elle constate qu’une sentinelle allemande est assise dessus.  Elle lui demande de pouvoir reprendre son bien et s’en va tranquillement vers le lieu du rendez-vous. Un résistant du groupe de Paul Back s’y trouve ; elle raconte brièvement l’incident et apprend alors qu’elle transportait une livraison de grenades ! ML

Une équipe composée de P. Back, E. Weicker, J. Goedert et J.P. Altenhoven parvient en 1944 à sectionner le câble téléphonique international. Agissant en plein jour entre Turpange et Hondelange, c’est au moyen d’une scie à métaux qu’ils réussissent leur coup, non sans frayeur car un camion rempli de soldats allemands ainsi qu’un autre véhicule firent halte à proximité de l’endroit où ils opéraient BP.

(6) Wolkrange

Un groupe de jeunes gens participe aux activités du groupe M.N.B. Albert Faber en faisait partie MA . Des timbres de ravitaillement sont dérobés à la maison communale.

Maurice Huppert, ancien militaire, est membre des Insoumis, groupe principalement actif sur le secteur d’Arlon. Dénoncé, il vient se cacher à Wolkrange. Son frère Maurice fait également partie du même mouvement. Firmin Loutsch, né en 1918, est surpris par les Allemands sur le site d’un parachutage d’armes près de Wolkrange en avril 1942. Il est fusillé à Lagland peu après.

Quelques événements

Plusieurs habitants aident aussi de diverses manières les groupes de résistants et les réfractaires ou sont signalés comme résistants:  le Père Piesters de Differt, Marcel Demoulin (Messancy), Prosper Hames, Maurice Munster (Turpange) e, J.B. Friob (Wolkrange).

Dès 1943, des attentats ont lieu contre les stations d’écrémage. Les bourgmestres sont contraints d’établir une garde pour les surveiller ( Hondelange du 21/7/1943 au 22/9/1943) D3.

Un parachutage de containers d’armes a lieu entre Wolkrange et Sesselich le 10 avril 1942 c. Les Allemands récupèrent plusieurs colis et arrêtent certains résistants. Le bourgmestre P. Winandy et le secrétaire E. Back, accusés d’avoir dénoncé à l’occupant les membres du commando, sont arrêtés par l’Armée Blanche à la Libération puis rapidement relâchés.

Les maquisards, dénommés « terroristes » par l’occupant, sont évidemment traqués. Leur famille est aussi régulièrement inquiétée. La Gestapo vient à plusieurs reprises perquisitionner dans la maison Mauer, rue d’Aubange à Messancy. Rolande, qui n’a que 7 ans à l’époque, repère vite la Citroën noire conduite par Bergmann et part chaque fois au fond du jardin se cacher derrière les groseilliers. Les hommes au long imperméable entrent et cherchent spécialement des photos et des renseignements concernant ses deux frères maquisards Roland et Roger. Un jour, exaspérés par l’inefficacité de leurs recherches, ils arrêtent leur père Jean-Pierre, qui sciait du bois devant la maison. Ils lui disent que, à défaut de trouver ses fils, c’est lui qui serait arrêté. Jean-Pierre Mauer est déporté en Allemagne et ne revient, squelettique et en costume de bagnard, qu’en mai 1945 MR.

6. Les dernières exactions allemandes

L’Allemagne manque de matières premières, notamment de métaux.  Au cours du printemps 1944, de nombreuses cloches sont extraites des clochers afin d’en récupérer le bronze. C’est une entreprise belge sous la surveillance de soldats allemands qui exécute cette triste mission. Un accord avec l’épiscopat belge a cependant permis de laisser en place les plus vieilles cloches et d’en maintenir une au moins dans chaque clocher. En certains endroits (Messancy, Bébange, Hondelange), quelques fragments de bronze sont détachés et gardés en souvenir par des paroissiens RV. Les cloches de la région sont d’abord entreposées à Arlon puis expédiées vers Liège. C’est depuis le port de l’île Monsin qu’elles sont envoyées en Allemagne à bord de barges. Celle qui transporte l’ensemble des cloches du Sud-Luxembourg, la « Julia », a été sabotée par la résistance mais elle parvient cependant à destination et ne sombre que dans le port de Hambourg. Toutes les cloches sont heureusement récupérées et ramenées au pays par les soins de l’armée américaine en octobre 1945. D’après les relevés de la Kreiskommandantur d’Arlon, voici les cloches enlevées en 1944 D6 :

Bébange, cloche de 725 kg le 29 mars

Habergy, cloche de 475 kg le 4 avril

Hondelange, cloches de 1095 et 730 kg le 30 mars

Messancy, cloches de 1210 et 575 kg le 31 mars

Sélange, cloche de 435 kg le 5 avril

Turpange, cloche de 555 kg le 29 mars

Wolkrange, cloche de 880 kg le 29 mars et celle de 620 kg le 7 juillet

A Hondelange, le curé sonne l’unique cloche restée en place lorsque l’on signale un véhicule allemand; les réfractaires savent ainsi qu’ils doivent se cacher HG.

Les particuliers sont aussi obligés de donner leurs objets en cuivre et en bronze.

Le 6 juin 1944, les troupes alliées débarquent en Normandie. C’est le début d’une reconquête longue de trois mois. Dans la population, les avis sur la réussite définitive de l’opération sont partagés. Les Allemands deviennent de plus en plus nerveux et cruels. Ils vont défendre les territoires conquis au prix de nombreuses vies. Les civils paieront un lourd tribut au cours de cet été.

Le 12 août vers 14 h 30, alors qu’il attend son train en gare d’Athus pour rentrer chez lui à Turpange, Fernand Dauphin est atteint par la rafale d’un avion anglais venu mitrailler la locomotive.

Peu avant l’arrivée des Américains, l’état-major de l’amiral Dönitz se serait arrêté quelques jours à Messancy. Ces officiers ont logé dans le château Haebler RV mais ont également résidé quatre jours à l’institut de Differt f. Des archives auraient été brûlées rue du Moulin HP.

Regagnant son domicile de Battincourt le 31 août, pour son malheur, cinq minutes après le couvre-feu, Jean-Baptiste Genin est arrêté au carrefour d’Aubange par un détachement de SS HG. Cet ancien Chasseur Ardennais est martyrisé et finalement pendu par la Gestapo à un arbre qui bordait la route nationale à hauteur de l’actuel zoning du « Triangle d’Or » à Differt. Un petit monument commémore ce tragique événement.

Le 3 septembre, des soldats allemands en retraite s’installent à Hondelange. Un chauffeur de camion, alsacien d’origine et enrôlé de force, confie à la famille qui l’héberge qu’il tentera dès que possible de fausser compagnie à son unité HG.

Trois camions allemands sont mitraillés entre Bébange et Wolkrange par un avion anglais. L’un d’eux, chargé de munitions, explose sur le pont dit « Katzelach »  près du Geisert D11. Un soldat allemand, blessé, est transporté dans la ferme Origer où il décède LF. Leur armée en retraite va « réquisitionner » des vélos, des outils etc … J. Wagner se souvient que les derniers véhicules qu’il a pu voir étaient camouflés en couleur sable comme ceux de l’Afrika Korps WJ.

7. De septembre 1944 à fin 1945

a. La Libération.

Le 9 septembre, l’avant-garde de l’armée américaine atteint Aubange et Athus et se dirige vers Luxembourg. C’est la joie et, sans hésiter, beaucoup de jeunes se rendent à pied à la rencontre des libérateurs, se souvient Roger Kirsch. A la sortie de Messancy, ils aperçoivent un soldat américain mort, étendu sur une civière. Dans le village se forme un cortège désordonné accompagné de quelques résistants en armes. Rue d’Arlon, à hauteur de la maison Reichling, un petit groupe de soldats allemands à vélo s’approche et les résistants n’hésitent pas à faire feu. Les soldats ripostent aussitôt et c’est la débandade. Chacun essaie de se mettre à l’abri. Les Allemands font demi-tour non sans avoir lancé des grenades incendiaires dans quatre maisons KR. Un soldat allemand capturé ce jour est amené au village. Une femme lui dit « C’est bien ainsi, vous avez sauvé votre vie » et lui de répondre « Il y a longtemps que j’attends cela ! » RV. Trois chars se sont détachés de la colonne qui traverse Aubange et, guidés par des résistants du maquis de Musson, font un bref détour jusqu’à Hondelange. Ils regagnent ensuite leur unité partant vers Pétange en passant à Messancy devant les quatre maisons en feu [15].

Le dimanche 10 septembre, peu avant l’heure de la messe, les Américains du 112ème Régiment d’infanterie arrivent à Messancy par la rue de Meix-le-Tige et se dirigent vers Clémency. Quelques jeunes se précipitent à l’église et font sonner les cloches à toute volée RV. La population ne sait comment les accueillir.  Tous crient, chantent et, comme par miracle, les drapeaux aux couleurs nationales, fabriqués en cachette pendant l’occupation, surgissent aux fenêtres. Les soldats américains se montrent généreux et distribuent chewing-gum, chocolat et cigarettes. Un des premiers officiers à s’arrêter rue de la Gare s’appelait John Fairchild KR. Rolande Mauer se rappelle que Ghislaine Muller courait avec des lys blancs et en distribuait aux soldats; les enfants tentaient de monter sur les chars MR.

Une quarantaine de soldats allemands passent encore la nuit du 9 septembre à Turpange. Signalés aux Américains, ceux-ci envoient un char qui tire quelques obus, les faisant fuir à pied vers Sélange. Ils abandonnent trois voitures dans les granges Brix, Huberty et Jungers a, SE, MF. La population sélangeoise voit effectivement passer quelques soldats dépenaillés ayant jeté leurs armes et qui se dirigent vers Clémency en criant « Pitié » pour ne pas être pris à parti par des habitants hostiles GF.

Les Américains emmènent avec eux des prisonniers allemands qui sont temporairement parqués dans le verger entre le chemin de fer et la rue de la Lorraine à Messancy MV .

Le dimanche 10, des combats opposent des Allemands en retraite et des unités américaines dans les bois entre Hondelange et Autelbas de 18 à 20 heures. D’abord accrochés par un groupe de résistants, environ 400 Allemands sont mis en fuite par des renforts américains. Deux GI’s sont tués et un troisième, blessé, est soigné à l’hôpital d’Arlon. Une messe de requiem sera chantée en leur honneur par l’abbé Grethen dans l’église de Hondelange, en présence d’une grande foule [16]. Deux soldats allemands sont capturés par la résistance et enfermés dans l’école des filles HG. Au cours de la journée, les villageois se rendent le long de la grand-route pour voir passer leurs libérateurs.

Deux soldats américains isolés entre Turpange et Hondelange, cachés derrière une haie, sont pris à partie par un groupe de résistants venant d’Aubange à la recherche des derniers Allemands en fuite. Cette méprise malheureuse coûta la vie à l’un d’eux HG, BP.

Sélange voit les premiers GI’s le 11 septembre, en route vers le Grand-Duché. Ils se sont arrêtés au village pour se reposer. Les gens, trop heureux de leur faire plaisir, dorment à même le sol pour leur offrir leur propre lit pour la nuit GF.

Dès le 12 septembre, dans nombre de communes, les femmes soupçonnées d’avoir eu des contacts trop « cordiaux » avec l’occupant sont tondues publiquement. A Messancy, c’est le fils du coiffeur Kolkes qui se charge de la besogne devant le presbytère. Si des collaboratrices notoires sont ainsi punies, de malheureux débordements ne peuvent être évités et des vengeances personnelles se mêlent parfois aux représailles patriotiques.

Le charroi militaire devient intense. La gendarmerie nationale annonce dans le journal « Les Nouvelles » du 13 septembre que la route Arlon – Athus – Longwy est considérée comme route militaire. Les locaux scolaires sont souvent occupés par la troupe.

A l’occasion de la fête de Hondelange, le 17 septembre, Marcel Muller revient dans son village natal où il est accueilli avec enthousiasme. Engagé à la Légion Etrangère dès 1929, il a participé à la guerre sur différents champs de bataille et revient finalement en Belgique avec la Brigade Piron HG, [17].

Une arme nouvelle, la bombe volante V1 est largement utilisée et la population écoute avec angoisse son sifflement caractéristique. Un de ces engins tombe à Habergy non loin de la ferme Barthel dans la nuit du 23 au 24 octobre, soulevant de nombreux toits et détruisant les vitraux de l’église, heureusement sans faire de victime.

b. Funérailles patriotiques

Un des premiers devoirs de la population est de rendre hommage à ceux de ses enfants qui ont donné leur vie pour la Liberté et la Patrie.

Le lundi 18 septembre, un service religieux est célébré en l’église Saint-Jacques à la mémoire de Pierre Luttgens, chef provincial des Insoumis, abattu par les Allemands à Athus. Des maquisards entourent le catafalque et présentent les armes durant l’élévation. La foule qui n’a pu trouver place dans l’église alla se recueillir sur la tombe [18].

Les funérailles des maquisards André Hames, tombé à Thibessart le 27 juillet 44 et Joseph Mauer, assassiné le même jour à Villers-sur-Semois sont célébrées le jeudi 21 septembre. Les cercueils, devant lesquels défile une foule immense, sont exposés à l’école des filles. Ils sont portés à l’église par les membres des mouvements de Résistance de Messancy et suivis par les camarades survivants du maquis. La fanfare participe au cortège [19]. Un mémorial, la Croix des Maquisards, sera inauguré en leur honneur le 27 juillet 1945 en bordure de la route Rulles – Etalle [20].

c. Le 5ème bataillon des Rangers en repos à Differt.

Après avoir participé au débarquement de Normandie, le 5ème bataillon des Rangers américains stationne en Bretagne. Fin septembre 1944, il entreprend un long voyage en train qui l’amène près d’Arlon. Les hommes bivouaquent sous tente quelques jours dans un bois. Puis, début octobre, ils prennent leurs quartiers au séminaire de Differt ; certains y restent jusqu’en mars 1945.

Les Rangers ont pour mission d’assurer la sécurité du Quartier Général de la 12ème Armée grâce à deux compagnies en alerte permanente. Ils appellent affectueusement l’Institut « Boys Town » (la ville des garçons). La population de la région les accueille avec  « l’émotion et la sincérité d’un peuple reconnaissant » 21. Le sergent Henry Glassman, auteur d’une Histoire du 5ème Bataillon Ranger, se souvient aussi des repas de fête dans les familles où l’on mangeait des plats délicieux et où l’on buvait de vieilles bouteilles de vin que les habitants avaient cachées aux Allemands. « Les Rangers n’ont jamais été reçus aussi bien qu’en Belgique » se plaît-il à dire [21].

De son côté, le sergent V.J. Miller appela cette période la « Récréation belge » [22].

«  Nous avons été rapidement déplacés à quelques km d’Arlon à Differt. C’était bien d’être à l’abri des éléments dans un bâtiment. Des volontaires ont été sollicités pour effectuer diverses tâches. Ceux qui aimaient boire beaucoup, faire l’amour et qui étaient généralement des « enfants à problèmes » allèrent en ville. Les GI’s pacifiques attendaient qu’on leur procure des occupations pour casser la monotonie. Nous faisions des corvées pour aider une organisation religieuse. Le lendemain, tous ceux qui étaient là ont été convoqués à une réunion. Il semble que des bouteilles de vin conservées pour fêter la libération aient disparu. Après discussion, le colonel Richard Sullivan a ordonné que 50 d’entre nous aillent loger sous tente jusqu’à ce que l’on trouve le coupable.(ndlr : Le colonel Sullivan envoya un camion en France pour ramener un nouveau stock de bouteilles.)  J’organisais la vie de ces malchanceux au sein de ma compagnie. Nous allions à travers champs vers un village proche (ndlr : Turpange) où il y avait un café et nous prenions deux bières chaque soir. Nous étions finalement mieux que ceux qui étaient à l’intérieur. Nous allions à Arlon de temps en temps voir les boutiques, acheter de la crème glace, de la bonne bière et autres bonnes choses.»

Les soldats américains sympathisent rapidement avec la population des villages proches. Lors de la fête à Bébange et à Turpange, chaque famille invite deux ou trois GI’s à sa table WJ, SE. Le coiffeur Joseph Kirsch (Yup), qui tient aussi café près du vieux moulin de Turpange, est bien connu des soldats qui l’ont surnommé « Al » SE.

Ils organisent des séances de cinéma et jouent des matchs de football notamment contre l’équipe de Stockem, champion provincial de l’époque (défaite des Rangers) et un autre le dimanche 5 novembre contre les Vétérans de Messancy et l’Etoile Sportive de Turpange. Ce tournoi triangulaire était organisé au profit des sinistrés de Saint-Léger et de Messancy.

Leur aumônier, le Père Joseph Lacy, célèbre le 19 octobre à Differt une messe solennelle de requiem « pour le repos de l’âme de tous nos copains qui ont donné leur vie pour Dieu et leur Pays » D13. Des auxiliaires féminines font partie du bataillon et cette présence parmi les GI’s surprend la population.

Les enfants de Turpange se rendent fréquemment à Differt. Ils peuvent voir les soldats s’exercer au tir dans les jardins de l’Institut mais aussi pratiquer des sports inconnus pour eux tels l’escrime et le rugby SE.

d. Offensive von Rundstedt

Si les troupes alliées, principalement les Américains, ont libéré le sud de la Belgique en septembre, la guerre n’est malheureusement pas encore terminée.

A la mi-décembre, c’est la consternation. On entend tonner le canon à nouveau. L’armée allemande tente une contre-offensive désespérée sur toute la ligne des Ardennes. Les troupes américaines (101st Airborne) sont encerclées à Bastogne et c’est la 3ème Armée commandée par le général Patton qui, partant de Metz le 18 décembre, rejoint les assiégés en un temps record. Le charroi couvrit 150 miles en 19 heures. Les bruits des chenilles réveillent les habitants de Messancy vers 5 heures. Des soldats demandent à se rafraîchir et se reposer un peu. Ils sont accueillis avec chaleur dans les maisons et, en remerciement, distribuent cigarettes, chocolat, savon, tabac et chewing-gum KR. Des tanks patinent sur le verglas en montant rue de la Gare RV. Des chars et de gros camions venant de Turpange stationnent deux jours à Sélange GF. A Turpange, Henri Muller sorti de sa maison dès l’arrivée du convoi reçoit d’un soldat américain la mission de faire la circulation et d’indiquer aux chars la bonne direction SE.

Les troupes américaines résident dans nos villages. Les écoles sont occupées, de même que certaines salles. Un bureau de poste du 777ème d’Artillerie s’installe dans la maison Hennico, rue d’Arlon HP. Hondelange abrite un centre de ravitaillement organisé dans l’ancienne laiterie. Le jour de Noël, les soldats reçoivent une portion de dinde et font goûter aux habitants ce mets qu’ils ne connaissent pas HG.

Au début de l’offensive, un avion de combat américain a, semble-t-il, confondu les champs entre Turpange et Hondelange avec l’aérodrome de Latour où il devait se poser. Arrivé sur des terrains détrempés, il s’immobilise fortement endommagé. Les deux pilotes se rendent à Hondelange pour chercher du secours. Plusieurs habitants du village vont prélever sur l’épave différentes pièces de même que le mica des vitres. D’autres petits avions monomoteurs de reconnaissance eurent la même mésaventure mais s’en tirèrent sans mal à l’exception de l’un d’eux qui ficha son hélice en terre ZA, SE.

Parfois, le soir, des soldats se battent entre eux et il faut l’intervention de la Military Police ( MP) pour rétablir l’ordre HP.

Au cours de cette offensive, un hôpital de campagne est aménagé par l’armée américaine dans les locaux de l’école des sœurs de Messancy (villa Clainge). Les ambulances y amènent de nombreux blessés, parfois des soldats allemands, pour y être opérés ou amputés. Certains habitants ont pu s’y procurer des couvertures KM. Le dimanche, des membres du personnel de l’hôpital assistent à la messe en blouse blanche et mettent dans le plateau de la collecte de petits billets de 5 F français imprimés aux USA HP. Le doyen Perrad va chaque jour rendre visite aux blessés RV. Rolande Mauer nous a également raconté que son frère Roland , après être revenu du maquis, s’était mis au service de l’hôpital américain pour aider à soigner les blessés. Un jour, il lui rapporta une petite poupée de chiffon confectionnée par le personnel infirmier MR.

Paul Hennico se souvient qu’au bas de l’actuelle rue de la Clinique, un soldat d’origine indienne faisait brûler du mazout dans son casque et jouait au cracheur de feu HP.

Alors que Rolande Mauer joue dans la neige devant la maison familiale route d’Aubange (actuellement, route de Longwy n°40 ) un jeune soldat lui lance amicalement des boules de neige. Mais soudain le camion militaire derrière lequel il se cache fait marche arrière et le malheureux est écrasé. Ce soldat revenait du front pour se reposer quelques jours MR .

Une forteresse volante B17 de l’armée américaine, touchée après un combat aérien, s’écrase non loin du village d’Udange le 7 janvier 1945. Un des aviateurs qui a sauté en parachute au-dessus de Bébange est récupéré par des Rangers accourus de Differt. L’avion devient un but de promenade pour les habitants des villages environnants WJ, SE, D1.

e. Le doyen Perrad a failli être fusillé RV

A la mi-décembre 1944, le groupe de résistants dirigé par J. Goedert reçoit la mission d’arrêter un citoyen d’origine allemande marié à une Messancéenne depuis plus de vingt ans et parfaitement intégré au village afin de le conduire à Arlon où la Justice veut le questionner. Le groupe Goedert ne peut le trouver qu’en fin de journée et se rend compte que le dernier train pour Arlon est déjà parti. Il est alors décidé de l’enfermer dans la salle attenante au presbytère. Le doyen Perrad, sollicité, accepte de donner la clé du local. En cours de soirée, il rend visite au prisonnier et lui apporte une couverture.

Dans le café voisin, chez Perbal, deux officiers américains et leur chauffeur sont déjà sous l’emprise de la boisson. Ont-ils été volontairement mis au courant ou ont-ils entendu (et compris) des bribes de conversations entre d’autres clients ?  Ils croient, en tout cas, que le curé cache un espion allemand au presbytère. Prenant leurs armes, ils se saisissent du doyen et du prisonnier puis se rendent chez Goedert qui habite en face du presbytère ; quelques hommes de son groupe s’y trouvent. Pendant que le chauffeur, arme au poing, se place dans le couloir pour empêcher toute sortie, les officiers se montrent menaçants et engagent un dialogue de sourds : ils ne parlent pas français et les Messancéens présents ne comprennent que quelques mots d’anglais. Ceux-ci se rendent cependant compte que les deux hommes sont menacés d’être fusillés sur le champ. J.P. Altenhoven, présent ce soir là et connaissant bien la maison, parvient à sortir par la cave et se retrouve ainsi derrière la maison Reiland. Il réveille la famille et demande l’aide de Victor qui, alors aux études à Arlon, avait  appris l’anglais. Victor Reiland revient donc chez Goedert en compagnie de J.P.  Altenhoven , se présente aux Américains et tente de leur expliquer la situation. Au début, les deux officiers restent obsédés par l’idée de tuer les « traîtres ». Mais les heures passent, Victor Reiland gagne du temps en dialoguant et les vapeurs d’alcool qui imprègnent les Américains se dissipent peu à peu. Ils décident finalement de partir en confiant aux résistants la garde de leurs deux « prisonniers ». Le doyen Perrad rentre au presbytère puis, ayant dit sa messe, il se rend chez le boucher Scharff pour lui demander de le conduire à Arlon avec sa voiture. L’abbé Perrad va aussitôt déposer plainte contre les deux officiers. Ceux-ci seront effectivement sanctionnés quelques mois plus tard.

f. Explosion d’un train de munitions en gare de Messancy

Lors de l’offensive von Rundstedt, la ligne de chemin de fer Athus – Arlon est ouverte aux convois militaires qui, venant d’Alsace, approvisionnent les divisions américaines. Les trains se succèdent à une cadence effrénée et la gare d’Athus a bien du mal à réguler tout ce trafic. Les convois sont dirigés le plus vite possible vers Arlon. Certains d’entre eux sont tractés par de vieilles locomotives à vapeur, d’autres par de modernes locomotives au diesel, nettement plus rapides.

Le 10 janvier 1945 la couche de neige est épaisse ; il fait très froid. Vers 3 h du matin, des wagons chargés de munitions attelés à une locomotive à vapeur de la Société française des Chemins de fer montent péniblement vers Arlon. Les signaux placés à la sortie de la gare de Messancy arrêtent un second convoi pourvu d’une locomotive diesel. Arrivé à hauteur d’Autelbas, le machiniste du premier convoi se rend compte qu’il manque de puissance. Il décide de décrocher la locomotive pour aller se ravitailler en eau à Arlon. Les wagons sont temporairement abandonnés sur la voie, freins à main serrés, mais ceux-ci cèdent et le convoi repart vers Messancy, prenant progressivement de la vitesse dans la pente. Le préposé de la gare d’Autelbas se rend compte du danger et prévient immédiatement ses collègues de Messancy et d’Athus. L’employé de Messancy reçoit aussitôt l’ordre de faire reculer le train arrêté en gare mais, n’ayant hélas aucune notion d’anglais, il ne parvient pas à se faire comprendre des conducteurs américains. Le chef de gare F. Schrobiltgen a juste le temps de crier « Partez, ce sont des munitions, tout va sauter »MA . La catastrophe est inévitable, les deux trains entrent en collision, les munitions commencent à exploser, le mazout de la locomotive diesel prend feu. Trois Américains présents sur le train sont tués, d’autres grièvement blessés. Les explosions vont se succéder toute la matinée en éparpillant dans le village des obus, des éléments du train et des éclats métalliques rougis par le feu. Un train de roues sera retrouvé derrière la maison du juge Kirsch, un autre en haut de la rue du Beau Site. En cette période de l’année, la couche de neige est assez importante et protège heureusement nombre de toitures en éteignant les débris incandescents. Roger Kirsch, qui habite près de la gare, se réfugie avec sa famille dans la cave de monsieur Mertz. Les hangars de monsieur Schneider, remplis de planches, de bois de charpente et de charbon prennent feu en dégageant une chaleur intense. Tous les habitants quittent alors le quartier et constatent que plusieurs maisons sont aussi la proie des flammes dont celles de Gaston Jacob et de la famille Schroeder à la Grand-rue, la ferme Niederkorn et la maison Barthol rue du Centre et trois maisons rue de la Trinité KR.

Le bruit est entendu à Turpange où la population croit d’abord au retour des troupes allemandes qui bombarderaient Messancy. Les habitants de Sélange assistent du haut de la colline à ce monstrueux feu d’artifice en croyant d’abord, eux aussi, à un nouveau retour des troupes allemandes.

L’armée américaine envoie très rapidement des secours. Des soldats, au péril de leur vie, parviennent à décrocher des wagons et à les faire reculer vers Athus. Des pompiers de l’armée américaine arrivent de Luxembourg et, postés sur le pont, mettent de puissantes lances en batterie pour arroser le train en feu. Les pompiers d’Athus leur prêtent main forte.

On ne déplore heureusement aucune perte civile. Quelques personnes sont blessées par des éclats de verre et une seule doit être hospitalisée [23]. Les dégâts matériels, par contre, sont considérables. De nombreux toits sont soulevés par le souffle des explosions ; des dommages sont constatés à l’hôtel de ville (villa Clainge), au presbytère et même à l’église où la porte d’entrée est enfoncée, tous les vitraux fêlés et ceux du chœur complètement détruits D9.

Les sinistrés, en plein hiver, se hâtent de réparer les toitures avec des planches et du carton bitumé. Presque tous les carreaux sont cassés et la vaisselle de bien des maisons proches a souffert. L’armée américaine a installé dans la cour de monsieur Schneider une cuisine de campagne où les habitants du quartier de la gare peuvent se ravitailler.

Le conseil communal tient séance dès le lendemain et déclare :

« Attendu que le 10 janvier 1945, lors de l’explosion des munitions chargées sur un train garé à la station de Messancy, sept maisons ont été incendiées et plus de 200 fortement endommagées et rendues en partie inhabitables, leur toiture s’étant effondrée et les murs prêts à s’écrouler,

Considérant que dans les circonstances actuelles de la guerre il est impossible aux habitants sinistrés de se procurer les  bois nécessaires à la réfection des toitures,

Décide de fournir gratuitement, dans la mesure du possible, aux habitants sinistrés les vernes et chevrons nécessaires à la réfection de leur toiture en faisant abattre des pins sylvestres dans la forêt au lieu-dit Hart ». D7

Une distribution gratuite de vitres a lieu dans la cour de l’école communale, rue des Déportés HP .

Les câbles électriques ayant été sectionnés par l’explosion, Messancy et Turpange sont privés d’électricité, pendant ces grands froids, durant une dizaine de jours. La pompe du château d’eau ne fonctionne plus ; il est impossible également d’alimenter Sélange en eau potable HP.

Les obus, heureusement non amorcés, et autres munitions éparpillés dans le village sont enlevés par camions entiers. L’armée américaine les rassemble à la Hart sur un terrain proche de l’actuelle usine Magolux pour les y détruire. Des jeunes du village, inconscients du danger, ramassent les « macaronis de poudre » pour les faire brûler ou les douilles vides pour en faire sauter la capsule du détonateur en les percutant au moyen d’un clou et d’un marteau.

Une enquête sur la catastrophe est diligentée par les autorités américaines et belges. Elle met en évidence la responsabilité du machiniste, du chauffeur et du chef-train présents à bord du convoi arrêté à Autelbas. L’affaire fut jugée par le tribunal correctionnel d’Arlon en février 1947 et les trois prévenus furent acquittés.

Certaines munitions déposées à la Hart restent cependant dangereuses et le samedi 30 juin 1945, des adolescents qui les manipulent sont surpris par l’explosion d’un obus. Jean Schroeder est malheureusement tué et Roger Jung gravement blessé [24].

g. Des volontaires en Irlande

Alors que l’offensive des Ardennes bat son plein, le gouvernement britannique offre à la Belgique d’équiper et de former cinq brigades de volontaires. Ces jeunes gens, parfois issus de la résistance, s’embarquent à Ostende au début de l’année 1945. Ces unités d’infanterie recrutent notamment à Arlon 150 hommes pour la 5ème Brigade (Brigade Merckem) et 450 pour la 2ème Brigade (Brigade Yser). Plusieurs volontaires issus de nos communes en font partie. Ils subissent la dure formation de l’armée anglaise dans différents camps situés en Irlande du Nord (notamment à Armagh) pendant six mois puis en Angleterre pendant deux mois. Ces unités sont destinées au théâtre d’opération d’Asie, plus particulièrement en Birmanie. C’est ainsi que les soldats reçoivent tous les vaccins nécessaires pour ces régions tropicales et font une partie de leur instruction en short ! Leur matériel provient de l’armée anglaise de Libye.  L’usage de la bombe atomique à Hiroshima et la fin de la guerre avec le Japon mettent un terme à leur mission initiale. Ils constituèrent alors les premières troupes d’occupation en Allemagne.

Parmi les volontaires, nous avons relevé  HG, HR :  Nicolay Robert et Stoffel René de Hondelange, Mauer Roger de Messancy pour la 2ème Brigade ; Dillembourg Max, Genin Raymond, Hames Charles, Hennico Albert, Hoeltgen René, Kolkes Jean, Schrobiltgen Edouard et Schutz Constant de Messancy, Decker Victor, Hagen Gustave, Thill René et Wautier Edouard de Hondelange pour la 5ème Brigade.

h. Fêtes et retour de prisonniers

Dès le 11 novembre 1944, le Comité des Combattants de 1940 organise déjà une journée de commémoration. Une messe de Requiem est chantée à Messancy pour tous les soldats et membres de la Résistance morts au service de la Patrie. Un cortège réunissant les enfants des écoles enrubannés aux couleurs tricolores, les sociétés avec leurs drapeaux, les autorités et la population parcourt le village pavoisé par un temps superbe. Les musiciens des trois fanfares locales sont placés sous la direction de monsieur Hosch [25].

Le village de Sélange organise un cortège en mai 1945 auquel participent des soldats américains. Des cochons, symbolisant l’ennemi vaincu, sont promenés dans des charrettes GF.

A Bébange, lors du retour de l’abbé Alzinger, la population construit un arc de triomphe et offre des cadeaux à son curé héroïque WJ.

Le vendredi 20 avril, Messancy est en liesse pour le retour du premier prisonnier, Raymond Genin. Chasseur Ardennais, il était détenu en Allemagne et fut libéré par l’armée américaine. Musique en tête, un cortège vient à sa rencontre et une cérémonie simple mais émouvante s’en suit [26]. Le lieutenant Joseph Neu qui eut une conduite héroïque durant la campagne des 18 jours est attendu dans le courant du mois de mai [27].

Le village de Turpange organise le 10 juin à 16 heures une manifestation en l’honneur des prisonniers de guerre et politiques avec la participation des enfants des écoles, de la résistance, du club de football, des sociétés de musique de Messancy et Sélange a.

Le 1 juillet 1945, Victor Meunier, résistant revenu du camp de Dachau est fêté par le village de Messancy. Revêtu de sa tenue de bagnard, escorté par la musique, il parcourt les rues dans une calèche décorée [28]. Les festivités ont été organisées par monsieur Schneider, un ancien gendarme RR.

Le 15 juillet 1945, le Comité des Combattants organise à Messancy un grand cortège auquel participent les enfants des écoles déguisés en soldats et en infirmières, les scouts ainsi que les différents groupements et associations, certains accompagnés de chars décorés. Le Conseil communal, comme décidé lors de la séance du 28 mars, reçoit à l’hôtel de ville les prisonniers de guerre, les prisonniers politiques et les maquisards de la commune. Un souvenir leur est offert pour commémorer leur retour au pays D7.

Lorsque la population de Sélange, le 6 août, apprend que les Etats-Unis ont lancé la bombe atomique sur Hiroshima, elle comprend que les hostilités mondiales sont définitivement terminées. C’est la liesse dans le village, les drapeaux pavoisent les maisons, la fanfare sort dans les rues et des soldats américains étant de passage, ils se joignent aux festivités ; l’un d’eux se charge même de la grosse caisse et se joint à l’harmonie GF.

En octobre 1945, le Conseil communal de Hondelange octroie un subside extraordinaire pour célébrer par des festivités l’anniversaire de la Libération et le rapatriement de tous les citoyens, tant prisonniers militaires que politiques D4.

En guise d’épilogue

« Pendant la guerre, il ne s’est rien passé dans notre village » : voilà la première réponse que beaucoup d’habitants nous ont faite lorsque nous les avons interrogés sur ce sujet. Puis peu à peu la mémoire refait surface et livre une foule de détails. Les dates sont parfois incertaines, les protagonistes difficiles à identifier. Puis grâce aux recoupements, aux documents d’archives, aux photographies, aux journaux, l’histoire se reconstruit. Les récits deviennent passionnés, les recherches passionnantes. Tous les témoins, que nous remercions encore pour leur aimable collaboration, ont livré leurs souvenirs avec plaisir et émotion, n’hésitant pas à dévoiler des détails restés jusqu’à présent confidentiels.

Nous espérons que le recueil de tous ces témoignages, qui constitue aussi un « devoir de mémoire », sera également lu avec intérêt par les générations nées après la seconde guerre mondiale. Il apportera peut-être des précisions ou des réponses aux récits parfois mystérieux que racontaient les parents ou grands-parents.

Documents

D1 = asbl Musée Royal de l’Armée, Section Armée de l’Air, Bruxelles

D2 = Messancy, archives de la commune

D3= Hondelange, dossier des Dommages de guerre

D4 = registre du conseil communal de Hondelange

D5 = registre du conseil communal de Habergy

D6 = Kommandantur Arlon ( AEA)

D7 = registre des délibérations du collège de Messancy

D8 = registre aux délibérations du Conseil Communal de Messancy 1936-1946

D9 = Messancy, dossier des Dommages de guerre

D10 = registre du conseil communal de Sélange

D11 = registre du conseil communal de Wolkrange

D12 = « L’Etape », revue des scouts de Messancy 1942-1944

D13 = faire-part mortuaires et images pieuses

Les documents D2, D3, D4, D5, D7, D8, D9, D10 et D11 sont en dépôt à la maison communale de Messancy.

Bibliographie

  1. Collectif,  Notre Eglise  1851 – 2001, Paroisse de Turpange,  2001
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    2. Furst A. , Clémarais dans la guerre (1943 – 1944), Presses de l’Avenir, Arlon 1977
      1. Furst A., Mon curé et mon ami : Josse Alzin (1930 – 1940), Aubange 1982
      2. Hols L. et Gigi R., Carnet de bord d’une épopée Mariste en Lorraine belge, Differt 1887 – 2000, Virton 2001
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      4. Michel H., La seconde guerre mondiale, P.U.F. 1972
      5. Mourre M. , Dictionnaire de l’Histoire, Larousse 1998
      6. Ordioni P., Commandos et cinquième colonne en mai 1940, la bataille de Longwy, Nouvelles Editions Latines, Paris 1970
      7. Triffaux J.M., Arlon 1939 – 45, Arlon 1994
        1. Zimmerman J.M ., Les curés, vicaires et prêtres de Messancy in Messancy – Bébange  Eglises et Paroisses 1847 – 1997, Messancy 1997

Témoignages     (domicile, village concerné)

BL = cahier de souvenirs de Bernard Léon (Athus, Messancy)

BP = Back Paul (Messancy, Turpange)

GC = notes de Gillet Camille (Hondelange)

GF = Gofflot Floris (Sélange)

HG = Hagen Gustave (Differt, Hondelange)

HP = Hennico Paul (Messancy)

HR =  Hoeltgen René (Messancy)

KM = Kariger Maurice (Messancy)

KR = notes de Kirsch Roger (Aubange, Messancy)

LF = souvenir de Léger Félix

MF = Maus Firmin (Turpange)

MA = Mauer Arsène (Messancy)

ML = Muller Léa (Messancy, Turpange)

MR = Mauer Rolande  (Messancy)

MRG = Mauer Roger (Messancy)

RA = Reis André (Messancy)

RR = Royer Raymond (Messancy)

RV = Reiland Victor (Arlon, Messancy)

SA = Schmit Albert (Messancy)

SE = Schrobiltgen Emilien (Turpange)

WJ = Wagner Julien (Bébange)

Légendes Photos

1. André Hames (appuyé)  et  Roger Mauer Photo Roger Mauer

2. La garde devant la mine de la rue du Bois à Sélange en 1939 (le second à partir de gauche est Elie Theisen, futur bourgmestre de Hondelange).

3. Souvenir mortuaire de V. Longton et R. François

4. Permis de travail de Julien Wagner, Bébange.

5. Char de la troupe scoute de Messancy lors du cortège patriotique le 15 juillet 1945.

6. Faire-part de la messe de requiem pour les Rangers

7. Enterrement de Joseph Mauer    Photo Roger Mauer

8. Confirmands de 1941 à Messancy

de g. à dr, 1er rang : Jean Guissard, Roger Ries, Jean Eischen, Narcisse Kirsch, Eugène Sower, Emile Hames, Pierre Thill.

2éme rang : Lucien Schneider, Maurice Kariger, Pierre Sand, Albert Metz, Henri Reis, Michel Schumacker, Augustin Dullier, André Barthol, Lucien Niclou, Adolphe Goffin.

3ème rang : Felix Barthol, Marcel Braas, Jean Schumacker, Roger Kirsch, Raymond Royer, Adolphe Lusson, Charles Watry, Arthur Stoffel et Elimar Wagner, le parrain.

4éme rang : Jean Mathieu, Jean Bosseler, Paul Gengler, Raymond Mertz, Arsène Mauer, Jean Feller,  René Hoeltgen, Adrien Hoffelt, Roger Jung.  Photo Raymond Royer

9. Le cortège des enfants lors de l’enterrement de Joseph Mauer       Photo Roger Mauer

10. Enterrement de Joseph Mauer le 21 septembre 1944 Photo Arsène Mauer

11.    L’équipe de Messancy à Longeau. De g. à dr., accroupis : Roger Marck, Constant Schutz, Pierre Weber, Pierre Kariger, Justin Hausemer ; debout : Albert Reiland, André Stoffel, Michel Schumacker, Joseph Mathay, ?, Camille Schwartz, Victor Reiland, Josy Gauché, Raymond Stoffel.   Photo Maurice Kariger

  1. 12. Equipe de football de Messancy. De g. à dr., 1er rang (accroupis) : Louis Marchal, René Thill, Roger Heymans, Pierre Schrobiltgen, Antoine Neu, Albert Bremer  2ème rang (accroupis) : François Marth, Alfred Schmit, Edouard Kirsch, Jean Furst, Roland Mauer, Jean Schutz  3ème rang (debout) : Augustin Breyer, François Lepage, Victor Bremer, Emile Mauer, Florent Coos, l’arbitre Michel Schutz, Charles Furst, Albert Kirsch, Roger Mauer, Albert Schmit, René Welchen.                                                                            En maillots rayés, les vétérans, en maillots blancs, l’équipe première. Photo Maurice Kariger
    1. Joseph Mauer   Photo Arsène Mauer
    2. (sans légende)
  2. Les musiciens de la « Royale Concordia » et de « L’Emulation » réunis rue d’Aubange devant le domicile de  Raymond Miget à son retour de captivité.  Photo Raymond Royer

16. Ferme Ries de Differt incendiée le 10 mai 1940.   Photo Emilien Schrobiltgen

17. Roger Mauer en Irlande en 1945.  Photo Roger Mauer

18.                   Photo Raymond Royer

19. de g. à dr. : Fernand Scharff, Thierry Hennico,  G. Garand, Adolphe Goffin, un scout de France et Raymond Royer au camp de Metzert en août 1942.  Photo Raymond Royer

20. (sans légende)

21. Timbres de ravitaillement pour le charbon.   Coll. Paul Hennico

22. Victor Meunier (1er plan) à l’usine d’Athus.  Photo Arsène Mauer


[1] Les indices renvoient soit à la bibliographie en dernière page soit aux références en bas de page.

2 document original, collection Roger Kirsch

[2] Journal Les Nouvelles  du 18 octobre 1944

[3] Journal Les Nouvelles  20/7/1945

[4] Journal Les Nouvelles 5/5/1945

[5] Documents comptables ; collection Raymond Royer.

[6] Journal Les Nouvelles du 18 octobre 1944

[7] Journal L’Avenir du Luxembourg du 9 juillet 1985

[8] Journal Les Nouvelles du 22 septembre 1944

[9] Journal Arlon-Carrefour du 7 septembre 1994 : souvenir de Aimé Boterberge.

[10] Journal Les Nouvelles du 19 novembre 1944.

[11] Journal Les Nouvelles du 11 août 1945

[12] Journal Les Nouvelles des 26 septembre 1944 et 31 juillet 1945.

[13] Journal Les Nouvelles du 20 octobre 1944

[14] Journal les Nouvelles du 18/9/1944

[15] Témoignage de Josy Wagner, « Journal des Trois Frontières » du 7/9/1994

[16] Journal Les Nouvelles du 4 octobre 1944

[17] Journal Les Nouvelles du 21 novembre 1944

[18] Journal Les Nouvelles du 20 septembre 1944

[19] Journal Les Nouvelles  du 24 septembre 1944

[20] Journal L’Avenir du Luxembourg du 4 août 1945

[21] History oh the fifth ranger battalion in www.min.net/~randall/cgi_bin/book.cgi

[22] D’après : Biography of Victor J. “Baseplate” Miller, Sgt Co E, 5th Ranger Battalion  in www.geocities.com/oralbio/millervjbio.html

[23] Journal Les Nouvelles du 28/1/1945

[24] Journal Les Nouvelles du 5-6 /7/1945

[25] Journal  Les Nouvelles du 19 novembre 1944

[26] Journal Les Nouvelles du 28 avril 1945

[27] Journal L’Avenir du Luxembourg du 6 mai 1945

[28] Journal Les Nouvelles du 7 juillet 1945